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À l’occasion de l’exposition Disco, I’m Coming Out à la Philharmonie de Paris, où il est logiquement mis en vedette, nous avons rencontré Marc Cerrone, l’un des inventeurs du son disco. Après avoir été au cœur du mouvement dans les 70’s et de la cérémonie d’inauguration des JO en 2024, ce musicien continue, à 72 printemps, d’ambiancer le monde entier avec ses morceaux et analyse ce courant musical sans mâcher ses mots. Oui, Cerrone est resté Supernature !
Time Out : Vous avez prêté une de vos batteries, un de vos costumes à paillettes et vous allez faire un concert (complet) le 21 février à l’auditorium de la Philharmonie : on peut dire que vous êtes la vedette de l’expo Disco. Ça fait quoi d’être vu comme un parrain du disco ?
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Marc Cerrone : "Je ne me suis jamais vu comme ça ! Pour moi, j'ai toujours fait du Cerrone. D'ailleurs, quand je décide de faire Love in C Minor en 1976 ou Supernature l’année suivante, la musique de discothèque, donc littéralement le disco, n’existe pas encore. Dans les boîtes de nuit de l’époque, on écoutait les hits de la radio à la file. Au même moment, Nile Rodgers, Giorgio Moroder et moi, chacun dans un style différent, on se met à faire des morceaux de plus de dix minutes, avec une atmosphère particulière, une sorte de musique de film pour faire voyager les gens. Personnellement, j’y développe cette rythmique bien à moi, venue de mon premier groupe d’afro-funk, Kongas. Et ces morceaux collent parfaitement avec l’arrivée de ces discothèques où les gens viennent danser sur de la musique faite pour ça. Le Studio 54 était la première, la plus folle, la plus exubérante."
Time Out : L’envol du disco coïncide aussi avec la naissance de la culture club ?
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Marc Cerrone : "Exactement. C’était incroyable de voir cette foule mélangée, venue que pour danser au Studio 54, dans une ambiance sexy, festive, drôle. L’idée d’installer une discothèque dans un théâtre semblait dingue. La communauté gay s’y est engouffrée. C’était le premier lieu fait pour cette musique. Tout le monde se foutait de qui les regardait. Aujourd’hui, on retrouve cette même ambiance dans les festivals ou dans les warehouses. Je me souviens qu’à l’époque, on me disait qu’à Paris, le Palace était l’équivalent du Studio 54. Alors j’y suis allé et, quelle déception, ça n’avait rien à voir, il n’y avait que des gens qui venaient se regarder et s’y faire voir. Horrible !"
Time Out : Comment expliquez-vous ce retour en grâce du disco ?
Marc Cerrone : "Aujourd’hui, tout le monde reconnaît la valeur du style disco des origines. Mais à l’époque, quand les majors se sont aperçues de sa popularité, elles ont récupéré le mouvement et demandé à leurs artistes locaux de s’y mettre. En France, il y a eu Claude François, Dalida ou Sheila. Mais ce n’était pas ça, le disco… À tel point que les Américains, dès 79, se sont révoltés contre ce disco pop et ont brûlé des disques dans un stade ! Mais moi, je n'ai pas été entraîné là-dedans. Puis les samples ont commencé à arriver, la musique disco est devenue la house, la techno... La forme et les mélodies ont évolué, mais cela reste de la musique pour la danse."
Marc Cerrone : "Les DJ ne s’y sont pas trompés et ont échantillonné, entre autres, mes morceaux. Je les en remercie, c’est grâce à eux que mon son n’a pas vieilli ! J’avoue que le choix à l’unanimité de Supernature pour illustrer le passage de la flamme au pied de la tour Eiffel pour les JO a été un grand honneur pour moi !"