Il y a des endroits bien moins sympathiques pour finir une journée de travail que le Cabaret Sauvage. Un espace protéiforme situé dans les tréfonds du parc de la Villette, les pieds dans le canal, et le chapiteau pointé vers les étoiles. Le lieu choisi par la compagnie circassienne Les 7 Doigts de la Main pour leur cabaret délirant, modestement intitulé ‘La Vie’.
Vous apprendrez ici que vous êtes non pas vivant mais bel et bien mort et que le cirque dans lequel vous croyiez être est en réalité une salle d’attente (en témoigne le petit ticket distribué à l’entrée et à garder précieusement). Bien installé dans cette succursale du purgatoire, vous verrez ainsi défiler une funambule fauchée par une quinte de toux, une hôtesse de l’air anglo-saxonne tout droit sortie de la série ‘Mad Men’, une schizophrène contorsionniste, un as du diabolo, un DJ barbu…
Vous n’aurez pas assez de vos deux yeux pour capter tout ce que les 7 Doigts de la Main proposent ce soir. En somme, un peu de tout ce qui fait du bon cirque et même un peu plus : du théâtre, de la danse, des calembours, de la musique… et du témoignage. D’ailleurs, on vous le dit tout de suite : spectateurs timides, allez vous cacher derrière un bout de velours rouge si vous ne voulez pas être extraits du public pour répondre sur scène aux avances du maître de cérémonie.
Au total, deux heures trente de spectacle menées tambour battant par un monsieur Loyal scandaleusement sexuel. Fièrement drapé de blanc, Sébastien Soldevila (et son très ensorcelant chuintement) sait être cabotin sans devenir exaspérant, grivois sans jamais tomber (totalement) dans la vulgarité.
Du tango torride jusqu’au combat de diabolo, cette « Vie » sait être plurielle sans perdre le fil. Un challenge de taille que la troupe québécoise relève avec brio, ne laissant jamais la performance éclipser l’histoire. Et quand parfois, faute de chance, le pied de l’acrobate dérape, c’est avec grâce et exaltation que le numéro continue. Ainsi va la vie.