A partir du 11 mai, Daniel Buren investit le « navire » de la Fondation Louis Vuitton. Un bâtiment conçu par son ami de longue date, Frank Gehry, que l’artiste français avait l’intention de transformer en « outil visuel ». Depuis que l’on savait cela, on avait hâte de voir ce que cette association art contemporain/architecture moderne pouvait donner. Et bien, sans grande surprise, c’est très beau. Mais c’est également très accessoire, au sens premier du terme.
L’alternance de bandes colorées et de vitres transparentes, auxquelles viennent s’ajouter des panneaux hachurés de lignes blanches (perpendiculaires au sol, attention !), apporte un supplément de légèreté à une construction déjà aérienne dans sa conception. Et lorsque le soleil veut bien illuminer la structure, celles-ci projettent un camaïeu d’ombres vivement translucides sur les terrasses. Animant, au passage, les passages à moitié couverts de halos bigarrés qui changent au fil des heures et de la luminosité.
Les voiles, elles, semblent retomber sur les visiteurs telles des vagues bariolées, les enveloppant de lueurs spectrales. Se chevauchant à distance, elles laissent entrevoir, par les espaces qui les séparent, un océan de verdure nommé bois de Boulogne. On se sent donc à la fois prisonnier de cette carapace de verres multicolores – qui exhibe son ossature sans pudeur – tout en ayant l’impression de déambuler au-dehors. Pour sûr, il est terriblement agréable de voguer ainsi entre deux rives et de se promener, porté par le jeu chromatique de Daniel Buren. De même qu’on admire l’œuvre, dynamique et modulable. Mais, à vrai dire, elle s’explore plus qu’elle ne s’expérimente.
Alors que l’art a la vertu de pousser son spectateur à s’interroger – qu’on aime ou non les colonnes du Buren au Palais-Royal, elles ont le mérite de poser la question du contraste entre classicisme et modernité – ‘L’Observatoire de la lumière’ in situ de Daniel Buren semble avoir une visée exclusivement ornementale. La seule réflexion qu’elle suscite est l’action de refléter. Comme, si l’âge aidant, l’artiste subversif avait laissé la place à un décorateur de goût. Certes, c’est harmonieux, séduisant et même envoûtant mais est-ce vraiment de l’art ?
Peut-être, qu'au fond, l’œuvre a pour but de relancer cet éternel débat. Auquel cas l'ambition serait alors lumineuse !