En 1872, Monet sort un peu du rouge. Il a vendu plusieurs toiles à Durand-Ruel, un collectionneur et ami, et a touché l’héritage de son père. Le peintre peut s’offrir un voyage en famille dans sa ville natale du Havre. Un matin de novembre, depuis la fenêtre de l’hôtel de l'Amirauté, surplombant le bassin de l'avant-port, il peint ce lever de soleil, rougeoyant comme une faible braise au milieu d’un ciel ardoise hivernal, et de fantomatiques silhouettes de bateaux.
Pour la première exposition de la « Société anonyme coopérative des artistes peintres, sculpteurs et graveurs » (qu’il a fondée avec des copains assez doués comme Degas, Cézanne ou Renoir), Monet présente cette toile, intitulée un peu platement Vue du Havre. Chargé de rédiger le catalogue, Edmond Renoir suggère de trouver un titre plus percutant. Ce sera Impression, soleil levant.
Cette toile, totalement à rebrousse-poil de l’académisme bourgeois de l’époque, hérisse les critiques, dont Louis Leroy du journal satirique Le Charivari. Dans son article, il ironise : « Je suis impressionné, il doit y avoir de l'impression là-dedans. »
Comme souvent, le terme se retrouve récupéré par ses cibles pour le détourner : les peintres se nomment dorénavant les impressionnistes, et la révolution picturale est lancée. Le collectionneur Ernest Hoschedé achète la toile 800 francs (environ 3 000 € de 2022) à la fin de l’exposition. Elle rejoindra le musée Marmottan en 1940, quatorze ans après la mort de Monet. Et souffle aujourd’hui ses 150 ans.
Sur les traces de Monet entre Le Havre et Paris
Les impressionnistes étaient des peintres du grand air, des ciels tourmentés et des lumières fugaces. La Normandie, la Seine et Paris, pourvoyeuses de paysages fantastiques, furent leur eldorado. Pour l’occasion, on vous a regroupé cinq spots impressionnistes pour la jouer comme le jeune Monet.
Pour découvrir le reste de notre dossier consacré au célèbre tableau de Claude Monet, ça se passe ici.