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Vert carrément plein pour We Love Green. Depuis sa création en 2010, le festival est devenu le labo en pleine nature d’une fête plus durable et responsable : modération des lumières pour ne pas déranger les hôtes des bois, toilettes sèches ou utilisation à bloc de matériaux recyclés… L’innovation de 2023 ? Le festival dit goodbye à la bidoche et bascule son offre de restauration en 100 % végétarien. Finito les viandes, on ne boulottera plus que champignons, tubercules et légumes verts entre deux concerts. Les volumes annoncés donnent le tournis : 130 000 plats sont attendus pour l’édition 2023, cuisinés par 53 restaurants pour 120 000 festivalier(e)s affamé(e)s !
L’appel à candidatures est ouvert jusqu’au 7 avril afin d’écrire cette nouvelle page de We Love Green. Les comptoirs disponibles dans le food court ne sont pas encore tous attribués mais la volonté est là. Et attention, ça ne rigole pas : tous les candidats seront audités par Ecotable, une entreprise qui mesure l’impact environnemental des restaurants ! Parmi ceux qu’on est sûr de retrouver du 2 au 4 juin dans le bois de Vincennes : Glory Kabe, Pantobaguette, le Réfectoire, Ernest… Le passage au vert n’a jamais empêché le coolinaire ! Ai Loan Dupuis, taulière de Sezono, un nouveau restaurant végétarien du 10e, est emballée : “Cette année, suite à l'annonce du 100 % végé, je vais répondre à l'appel d'offres ! Je trouve que c'est hyper courageux et fort comme choix, ça ne correspond clairement pas aux attentes des festivaliers donc c'est un vrai parti pris.”
Concurrence animale
Cette décision découle à la fois d’une demande de cohérence de la part des associations et partenaires du festival, et de la nécessité de faire sa part face à l’urgence climatique. Alors que l’élevage représente à lui seul 15 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, passer à une alimentation plus végé, ça paraît bête comme chou. Mais dans un pays encore bien empreint de la culture barbeuc et barbaque, faire basculer un festival bien implanté comme We Love Green en 100 % végé, c’est osé. “Jusqu’à présent, on avait quasi 50 % de restos 100 % végés. Mais on a remarqué que tant qu’il y avait des protéines animales, les clients les commandaient massivement. C’était clairement le poulet frit et les burgers qui marchaient le mieux”, détaille Thomas Grunberg, fondateur de l’agence Gaudina, chargée de la restauration du festival. Le 100 % végé permet d’éviter cette concurrence déloyale pour tenter de réduire de 70 % les émissions carbone du food court. À l’étranger, quelques festivals sans protéines animales existent déjà comme le festival de metal Obscene Extreme en Tchéquie, 100 % végétarien depuis 1999, ou le Shambala Festival au Royaume-Uni, dont le passage au végé en 2016 a permis une réduction drastique de 100 tonnes de C02 chaque année.
Rendre le veggie sexy
Si tous les restos avaient pour consigne de proposer une alternative végé, certain(e)s n’ont pas attendu l’édition 2023 pour mettre les plantes à toutes les sauces : c’est le cas de Glory Kabe, cheffe de file de la cuisine afro-végane et présente dans le food court de We Love Green depuis 2022 : “Aller vers des burgers carnés, c’est un automatisme, c’est plus rassurant. Avec un festival végétarien, on crée de nouvelles habitudes. Je trouve que c’est une belle avancée. On propose de la qualité, gustative et dans le choix des produits, il ne restait qu’à ajouter cette conscience végétarienne.”
Troquer frites molles et burgers luisant contre un coquin kebab de pleurotes et de rutilantes panisses à l’aïoli (le menu qu’aimerait proposer le resto Sezono pour l’édition 2023), c’est ce qu’on appelle rendre le veggie sexy ! L’ambition : faire en sorte que les festivaliers soient satisfaits et rassasiés sans se rendre compte que l’intégralité de l’offre ne contient pas un gramme de chair animale. “On veut casser des codes, le mot végétarien fait encore peur aujourd’hui, on l'assimile à des trucs crus et sans goût : alors qu’on peut faire du frit, du gras, du coulant avec du végé”, défend Thomas Grunberg.
Pousser la créativité en cuisine
Comme chez WLG, on n’aime pas la facilité, les substituts comme les steaks végétaux, les nuggets de seitan ou les fauxmages végans ne sont pas vus comme des solutions à privilégier car considérés comme trop transformés et trop industriels. L’idée est plutôt d’aller titiller la créativité des chef(fe)s invité(e)s et de les pousser à inventer de nouvelles recettes autour du végétal – qui resteront peut-être à la carte de leurs restos. Pour les aider, l’équipe du festival a mis au point un outil nommé “la pieuvre”, une carte heuristique où chaque tentacule représente une option pour cuisiner, accommoder et assaisonner légumes, champignons, légumineuses. “On va sûrement perdre quelques restaurateurs – dont les monomaniaques de chair animale – et faire des déçus, mais ça permet la réflexion et la remise en question”, explique Thomas Grunberg. En perdre quelques-uns, peut-être ; en gagner d’autres, assurément.
Reste à espérer pour l’impact écologique réel que la météo se montre clémente. En 2022, une grosse tempête avait contraint les organisateurs à suspendre une journée de festival, et des centaines de kilos de denrées déjà préparées par les restaurateurs avaient dû être jetées car impossibles à valoriser par les associations partenaires. Pourvu que cette année soit douce.