Il court, il court, le fil rouge dans les rues de Saint-Denis. Tissé par l'artiste colombienne Julia Maria Lopez Mesa et ses amies du 6B (Alexandra Arango, Valentina Canseco, Laure Crubilé, etc.), il déroule une balade à travers la Cité des rois, aux abords du Stade de France.
Suivant la station où l'on débouche, l'histoire racontée n'est pas la même : sortez du RER D, vous passerez en premier sous un auvent de wax (tissus africains imprimés de motifs passablement psychédéliques) avant de vous engouffrer dans un tunnel cachant dans les entrailles de la chaussée son empreinte bigarrée. A l'inverse, si vous arrivez par le RER B, vous devrez passer sous terre avant d'émerger sur l’avenue François Mitterrand, sous une haie d'érables aux branches tendues de guirlandes bien particulières.
Deux œuvres distinctes dans leur médium comme leur installation qui, pourtant, se répondent inlassablement. Prenant au passage, dans leur dialogue artistique de presque un kilomètre, les promeneurs surpris.
Fil conducteur
Ce récit, quel est-il ? Celui de la diversité, des couleurs qui se mélangent magnifiquement pour faire naître un tissu (social) fascinant. Bref, une fresque urbaine comme une jolie allégorie de la ville multiculturelle où elle s'est implantée depuis le 5 juillet.
Ainsi, ce n'est pas par hasard que les murs du souterrain, gardés par un azur constellé, se parent de pointillés et de carrés chamarrés. Regardés dans leur ensemble et non plus séparément, ces éléments constituent en effet un atelier de couture où des lambeaux d’étoffes s'envolent sur les parois autrefois sales du boyau. Les ciseaux à l'entrée découpent, en suivant les lignes, des chutes de wax. Une main leste nous guide, un doigt nous montre la sortie et des étoiles filantes surveillent notre traversée. On se croirait même enveloppé dans ce textile immatériel, marchant vers l'allée finale comme un funambule sur son fil conducteur rouge.
Amusante expérience, donc, que ce cheminement suivant, non pas le fil d’Ariane mais de Maria. Toutefois, au-delà de son aspect ludico-esthétique, Corpus Wax offre surtout une réflexion sur le métissage du monde : n'est-ce pas plus beau lorsque l'œuvre est polychrome ? Nous, on a fait notre choix : c'est le wax qu'on préfère !