Baiser Hôtel ville doisneau
© Robert Doisneau'Le Baiser de l'Hôtel de Ville', Robert Doisneau
© Robert Doisneau

5 choses à savoir sur... ‘Le Baiser de l’Hôtel de ville’ de Robert Doisneau

Petits secret et anecdotes savoureuses sur l'un des plus beaux chefs-d'oeuvre du photographe...

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Quand on vous dit Doisneau, vous pensez immédiatement « photo de Paris », « cliché noir et blanc » ou encore « scènes de la vie quotidienne ». Pour cause : le photographe français Robert Doisneau a passé sa carrière à capturer la Ville Lumière d’après-guerre dans son plus simple et authentique appareil. Des milliers de portraits d’artisans, de bistrotiers, de gamins des rues ou d’amoureux se bécotant sur les faubourgs que l’artiste a immortalisés sur pellicule...

Le poète Prévert disait d’ailleurs de cet enjoliveur de l'ordinaire : « C’est toujours à l’imparfait de l’objectif qu’il conjugue le verbe photographier. » Bref, Doisneau était un virtuose du viseur qui avait fait de l’obturateur sa plume pour composer une ode à l’existence où se mêlent tendresse, nostalgie et ironie.

Ainsi, Robert Doisneau guette l’anecdote visuelle comme nous épions celles qui se cachent derrière ses chefs-d'œuvre. C'est donc en toute logique que l'arroseur se devait d'être arrosé, obligé de passer par le prisme de notre curiosité. Et, aujourd’hui, ce sont donc les petits secrets bien gardés de son œuvre la plus fameuse, Le Baiser de l’Hôtel de Ville, que nous allons vous dévoiler.

1. Vraie-fausse spontanéité

A la vue du Baiser de l’Hôtel de Ville – datant de 1950 –, on ne peut s’empêcher de sentir son petit cœur de guimauve fondre en se disant : « Qu’ils sont mignons ces deux tourtereaux pris sur le vif par Robert Doisneau. » Eh bien préparez les mouchoirs car un mythe va s’effondrer : ce baiser, bien que vrai, n’a en effet rien de spontané.

C’est une mise en scène parfaitement orchestrée par le photographe, avec la complicité d’un couple d’étudiants en théâtre rencontrés dans un café, afin de réaliser une commande pour le magazine Life. Les deux amants photographiés, qui se nomment Françoise Delbart et Jacques Carteaud, ont d’ailleurs été rétribués 500 francs pour prendre la pose. En somme, une adorable embrassade en forme de mascarade.

Toutefois, les badauds gravitant autour des deux personnages centraux dans un flou artistique sont, eux, de véritables anonymes qui ne savaient rien de la séance photo en cours. En témoigne le regard interrogateur, voire méfiant, de la jeune femme en arrière-plan.

2. Du noir et blanc par manque d’argent

On croit souvent que Robert Doisneau privilégiait le noir et blanc pour sa dimension esthétique et la puissance nostalgique de l’argentique. Là encore, on se fourvoyait quelque peu. Certes, l’absence de couleurs confère à ses clichés une incroyable profondeur qui a fait sa renommée et inspire, encore aujourd’hui, de nombreux photographes. Mais ce coup de génie « à l’ancienne » est né d’une contrainte technique des plus rudimentaires : le manque de moyens.

A l’époque où Robert Doisneau parcourait les ruelles parisiennes avec son petit Rolleiflex 6x6 – entre 1946 et 1987 environ –, les clichés couleur étaient plus chers et plus compliqués à développer. Qui plus est, il était difficile avec les pellicules couleur d’autrefois de faire de l’instantané en extérieur, par temps couvert ou au fond d’une impasse mal éclairée. Ou quand le succès doit tout à un budget serré. 

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3. Un record mondial…

Néanmoins, les soucis financiers de Robert Doisneau se sont largement résorbés à la fin de sa vie, notamment grâce à la commercialisation massive du (ou plutôt des) Baiser de l’Hôtel de Ville. En 1986, cette célèbre photographie a en effet été tirée, en format affiche, à 410 000 exemplaires. 

Un record mondial à la fin du XXe siècle qui contribua à en faire une œuvre culte.
 Mais cet exploit n’est (presque) rien comparé au cliché original qui, lui, a été attribué à un collectionneur suisse pour près de 185 000 €, en 2005.

4. ...Mais un cliché au cœur du scandale

Dans « art » il y a « argent » et, puisque la beauté suscite les passions, Le Baiser de l’Hôtel de Ville s’est retrouvé au cœur de nombreux contentieux. Le plus retentissant d’entre eux fut le procès, qui s’est tenu en 1992 – du vivant de l’artiste – entre Robert Doisneau et le couple Lavergne. Ces derniers revendiquaient être les amants de la photo et réclamaient ainsi 500 000 francs à l’auteur pour violation de vie privée.
C’est alors que Françoise Bornet, la modèle initiale, est sortie de l’ombre pour réfuter cette identité usurpée en exhibant le cliché original, numéroté et estampillé, que Robert Doisneau lui aurait donné après la séance photo. En profitant, par la même occasion, pour réclamer 100 000 francs de droit à l’image.

Les deux parties plaignantes ont finalement été déboutées par le tribunal mais, comme le déplorera amèrement Jacques Carteaud, le second sujet de la photo, cette « histoire de fric » entachera quelque peu l’éclat d’un magnifique cliché.

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5. Et les autres baisers alors ?

Le moins que l’on puisse dire, c’est que Robert Doisneau était un sacré romantique. Outre Le Baiser de l’Hôtel de Ville, le photographe a immortalisé bon nombre de bécots à travers plusieurs dizaines de clichés de baisers, bien moins connus. A tort ! Amoureux aux poireaux, Baiser du Pont-Neuf, Baiser Blottot ou encore Baiser de l’opéra sont autant de délicats instantanés prouvant, eux aussi, le talent de ce maître de la photographie.   

Mais pourquoi donc une telle obsession pour les jeunes gens amourachés ? Peut-être pour redonner du baume au cœur à la population française après la terrible Seconde Guerre mondiale. Ou bien pour faire oublier l’image de Paris occupée en démontrant au monde entier qu’elle était toujours la capitale de l’amour, qui sait ? Pour le coup, on cherche encore à élucider le mystère…

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