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Le monde de l’art est en deuil. Tête de file du courant des Mythologies Personnelles, Christian Boltanski nous a quittés le 14 juillet, à l’âge de 76 ans. L’occasion de revenir sur le parcours d’un artiste obsédé par la mémoire et sa condition de mortel, dont le souvenir et les œuvres qu’il laisse derrière lui survivront sans aucun doute.
David Walsh, joueur et collectionneur d’art australien, avait parié que Boltanski mourrait en 2017, ce à quoi le plasticien avait répondu « Je ne peux pas mourir avant 2021, j’ai des engagements jusque-là ». La date a été respectée et les ultimes jours de la vie de l’artiste filmés, mettant en scène le compte à rebours de ses derniers instants de vie, que Walsh ne pourra exploiter qu’après le décès de Boltanski. « Cette pièce pose question : peut-on acheter la vie de quelqu’un ? David Walsh possède des milliers d’heures de moi, mais il a acheté ma mémoire, pas mon esprit. »
Comme si Boltanski préparait le terrain, depuis des années. Celui dont la naissance est marquée par l’Occupation et la Shoah laisse derrière lui un corpus monumental entre spiritualité, mémoire et humour, toujours. Artiste autodidacte, il marque le monde de l’art contemporain grâce à une pratique protéiforme comme le témoignent les expo Monumenta au Grand Palais en 2010 ou “Faire son temps” à Beaubourg en 2020, points d’orgue de ses 50 ans de carrière. Véritable poète, l’artiste qui partageait la vie d’Annette Messager, avait également compilé les battements de 75 000 cœurs de l’île japonaise de Teshima, avant que le sien ne s’arrête pour toujours. Un créateur de légende, un conteur d’histoire qui confiait à nos confrères des Echos en 2010 : « J'aime énormément la vie. Mais le malheur aujourd'hui, c'est qu'on veut nous faire croire que nous n'allons pas mourir ». Soyons en sûrs, son œuvre, elle, ne mourra jamais.