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C’est un accord aussi inattendu et magistral que la première fois qu’on a mis une olive dans un Negroni : Alain Ducasse, le boss de faim de la gastronomie française, et Margot Lecarpentier, queen de la mixo et lauréate du prix Meilleur Bar Responsable par Bar World of Tomorrow et Time Out Paris, s’allient pour percher tout l’été le bar Combat au sommet du musée du Quai Branly ! Cette terrasse complètement waouh, où la tour Eiffel semble vous prendre dans ses bras, propose une offre de cocktails originaux en pairing avec une petite restauration de haute volée conçue par Alexandre Sempere, le chef du restaurant les Ombres. En exclu, Time Out vous sert une interview croisée (à la cuillère, pas au shaker) des protagonistes de la collab la plus terrassante de l’été.
Alain Ducasse, vous vous consacrez depuis vingt ans à accompagner les jeunes talents de la gastronomie. Comment avez-vous entendu parler de Margot Lecarpentier et de son bar, Combat ?
Alain Ducasse : Je ne cuisine plus depuis des années et je ne m’en cache pas ; au contraire, je suis très fier de la pépinière de talents que je cultive dans l’industrie qui est la mienne : je porte les jeunes gens doués qui excellent dans tout ce qui se mange et qui se boit. Dans le cas de Margot, c’est un ami qui m’a conseillé d’aller à Belleville, chez Combat, où une femme talentueuse réinvente la mixologie pour la démocratiser, la rendre moderne. Moi, je suis bien incapable d’être derrière un shaker, mais j’aime bien être devant un verre : je me tiens du bon côté du bar ! (Sourire.)
Margot Lecarpentier, que saviez-vous d’Alain Ducasse et de sa galaxie avant de le rencontrer ?
AD : Rien sans doute, sinon elle n’aurait pas accepté. (Rire.)
Margot Lecarpentier : Comme beaucoup de monde, j’avais l’image d’Alain Ducasse en homme politique de la gastronomie. Et puis je me suis documentée, j’ai lu sur lui, j’ai écouté des podcasts sur son parcours et même si, de prime abord, rien ne semble nous rapprocher, nous avons en fait pas mal de combats en commun : la naturalité de Monsieur Ducasse fait écho à ma lutte pour l’inclusivité et le sans alcool, car ne pas boire d’alcool ne doit pas être vu comme une frustration, de même que ce n’est pas une frustration de ne pas manger de viande. Nous sommes tous deux très attentifs à la dimension écoresponsable de ce que l’on mange et boit sans jamais oublier le plaisir : l’écologie n’est pas un obstacle, au contraire !
Comment a commencé cette collaboration aussi inattendue que réjouissante ?
ML : Un jour, Alain Ducasse a poussé la porte de Combat et m’a dit : “Margot, racontez-moi votre histoire avec des cocktails.” C'était un sacré défi ! Pour raconter cette histoire, j’ai commencé par mon cocktail fétiche à Combat, l’Impécâpre (tequila, gentiane, câpres, vermouth, noix, citron jaune), qui est caractéristique de ma patte : légèrement salin, amer, apéritif… avec un trait de jeu de mots ! (Sourire.)
Je ne veux pas faire la fan girl mais quand je me suis retrouvée nez à nez avec lui, chez moi, dans mon bar de quartier de la bouillonnante rue de Belleville, j’étais fière et contente : l’ouverture de mon bar il y a six ans était très inattendue, de même que l’arrivée d’AD un beau jour de février. Mais si j’ai baptisé mon enseigne Combat, c’est que je suis prête à relever des challenges comme celui-là !
AD : Je n’aime que ça : aller dans des univers que je ne connais pas, découvrir des lieux forts. C’est ma quête. Tout ce qui participe à mon plaisir gustatif m’intéresse.
Et vous vous intéressez au cocktail depuis longtemps ?
AD : Depuis des années ! Un jour, je me suis dit que je ne connaissais rien à l’univers du cocktail et j’ai fait ma culture mixologique en allant dans tous les bars du World's 50 Best pour saisir l’esprit. Pour moi, le lieu doit être en cohérence avec ce qu’on y sert, le contenant et le contenu doivent raconter une histoire harmonieuse, et c’est le cas à Combat. Dès les premiers testings avec Margot, j’ai très vite su qu’on allait arriver quelque part ensemble.
Comment avez-vous créé les cocktails ? Collectivement ?
