Quand un peintre de l’envergure de Chéri Samba investit un musée aussi sacralisé que celui de Maillol, c’est forcément un événement ! L’ancien atelier du sculpteur parisien se pare de couleurs pop, à l’image des 50 toiles exposées provenant toutes de la collection Jean Pigozzi, amoureux de la première heure du peintre congolais. A travers un parcours thématique, on découvre des œuvres grand format qui font la part belle à la figure noire, encore trop marginalisée dans le grand corpus de l’histoire de l’art.
Muralisme, peinture contemporaine, paillettes kitsch, pamphlets politiques… Ce qu’il nomme lui-même la “griffe sambadienne” est à la fois humoristique et politique, belle et rebelle. La déambulation commence tranquillement, comme une rencontre inattendue où l’on s’échange des bonjours polis, et l’on découvre une série d’autoportraits débutée dans les années 1970. Plus grinçante, la deuxième partie, axée sur les femmes, dérange par les propos misogynes du créateur (on parle de “deuxième bureau” pour évoquer la tromperie, nécessaire à l’homme, quand Toutes les nanas sont pareilles de 1999 offre une magnifique illustration du sexisme banalisé), ainsi que par le manque de regard critique de l’institution qui parle de “caractère provocateur”, “d’humour” et de “manière cocasse”. On a comme la sensation d’être à un dîner de famille avec notre oncle réac expliquant qu’on peut plus rien dire.
Heureusement, les salles suivantes, plus politiques, nous décrispent. Chéri Samba aborde l’histoire de l’Afrique, du Congo et de Kinshasa en évoquant aussi bien les forces que les faiblesses de ces territoires, avant d’élargir sa critique au monde. Le Monde vomissant dénonce ainsi sans détour la responsabilité américaine dans la Guerre du Golfe. L’exposition se conclut sur la partie la plus intéressante : une histoire de l’art revue et corrigée, où Picasso devient un homme noir placé au même niveau que Samba dans le triptyque Quel avenir pour notre art ?, célébrant les artistes classiques africains oubliés des bouquins d’art.