A croire que promouvoir la jeunesse, cela conserve… Le Salon de Montrouge offre aux talents qui n’auraient pas encore eu le loisir de pousser la porte d’une galerie en tant qu’exposants de faire leurs preuves face au public. Et ce pour la soixantaine et unième année consécutive ! Triés sur le volet par un jury de professionnels – conservateurs de musée, commissaires d’exposition, collectionneurs ou artistes –, ces soixante représentants de l’avant-garde artistique ont entre 20 et 45 ans. Touche-à-tout, pleins d’humour et aimant bousculer les codes classiques, ils font du Salon de Montrouge un « baromètre de l’art » démontrant que « le talent n’a pas élu domicile que dans la capitale », selon les termes de Jean-Loup Metton. Et le maire de Montrouge sait de quoi il parle puisqu’il est lui-même peintre et descend d’un famille d’artistes.
Au cœur du Beffroi, dans les 1 500 m2 de la salle Nicole Ginoux – ancienne maire de la ville qui, en 1976, décida de faire du salon un véritable tremplin pour la jeunesse –, les œuvres se répartissent selon cinq espaces. « Chez moi, chez toi, chez les autres » traite de la subjectivité, « La veille des formes » de la singularité, « Je t’aime moi non plus » de l’altérité. « Ironie de l’histoire » offre un regard critique sur le monde et de ses drames géopolitiques. Quant à la thématique « Raconte-moi la planète », elle donne la vision d’une génération sur l’environnement et le rapport humain/nature. Un parcours libre, sans limite physique, et des cartels disséminés au hasard : on ne sait souvent plus dans quelle aire on se trouve ni quelle œuvre on regarde. Mais ce n’est pas forcément grave puisque celles-ci sont sujettes à une multitude d’interprétations. Comme si elles refusaient instinctivement la moindre catégorisation !
De l’impertinence de Qi Zhuo, détournant des mains d’idoles chinoises en porcelaine en leur faisant adopter des signes modernes, à l’ironie de Yassine Boussaadoun et sa ‘Lampe à huile’ en papier, les artistes se montrent délicieusement facétieux. Ils aiment se jouer de nos perceptions en donnant à leurs travaux un caractère immersif commun. Le ‘Fragment’ de Rémi Amiot ou encore l’‘Arrêt sur image’ d’Anna Tomaszewski (suspension d’un bris de glace entre réalité et fiction) en sont d’ailleurs de bons exemples.
Interpeller nos consciences, plonger le spectateur dans un univers onirique et expérimenter de nouveaux médiums sont également des aspects récurrents du futur de la création contemporaine. Entre les ‘Obus’ de Maha Yammine, pâtés de sable faussement innocents, les dessins « à trous » d’Alex Roy, que l’imagination a pour mission de compléter, ou encore la pièce sonore d’Anne Le Troter, chorale de chuchotements aussi apaisante qu’inquiétante à écouter assis sur des sièges de métro, tous les genres se voient abordés. Photos, vidéos, installations poétiques ou incongrues… Dans ce fascinant univers, véritable patchwork artistique, on ne s’aperçoit pas que la pendule égrène ses heures. Et, même si toutes les œuvres ne nous ont pas livré leur secret – malgré des explications, on reste encore persuadé que la collection de t-shirts sales exposés par Julien Fargetton était simplement un bon moyen pour lui d’éviter de faire la lessive –, on s’enorgueillit de savoir que l’avenir a du potentiel. Artistiquement au moins.
A noter que le jeune public a aussi le droit à son heure de gloire durant des ateliers ludiques et pédagogiques. Tous les dimanches du mois de mai, de 16h à 17h, les petits artistes en herbe pourront s’initier à la performance, au détournement d’images, aux jeux sonores… Pendant que les parents, eux, profiteront d’une visite guidée gratuite. Seules les projections et les performances organisées en marge du Salon de Montrouge seront payantes. Plus d’informations sur le site.