AD : Ma consigne était claire : moins de sucre, plus d’acidité, plus d’amertume, plus d'astringence… En somme, moins de rondeur, plus d’aspérité. Sur cette base, la liberté de Margot était totale.
ML : Cette réduction maximale du sucre m’a poussée dans mes retranchements. Même si c’est aussi ma ligne chez Combat, impossible de se cacher derrière le fait qu’un cocktail est sucré par essence ; non, la recherche ne peut pas s’arrêter là, surtout quand on goûte avec le très exigeant Gérard Margeon (sommelier historique d’Alain Ducasse et goûteur au palais suprasensible, ndlr) !
Et ce qui a profondément marqué tout mon travail de création (car j’ai bossé comme une dingue !), c’est d’avoir visité toutes les manufactures d’Alain Ducasse : le café, les biscuits, les glaces… Ça a eu un impact décisif sur mon offre de cocktails. D’ailleurs, on retrouve les produits des manufactures dans mes créations : le cascara de café, le sorbet aux herbes, les écorces de chocolat… J’ai eu envie de m’inspirer de tous les savoir-faire de l’univers Ducasse.
Et vous voilà sur la terrasse du restaurant les Ombres, au sommet du musée du Quai Branly, un belvédère décoiffant où mater Paris à 360°. Que trouvera-t-on à la carte ?
AD : Le chef du restaurant, Alexandre Sempere, qui a travaillé avec Romain Meder, prépare pour le bar-terrasse une petite restauration de haut niveau, pensée en correspondance avec les cocktails de Margot, et vice versa.
ML : Sa charcuterie de la mer se marie bien avec l’Hidalgo (en hommage à la maire de Paris et ses pistes cyclables), qui est un daïquiri au mezcal parfumé à la feuille de figuier qui évoque le soyeux et l’aromatique d’une eau de coco. Ses artichauts frits à tremper dans un condiment ail-menthe font écho à l’Impécâpre. Ses fines tartines de sardine fumée vont super bien avec le Trou normand sur Seine, ce breuvage sentimental pour moi qui ai grandi en Normandie, revisité avec une boule de sorbet aux herbes de la manufacture AD, du genever, du mastiha, de l’oseille et du poivre…
AD : Ce cocktail est génial, on a l’impression de croquer dans un jardin d’herbes : c’est un cocktail à brouter ! On espère vraiment attirer le consommateur d’aujourd’hui, surinformé, pressé, curieux, zappeur, vers quelque chose de nouveau, d’unique. Lui faire saisir un moment d’évolution nouvelle de la gastronomie, de “ré-évolution” comme j’aime à dire.
La mixologie, c’est donc de la gastronomie liquide ?
AD : Je suis totalement d’accord avec ça.
ML : Je le crois aussi et même pour le sans alcool : le public est enfin mûr pour accepter le nolo (no/low alcohol, ndlr).
AD : Tant que la justesse du goût est là, je peux me passer d’alcool ! Par exemple, j’adore le Negroni, je trouve ça addictif, alors on en propose différentes versions : rouge ou blanc, avec ou sans alcool – on prépare même un Negroni granité au sorbet pamplemousse.
De toute façon, ce qu’on fait ici n’est comparable à rien d’autre. Ce n’est pas qu’on est les meilleurs, c’est qu’on est les seuls ! C’est exigeant, dans un endroit somptueux, dans le calme le plus absolu avec vue sur un Paris XXL, le tout en restant bien en deçà des prix des cocktails dans un palace. Je vous le dis : il n’y a pas deux endroits comme ça à Paris !
Cette collab commence maintenant et durera jusqu’en octobre. Chez Time Out, on fait shaker avec les doigts !
Menu pairing
Salé :
Croqu’œufs & sardine fumée : 10 €
Trou normand sur Seine : 24 €
Poulpe et volaille sur la braise, tum légèrement pimenté : 14 €
Halima - Halimasla : 24 €
Houmous de pois chiches, pomelo, sumac et citron noir d’Iran : 10 €
Eiffel sour : 24 €
Artichauts croustillants, condiment ail-menthe : 10 €
Impécâpre : 20 €
Blinis de pomme de terre fermentée, tartare d’algue, crème crue : 14 €
Atlas : 24 €
Charcuterie de la mer : 34 €
Hidalgo : 22 €
Sucré :
Foccacia au chocolat de la manufacture Alain Ducasse et noisette : 10 €
Esupuresso Martini : 26 €
Fraise ciflorette melba : 10 €
Sayuri : 24 €