Chaud devant ! Nouvel arrivage tout droit venu d’Amérique, direction Orsay. Et gaffe au déballage - mains de velours exigées, puisqu’il ne s’agit de rien de moins que d’une vingtaine d’œuvres réalisées par James Abbott McNeill Whistler (appelez-le juste « Whistler »). Des pièces du peintre et graveur américain du XIXe siècle qui étaient, depuis plus d’un siècle, jalousement conservées par la Frick Collection (New York).
Coup de pot - pour nous -, à l’occasion de sa fermeture temporaire, le prestigieux établissement a autorisé le transfert d’une partie de ses collections. Bilan à l’arrivée : une dizaine d’eaux-fortes composées à Venise dont les yeux aguerris reconnaîtront le canal, la lagune et les porches de palatiaux. Ailleurs, c’est à la Tamise ou au port de Valparaiso (Chili) que Whistler offre consistance, à travers deux paysages mélancoliques qui laissent deviner l’influence de l’estampe japonaise, et préfigurent l’impressionnisme.
Lorgnant du côté des maîtres flamands du XVIIe siècle ainsi que de Velásquez, Fantin-Latour et surtout Courbet, dont il fût l’élève et l’ami, Mister Whistler est aussi l’auteur de portraits à l’austérité magnétique. Cinq sont exposés à Orsay, tous sont de vraies pépites. Il y a l’attendrissante figure de ce vieillard à la pipe, placée à côté de celle, plus bouleversante, de la mère du peintre représentée dans son atelier, le regard lointain. Songe-t-elle au mari qu’elle a perdu ? Allez savoir…
Aussi et surtout, il y a cette saisissante triade de portraits en pied. De grands formats à la palette réduite (très sombre, ou très crème) harmonieusement mis en scène. Les teintes des toiles dialoguent, la figure et le port altier des personnages aussi. À elle seule, cette composition d’ensemble vaut le coup d’œil du côté de « Whistler, chefs-d’œuvre de la Frick Collection », qui - il faut le souligner - tient plus du nouvel accrochage que de l’exposition temporaire, toutes les œuvres étant réunies dans une unique salle. Vous êtes prévenus !