C’est la suite logique du Lasco Project, l’immense galerie souterraine de street art du Palais de Tokyo qui avait secoué le monde de l’art dès 2012. Onze piges plus tard, le commissaire Hugo Vitrani réitère et invite les visiteurs du PalTok à réfléchir sur la place du graffiti dans l’histoire de l’art. Et pour ça, plus question de se planquer au sous-sol : c’est à l’étage d’honneur que ça se passe.
Visiter une expo sur le graffiti sans vraiment voir de graffitis peut sembler déceptif. Pourtant, grâce à des dialogues surprenants entre les artistes et des relectures féministes ou engagées des travaux de grands blazes de la discipline, Hugo Vitrani signe une expo qui fera date. Les performances de l’activiste autrichienne Vali Export sont mises en lien avec les photographies en noir et blanc des graffeurs de Martha Cooper ; Miriam Cahn revient sur les cimaises pour le plus grand bonheur de l’extrême droite ; et des noms comme Rammellzee ou Dado s’expriment aux côtés de Brassaï, Tania Mouraud ou Jenny Holzer.
Dans une ambiance de joyeux bordel à la scénographie dépouillée (et recyclée, bravo le Palais de Tokyo), l’exposition nous pousse enfin à réfléchir sur le mouvement avec la même ambition mise depuis des années dans l’art conceptuel. A l’heure où un métro sur deux est estampillé “en cours de nettoyage”, quel bonheur de voir ceux considérés comme des vandales s’inscrire dans une grande histoire d’actions illicites, de résistance et de revendication. Il aura fallu attendre 2023 pour ça.