Lorsqu’on pénètre en ce moment dans la SLOW Galerie, on a l’impression de mieux respirer. Est-ce à cause des plantes qui grouillent sur les murs pour rappeler la jungle des œuvres de Lucille Clerc ? Ou parce que ces mêmes œuvres, après nous avoir coupé le souffle et laissé en apnée devant leur finesse d’exécution, nous obligent à reprendre une grande bouffée d’air ? Qu’importe ! De toute façon, inutile d’analyser quoi que ce soit : notre esprit s’est déjà perdu dans la serre abstraite et onirique des tableaux de la jeune illustratrice.
Quand botanique rime avec magique
Entre végétaux et bâtiments art déco, accumulation de motifs organiques et planches entomologiques, notre interprétation tente de se frayer un chemin. Avant de battre en retraite et de s’abandonner à délicatesse des sérigraphies exposées. Les perspectives déconstruites, presqu’en trompe-l’œil, ne sont en effet pas là pour rendre compte de la réalité des monuments londoniens qui inspirent tant cette fille d’architecte. Au contraire, c’est un monde rêvé, magnifié, où la nature a repris ses droits que nous conte Lucille. A l’image du Napkin, qui se retrouve enlacé par un arbre, ou du Barbican Center, représenté à la façon d’une estampe japonaise. Pourtant, ces compositions, qui feraient de parfaites illustrations pour un roman de Robert Kipling, regorgent de détails réalistes, naturalistes. Offrant ainsi à chaque nouveau regard une foultitude d’ornements inédits et de surprises visuelles. Là un singe caché dans les fourrés ; là un canidé sortant, avec dérision, d’une gueule-de-loup en fleur. Jardin secret ? Cabinet de curiosités mouvant ? Tout ce dont nous sommes sûr est qu’on ne se lasse pas de l’admirer !
Toutefois, pour sa première exposition parisienne, Lucille Clerc ne se contente pas d’accrocher ses gravures – au demeurant sublimes et dont les traits de crayon apparents comme les vibrations de couleurs donnent un côté vintage, hors du temps. La talentueuse jeune femme présente également, sous cadre, des œuvres aux allures de livres pop-up ou de petits théâtres victoriens dans lesquels les plans se chevauchent sans jamais se toucher pour mieux nous happer. Et, plus impressionnant encore, une fresque animée est projetée sur l’un des murs de la galerie, telle une clairière prenant merveilleusement vie. Pas de doute : une grande artiste a éclos sous nos yeux ébahis.