Critique

My Joburg

4 sur 5 étoiles
  • Art
  • Recommandé
Publicité

Time Out dit

« Qui est Johannes ? » Une question qui flotte au milieu de ‘My Joburg’ sur de grandes lettrines jaunes en carton, brandies par une foule que photographiait Sue Williamson en 2009. Pas « qu'est-ce » mais « qui ». La nuance n’est pas anodine et se prête d’ailleurs parfaitement à l’exposition : en portant son regard sur Johannesburg et sa scène artistique, la Maison Rouge ne se contente pas de rassembler des artistes sud-africains autour du thème de leur chère et tendre capitale. Elle joue les biographes, les psys, les sociologues, scrutant les différentes facettes de cette mégapole de 4 millions d’habitants pour mieux en explorer les signes distinctifs. Un peu comme si « Jozi » (telle qu'on la surnomme) était une personne, taraudée par une considérable crise d’identité.

Mais alors, qui donc est Johannes ? Johannes est une porte. Parfois fermée, parfois béante, mais le plus souvent ceinturée par des barreaux qui symbolisent les tensions d’une société rongée par la violence et le racisme (Mikhael Subotzky & Patrick Waterhouse). Johannes est une autoroute à deux étages, sur laquelle circulent quotidiennement des millions d’usagers, pris dans l’orbite d’une World Class City transfigurée par la Coupe du monde de 2010 (Zen Marie). Johannes est un espace urbain ourlé de townships, ces banlieues-dortoirs pour non-blancs héritées de l’apartheid (Dorothee Kreutzfeldt). Johannes est une communauté LGBT en quête de reconnaissance (Steven Cohen), une cravate de dictateur (Willem Boshoff), une nuée de salons de coiffure, une carte géographique, un mur de visages inconnus (Zanele Muholi), un guide de voyage (Stephen Hobbs), une terrasse cernée de gratte-ciel sur laquelle se prélasse une femme à la peau de soie (Billie Zangewa)...

Loin d’une vision simpliste, la Maison Rouge esquisse un portrait éclaté, complexe, subtil. Après une introduction richement documentée par des images, des archives et des textes extraits d’un livre de Bettina Malcomess et Dorothee Kreutzfeldt, l’exposition glisse doucement vers des représentations plus métaphoriques, plus artistiques. Du pop art à la sauce sud-africaine de Kendell Geers à l’excellent court métrage animé de William Kentridge (‘Other Faces’, évocation grinçante et caustique des rapports de force entre Noirs et Blancs) en passant par la photo documentaire de David Goldblatt, 'My Joburg' prend une multitude de formes. Le parcours nous épargne un pamphlet sur la politique, les luttes raciales ou l’apartheid (mais évoque le racisme latent qui semble sourdre dans tous les aspects de la vie sud-africaine) ; il nous économise un entassement de clichés bien-pensants sur l'Afrique ; évite aussi de dresser un panorama purement esthétique axé sur l’art contemporain. Trouve le juste milieu. Johannesburg s’y révèle par bribes, comme une sorte de tableau impressionniste composé de petites touches d’art, d’histoire, de critique sociale et d'anthropologie.

> Horaires : du mercredi au dimanche de 11h à 19h, nocturne le jeudi jusqu’à 21h

Infos

Adresse
Prix
De 5,50 à 8 €
Publicité
Vous aimerez aussi
Vous aimerez aussi