Terrasser l'horizon. Le titre, ambigu, contient déjà tout le rapport de force entre l'homme et la nature. Un combat âpre et infini, qui pose immédiatement la question du paradoxe de notre civilisation, disposée à exploiter sans limite une planète aux richesses pourtant limitées. Au fil d'une dizaine de propositions mêlant sculpture, photographie et constructions sonores, Guillaume Krick et Benjamin Thomas questionnent nos relations avec l'environnement, l'écologie ou l'aménagement urbain. Des questions certes dans l'air du temps, mais qui, habilement traitées, s'avèrent d'une grande profondeur.
Il faut dire que Krick le Canadien et Thomas le Français savent construire des machines fascinantes pour justement évoquer la surexploitation systématique. De l'excavatrice chromée qui ne brasse plus que de l'air, annonçant la fin prochaine de nos ressources, à ce ballet mécanique qui voit des petits immeubles en verre disparaître sous terre et réapparaître indéfiniment pour symboliser le cycle perpétuel de construction et de destruction de nos villes, la technologie se met ici au service du poétique. La plus belle illustration en est cette partition musicale faite de frottements et de grincements, aux sonorités parfois étrangement humaines, qui fait réfléchir sur l'obsolescence programmée de toutes ces machines-outils.
Autre œuvre remarquable, cet ensemble de photographies de banlieues nord-américaines, présentées dans des cubes lumineux de béton. Chaque image est divisée en trois parties horizontales : un ciel menaçant, un ensemble architectural froid et moderne, et un sol retouché, qui copie-colle à l'infini les motifs du ciel. Entre jeu vidéo alarmant et image SF crépusculaire, le procédé met en valeur la monotonie des bâtiments, et joue sur l'idée de domestication de la nature. Chez Guillaume Krick et Benjamin Thomas, terrasser l'horizon ne fait que le rendre encore plus inquiétant.
Time Out dit
Infos
Discover Time Out original video