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Le métro, un musée comme les autres

Des expos souterraines, des partenariats entre musées et RATP, les contours des futures gares du Grand Paris confiés à des artistes : le métro est définitivement l’un des acteurs qui compte dans le paysage artistique parisien. Décryptage.

Zoé Terouinard
Écrit par
Zoé Terouinard
Journaliste, Time Out Paris
Photos métro RATP
© Xavier CHIBOUT_RATP
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Si vous passez régulièrement du côté de la station de métro Saint-Denis - Porte de Paris sur la ligne 13 ou Hôtel de Ville sur la ligne 1, vous avez sûrement déjà assisté, malgré vous, à une expo gratuite entre deux changements. Célébrant actuellement le photographe Juergen Teller à l’occasion de sa grande rétrospective au Grand Palais, 11 stations de métro semblent honorer l’adage “Si vous n’allez pas à la culture, c’est la culture qui viendra à vous” (ou un truc dans le genre).

Emprunté quotidiennement par plus de 11 millions d’usagers, le métro parisien est plus qu’un moyen de transport : c’est un morceau de patrimoine sur lequel la RATP et les institutions culturelles comptent bien capitaliser. Première étape pour faire descendre la culture dans les souterrains ? Relooker les stations. Outre les magnifiques entrées Art nouveau érigées par Hector Guimard dès le début du XXe siècle, c’est en 1968, à la demande d’André Malraux (alors ministre des Affaires culturelles) que la station Louvre-Rivoli (ligne 1) est transformée en “antichambre du musée du Louvre”. Elle expose ainsi directement sur ses quais des copies d'œuvres d'art en plâtre réalisées par l’atelier de moulage de la Réunion des musées nationaux.

Métro-boulot-expo

Un premier pas vers ce qui devient rapidement une politique culturelle à part entière, avec des œuvres pérennes qui constituent l’identité des stations, de La Voix lactée de Geneviève Cadieux à Saint-Augustin à la mosaïque de Claude Maréchal entre Cluny - La Sorbonne et Saint-Michel - Notre-Dame, en passant par l’habillage steampunk de la station Arts et Métiers par François Schuiten. De quoi donner des idées aux musées et autres centres d’art qui profitent, depuis 2013, du programme “La RATP invite”, lequel propose à des photographes (simultanément exposés en galeries ou dans des institutions) d’investir les couloirs du métro. 

© S. Dussauby
© S. Dussauby

Si le musée n’a pas de mal à descendre, le métro sait aussi prendre l’Escalator vers les plus grands lieux d’exposition de la capitale. La preuve avec l’exposition Métro ! Le Grand Paris en mouvement, actuellement visible à la Cité de l’Architecture, qui nous raconte l’histoire du moyen de transport souterrain – notamment au moyen d’un sas cinéma où sont projetés des films cultes se déroulant dans le métro – pour nous préparer à l’arrivée prochaine des nouvelles gares du Grand Paris. 

Les artistes à l'assaut du Grand Paris

Car si, depuis sa construction, le métro parisien flirte avec la culture, la relation sera définitivement consommée avec les 68 gares du Grand Paris Express, qui ouvriront entre 2025 et 2030. Avec un architecte par nouvel arrêt, dont certains seront confiés à de grands noms tels que Dominique Perrault ou Bjarke Ingels, les nouvelles gares feront la part belle à l’art. Chacun des maîtres d'œuvre a été associé à un artiste afin de compléter des gestes architecturaux qui se veulent remarquables, à l’image de la toiture ondulante de la gare de Clichy - Montfermeil, signée Benedetta Tagliabue en featuring avec JR qui a conçu une fresque sur la façade. Des duos imaginés par José-Manuel Gonçalvès, directeur du Centquatre, qui ont pour vocation de marquer les esprits, dans une sorte d’hommage aux bouches de métro emblématiques de Guimard.

© SGP - ADAGP - Prune Nourry
© SGP - ADAGP - Prune Nourry

Avec un budget artistique s’élevant à 60 millions d’euros (soit un peu plus de 800 000 euros par gare), le projet mise sur des stars de l’art contemporain, permettant aux voyageurs de découvrir au gré de leurs voyages des œuvres d’Eva Jospin (Hôpital Bicêtre), de Laurent Grasso (Châtillon - Montrouge), de Constance Guisset (Villejuif - Louis Aragon) ou de Daniel Buren (Sevran - Livry). “Ce que nous voulons, c’est rendre le voyage agréable”, assume Pierre-Emmanuel Becherand, responsable architecture, culture, design et création à la Société du Grand Paris. “La banlieue aussi a droit à l’art. Lorsque l’on installe des sculptures au centre de Paris dans la station Louvre-Rivoli, personne ne se pose de question.”

Les artistes doivent aussi s’adapter aux spécificités des lieux. “On ne crée pas pour le métro comme pour le Palais de Tokyo”, poursuit Pierre-Emmanuel Becherand. “Nous veillons à ce que les œuvres puissent être comprises sans explications. Beaucoup d’entre elles sont d’ailleurs liées au rapport au corps, au mouvement. Il faut que s’en dégage quelque chose d’universel. Nous avons aussi veillé à la diversité générationnelle, à la variété des formes (sculpture, street art, fresque, numérique…) ainsi qu’à la parité homme/femme.” Et tout ça au prix d’un pass Navigo.

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