Après des dernières expos parfois presque austères, le Palais de Tokyo débute une nouvelle saison bien plus solaire. Qu’on soit clairs : en 2025, on fait la fête, même au musée. Mais attention, quand les artistes s’emparent du sujet, elle se doit évidemment d'être revendicatrice et politique. Baptisée Joie Collective – Apprendre à flamboyer !, la nouvelle exposition du spot du 16ᵉ s’intéresse à la culture populaire du rassemblement et à la joie comme moyen de résistance. Et si le meilleur moyen d’embêter les méchants, c’était de le faire dans le kif ? “And with joy we move”. Accueillante, la banderole violette d’Attandi Trawalley résonne presque comme un manifeste : sur ce plateau ouvert curaté par Amandine Nana, on envoie tout valser, mais avec le sourire, s'il vous plaît.
Même la monstration muséale classique est complètement déconstruite. Ici, l’art se fond complètement à la place publique et permet la constitution d’un microcosme aussi gai qu’engagé. D’ailleurs, les œuvres n’attendent pas passivement que l’on vienne les regarder, mais nous invitent carrément à interagir avec elles. À les faire vivre. On s’adonne alors à une partie d’échecs dans une installation de Pris Roos inspirée de la place de la République, on tâte le baby-foot de Bocar Niang, ou on participe à une broderie antiraciste participative signée Cindy Bannani. Autour des œuvres textiles de Maty Biayenda ou enfantines de Thomas Hirschhorn, des bouquins tels que Dancing in the Streets – A History of Collective Joy de Barbara Ehrenreich (qui a d’ailleurs inspiré l’expo) ou Manuel rabat-joie féministe de Sara Ahmed sont laissés à disposition, pour que l’on puisse prendre le temps de s’imprégner de la dimension politique et sociale d’un tel événement.
Conçue comme une agora publique plus que comme une succession d'œuvres classiques, l’exposition se veut être l’endroit pile où les luttes convergent. Qu’elles soient décoloniales, féministes ou queer. Car la joie n’empêche pas le combat. “On est heureux quand on manifeste”, indique d’ailleurs une photo monumentale d’Endre Tót. Et après avoir visité cet espace haut en couleurs et riche en arc-en-ciel, on ne pourrait pas être plus d’accord.