Nous avions (presque) laissé Marina Hands dans le tourbillon sensuel de Lady Chatterley, la robe mouillée et le minois froissé. Nous la retrouvons sept ans plus tard dans un long fourreau émeraude sous les traits de la troublante Lucrèce Borgia. Nul doute à avoir, Lucie Berelowitsch signe ici une mise en scène efficace et brumeuse du texte de Victor Hugo, en plus d’avoir réussi son casting. Tendre et venimeuse, animale et solaire, Marina Hands incarne l’héroïne dans toute sa complexité. Parfois manipulatrice, souvent vengeresse, et de temps à autre à l’écoute de sa conscience. Belle et dangereuse à la fois, aveuglée par la colère et son amour pour Gennaro. Autour d’elle, les personnages et leurs interprètes ne manquent pas d’aplomb : le vil Gubetta (Thibault Lacroix flanqué d’une scie), le fougueux Jeppo (Julien Gosselin et sa voix de baryton) ou encore Don Alphonse, bouffon et pathétique (Dan Artus). Seul Gennaro, héros orphelin, joué par le très prometteur Nino Rocher (18 ans), manque parfois d’un peu de sel et de sueur. Ensemble, dans un décor fait d’échafaudages, d’un large portail en verre et d’une forêt d’arbres se fondant dans l’obscurité, ils livrent une version sombre et tragique de ‘Lucrèce Borgia’. Une fable à la croisée du drame shakespearien et du tragique racinien. Il suffira à Lucie Berelowitsch de quelques scènes collectives, d’une poignée de tirades exaltées mais orchestrées avec précision pour nous convaincre – si toutefois il fallait l’être – de la ferveur de ce personnage hors du commun et de la beauté désespérée de la pièce de Victor Hugo. Un spectacle intense et envoûtant, à l’image de son héroïne.
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