Pour qui ? Tous ceux qui sont fatigués des clichés sur le Moyen-Orient
Voir quoi ? Une image de Beyrouth vraie et saisissante
Combien de temps faut-il pour qu’une expression change de sens ? « C’est Beyrouth », c’est aussi le nom de l’exposition présentée dans les deux espaces de l’Institut des cultures d’islam jusqu’au 28 juillet. A travers le regard de 16 artistes, le centre culturel nous offre une vision in situ du quotidien des habitants de Beyrouth, brisant au passage bien des clichés.
Parce que, finalement, Beyrouth, c’est quoi ? Entre multiconfessionnalisme, communautés LGBT+ illégales, soirées clandestines, soleil méditerranéen et réflexions politiques, la capitale libanaise a bien plus à montrer que les images dramatiques dont nous ont bombardés les médias ces quarante dernières années.
L’expo, orchestrée par l’écrivain et photographe Sabyl Ghoussoub, s’ouvre sur un projet vidéo de Fouad Elkoury qui, loin du photojournalisme, propose sa propre vision de la guerre ayant frappé le pays en 2006. L’occasion également de questionner la place du corps dans une contrée éminemment pudique. Des corps tantôt tannés par le soleil du Levant dans l’objectif de Vianney Le Caer, tantôt couverts de tatouages chiites dans la série saisissante d’Hassan Ammar, ou même voilés lors de l’iftar, le repas du soir pendant le ramadan. Des corps multiples et singuliers, à l’image du pays.
Parce que le Liban, c’est surtout un melting-pot culturel exceptionnel : 18 religions qui cohabitent, un tiers de sa population issue de l’immigration et un mélange de français, d’arabe, de turc ou encore d’arménien dans les conversations. La marginalité et la clandestinité guident la seconde partie du parcours, de l’enfer vécu par les réfugiés syriens et palestiniens aux jours de repos des domestiques asiatiques en passant par la culture queer réprimandée. Morcelée comme le territoire, l’expo se poursuit dans le hammam où des vidéos narrant le périple des multiples migrants sont présentées et se conclut à l’extérieur avec un triptyque de Randa Mirza dénonçant la disparition du patrimoine architectural de Beyrouth au profit de projets immobiliers. L’occasion de découvrir toutes les facettes de celle qu’on appelle « la ville qui ne meurt jamais ».