Critique

Henri Cartier-Bresson

4 sur 5 étoiles
  • Art, Photographie
  • Recommandé
Publicité

Time Out dit

Lorsque le XXe siècle a vu sa vie défiler, juste avant de s’éteindre dans un éclat de bulles de champagne, de feux d’artifice et de bugs informatiques, ses dernières pensées ne devaient pas être loin de ressembler à une déflagration de photos de Cartier-Bresson. Les avant-gardes des années 1920. L’Afrique française. La guerre d’Espagne. Le Front Populaire. Les premiers congés payés. L’avancée du capitalisme avec, dans son rétroviseur, les laissés-pour-compte de Mexico, de Trieste, de Paris. Et puis, dans un dernier souffle : le retour des prisonniers de 39-45, la Libération, les funérailles de Gandhi, la décolonisation, Mao, la conquête de l’espace, la surpuissance américaine, Mai 68, le crépuscule du soviétisme… Tout ça, dans une vrombissante nuée de noir et blanc.

Le Centre Pompidou confirme haut la main la réputation qui le précède : c’est bien lui, « l’œil », et la mémoire, du siècle. De sa naissance en 1908 à sa disparition en 2004, Henri Cartier-Bresson a presque tout vu, presque tout photographié, presque tout inventé. Il a non seulement marqué la photo de son empreinte indélébile, enfanté l’« instant décisif », posé la première pierre du photoreportage. Le fondateur de l’agence Magnum a aussi tracé son chemin dans le sillon des surréalistes, faisant toujours preuve d’un sens artistique désarmant, livrant toujours des cadrages exemplaires, et avançant (bien vers la gauche) d’un pas militant et social. Tout, chez lui, prend une ampleur historique et respire le sans faute. C’en est presque énervant – un peu comme la coqueluche du collège qui, en plus d’être jolie, drôle, sympa et intelligente, travaille dans l’humanitaire, répare le scooter de son mec et compose des chansons d’une main en lisant Dostoïevski de l’autre.

Avec plus de 350 tirages, Beaubourg souligne la toute-puissante diversité de la production de Cartier-Bresson, là où d’autres grandes rétrospectives ont eu tendance à mettre, au contraire, l’accent sur l’unité de son travail. En plantant sa photographie dans les racines des avant-gardes surréalistes – Centre Pompidou oblige –, l’exposition grimpe ensuite de branche en branche pour en explorer toutes les ramifications. Saute de l’engagement social aux expériences visuelles, bondit de vitrines parisiennes en matchs de baseball américain et de revues communistes en ruelles mexicaines. Le tronc qui soutient l'ensemble ? Ces ombres tranchantes, ce ballet de formes géométriques, ce cadrage au cordeau… Tous ces arrière-plans finement étudiés devant lesquels sont venus défiler, comme sur une scène de théâtre, les acteurs et les anonymes de l’histoire moderne.

> Horaires : du mercredi au lundi de 11h à 23h, fermé le mardi.

Infos

Adresse
Prix
De 9 à 13 €
Publicité
Vous aimerez aussi
Vous aimerez aussi