Yves Klein, Francis Bacon, Damien Hirst… Leur point commun ? Eh non, ça n’est pas la pêche à l’huître, mais (bon d’accord vous l’aviez deviné) Dries Van Noten. Pour son exposition aux Arts décoratifs, le créateur de mode belge a pioché dans les collections du musée pour s’entourer d’œuvres des artistes dont il s’inspire – entre abstractions géométriques de Victor Vasarely, expressionnisme de Kees Van Dongen et portraits bourgeois de Jacques-Emile Blanche. De collection en collection et de saison en saison, peintures, sculptures, photos viennent se frotter à ses jupons, jouant habilement sur des échos de formes ou des correspondances de couleurs. Mais pas seulement : car ce que le diplômé de l'Académie royale des beaux-arts d'Anvers (promo de 1981) a imaginé pour cette grande consécration rue de Rivoli a de quoi faire blêmir d’envie ses confrères. Van Noten ne se contente pas de présenter son œuvre. Il va bien plus loin, en nous invitant, comme peu ont su le faire avant lui, à entrer de plain-pied dans son processus créatif. Ou mieux encore, dans l’idée intime (et sublimée) qu’il se fait de son univers artistique : un monde finement compartimenté sur le modèle des « Chambres des merveilles » de la Renaissance, réunissant des images, des étoffes ou des objets remarquables sous forme de cabinets thématiques (« papillons », « orientalisme », « or »…).
En découle un imaginarium foisonnant, nourri de brassages culturels, de voyages, de folklore. C’est beau, c’est flamboyant, c’est minutieusement agencé. Ici, la mode est une éponge, assoiffée d’art et de couleurs. Elle fait librement des allers-retours entre prêt-à-porter, peinture, sculpture, cinéma, faune, flore, artisanat. Et montre, comme une évidence, que les créations de Dries Van Noten sont un peu à l’image de notre époque : à défaut d’inventer de nouvelles expressions, elles se composent à partir de ce qu’elles trouvent en regardant vers ailleurs, vers autrefois, vers autrui. Les années 1950. Les uniformes militaires. L’Espagne des toreros. Le hippy chic des années 1960. L’Inde de Bollywood. L’esprit punk. L’Afrique. L’Orient. Pour le créateur de mode belge, tout est bon à prendre. Ses accoutrements sont comme des aimants dotés d’un flair esthétique hautement développé. Sorte de Quentin Tarantino de la mode, ce qu’il fait de mieux, ce sont ces patchworks hybrides, symptomatiques de notre XXIe siècle multiculturel, savamment usurpateur et passéiste. Alors peu importe si l’on en apprend peu sur le parcours de Dries Van Noten, et s’il apparaît finalement comme un caméléon qui emprunte, cite et adopte (divinement bien), plus qu’il ne réinvente : ici, il se passe surtout quelque chose de neuf et de merveilleux dans l’art et la manière d’exposer la mode. Et c’est déjà beaucoup.
> Horaires : du mardi au dimanche de 11h à 18h, nocturne le jeudi jusqu’à 21h.
Time Out dit
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