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« Je fais des pubs pour… gagner de l’argent ! » expliquait David Lynch lors d’une rencontre à la librairie Livraria Cultura de São Paulo en 2008. Comme quoi le réalisateur américain, disparu le 15 janvier 2025, savait aussi être limpide dans ses intentions ! Reste que dans la trentaine de spots réalisés durant sa carrière, David Lynch a toujours réussi à y instiller la folie et la vision qu'on trouve dans ses films. La preuve en cinq exemples (et un contre-exemple).
Georgia Coffee (1991)
Cette série de quatre spots pour le café japonais (en canette) Georgia reprend la quasi-totalité du casting de Twin Peaks et profite de la notoriété de Dale Cooper comme amateur de caféine pour dérouler une micro-histoire de fille disparue. Tout est parfait : le rythme, le kitsch assumé, la volonté de mettre du bizarre dans un film de 20 secondes. Un modèle de contenu sponsorisé à montrer dans les écoles !
The Wall – Adidas (1993)
Une plongée graphique (et les moyens techniques de l’époque !) sur le dépassement de soi d’un joggeur face au fameux mur, pour vendre la technologie tubulaire (?) d’Adidas. Au menu : flammes et éclairs en incrustation, endoscopie dans les valves cardiaques, musique stressante et final dans les nuages.
Parisienne Cigarettes (1998)
Après Godard et Kusturica, la marque de cigarettes suisse Parisienne convainc — contre une somme sans doute rondelette — David Lynch de tourner une pub. Le réal américain y ravive sa passion pour le « reverse motion » qui avait si bien fonctionné dans la chambre rouge de Twin Peaks. Le résultat est un film expérimental chelou et fascinant (sans l’ombre d’une cigarette à l’image).
PS2 de Sony (2000)
Parfois les clients ont la bonne idée de laisser une liberté artistique totale. Avec Sony, cela aboutit à ce film surréaliste et habité à mi-chemin entre la suite d’Eraserhead et le spot de prévention contre l’abus de psychotropes. Sur une musique indus anxiogène comme une roulette de dentiste, on croise un homme-canard, une tête volante, des gaz d’échappement… Une curiosité même dans le référentiel lynchien !
Lady Blue Shanghai de Dior (2010)
Pour ce court métrage de 16 minutes avec Marion Cotillard pour Dior, Lynch est scénariste, réalisateur et monteur. Rarissime dans le monde de la pub. Il reprend sa caméra numérique légère d’Inland Empire dans cette descente à Shanghai autour de la persistance de la mémoire (et d’un sac à main). Les fans retrouvent avec plaisir la rose bleue de Twin Peaks.
Le contre-exemple : Barilla (1993)
Quand vous sortez d’une mauvaise journée au taf, rappelez-vous que David Lynch aussi n’était pas toujours au top. La preuve ? Ce spot Barilla à la photo molle, au scénario inepte et à l’étrangeté jetée dans l’évier avec l’eau des pâtes. La présence de Depardieu, qui en fait des caisses, n’arrange rien.