La Grande Odalisque
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Nos 6 œuvres préférées à voir au Musée du Louvre

Vous cherchez le meilleur des collections permanentes du Louvre ? Voici notre short list !

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Si le Louvre est le plus vaste musée du monde, il est aussi le plus fréquenté : presque 10 millions de visiteurs chaque année ! Il est donc devenu de plus en plus compliqué de bourlinguer dans le musée sans se taper une horde de perches à selfie et une ambiance collé-serré façon heure de pointe sur la ligne 13. Un conseil : si vous arrivez à pénétrer dans ce temple de l’art, foncez directement vers les incontournables, toujours fidèles au poste, qui s'exposent du matin au soir. Dans ce dossier regroupant nos œuvres préférées, nous n'avons croisé ni La Joconde, ni La Victoire de Samothrace, dont il nous paraissait presque superflu de souligner l'écrasante célébrité, mais d’autres œuvres qu’on aime tout particulièrement. Et puis l'exercice l'ordonnait : il a fallu faire des choix, guidés par la curiosité qui nous a parfois poussés à aller chercher l'inattendu, l'improbable, l'oublié. Sans plus attendre, découvrez nos 6 œuvres préférées à voir au Musée du Louvre.

Nos 6 œuvres préférées au Louvre

Tête d'idole aux bras croisés, Kéros, 2700-2300 av. J.-C.

Nez triangulaire. Marbre poli à outrance. Formes géométriques simplifiées à l'extrême. Un portrait signé Brancusi ? C'est à s'y méprendre, mais non, raté. Malgré son épure et ses traits stylisés, cette statue aux airs de création d'art moderne nous vient en fait de la Grèce antique. Conçue entre 2700 et 2300 avant Jésus Christ, elle surplombait à l'origine un corps de femme de près de 1,50 m de haut et revêtait sans doute des touches de peinture indiquant ses yeux et sa bouche. Aujourd'hui, seules les légères saillies des oreilles et du nez, subtilement taillées dans la pierre, énoncent la structure du visage. Parfaitement conservée, cette tête issue de l'île de Kéros reste l'un des témoignages les plus probants des idoles qui fleurissaient alors dans l'archipel des Cyclades.

Le Radeau de La Méduse, Théodore Géricault, 1819

En 1816, la fière Méduse, frégate française partie coloniser le Sénégal, s'échoue lamentablement sur un banc de sable. Comme les chaloupes sont trop peu nombreuses, 150 hommes doivent construire un radeau pour tenter de rejoindre la terre ferme. S'ensuivent treize jours de cauchemar où les survivants, rendus fous par la soif et la faim, s'entre-tuent et se livrent à des actes de cannibalisme. Ils ne seront que dix à en réchapper.

Pendant trois ans, Théodore Géricault se documente sur le sujet, tentant de concilier l'art et le réel. Il interroge les rescapés, fabrique une maquette de la scène, va jusqu'à étudier des cadavres dans son atelier, avant de présenter au Salon de 1819 une gigantesque toile de 5 mètres sur 7, dont la noirceur fascine et scandalise. Aujourd'hui considéré comme l'un des chefs-d'œuvre de la peinture du XIXe siècle, Le Radeau de La Méduse, dont la légendaire composition pyramidale et la force des clairs-obscurs ont fait la renommée, est devenu l'incarnation du romantisme. Métaphore de la solitude humaine ou de l'espoir, le tableau fut aussi interprété, à l'époque, comme une critique de l'esclavage (un homme noir se tenant au sommet de la pyramide des corps, telle une figure de proue), voire comme une charge contre le régime en place. Finalement, grâce à Géricault, ce qui aurait dû rester comme l'un des épisodes les plus sinistres de la marine française devint une œuvre hors du commun.

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La Grande Odalisque, Jean-Auguste-Dominique Ingres, 1814

Parfois, en art, la subversion ne tient pas à grand-chose. Trois petites vertèbres peuvent suffire à remettre en cause l'histoire et les conventions. Trois vertèbres qu'Ingres ajoute au dos de sa demoiselle de harem, dans un mépris total de l'anatomie et de l'enseignement de son maître, Jacques-Louis David. Trois vertèbres comme un manifeste : n'en déplaise aux critiques et aux gardiens du temple qui le dénoncent alors violemment, Ingres montre ici à quel point l'art n'est pas soumis à un quelconque réalisme, le peintre pouvant parfois sacrifier la vraisemblance au profit de la beauté.

Pourquoi l'odalisque (qui, en turc, signifie « la femme du harem ») est-elle si belle ? Parce qu'elle n'existe pas. A une peinture fidèle à son modèle, le plus célèbre des violonistes préfère, pour répondre à une commande de la reine de Naples Caroline Bonaparte, basculer dans un onirisme ouaté. Dans un Orient fantasmé, il reprend le motif du nu de dos (notamment éprouvé par Vélazquez dans la Vénus à son miroir). Le contraste entre la chair lumineuse et l'ombre de l'arrière-plan souligne les courbes soyeuses du corps féminin, tandis que l'extraordinaire réalisme des tissus ou des plumes de paon met en valeur cette beauté à la pose inconfortable, dont l'irréelle sensualité trône aujourd'hui au Louvre.

Les Trois Grâces, Lucas Cranach l'Ancien, 1531

Ce n'est qu'en mars 2011 que Les Trois Grâces de Lucas Cranach ont fait leur entrée au Louvre. Conservé par la même famille depuis le XIXe siècle, le tableau a pu être acheté par le musée pour 4 millions d'euros grâce, en bonne partie, à des dons de particuliers. En quelques jours seulement, plus de 7 000 personnes ont répondu à l'appel pour fournir le million qui manquait et faire de cette peinture réalisée sur un petit panneau de bois l'un des joyaux du Louvre, aux côtés de La Joconde et de La Victoire de Samothrace. En parfait état de conservation, ces trois nus féminins renvoient aux figures mythologiques personnifiant l'abondance, la splendeur et l'allégresse, qui inspirèrent aussi Raphaël, Rubens, Boucher, Botticelli et bien d'autres.

Cranach l'Ancien en donne une version très personnelle, d'une ironie surprenante et extrêmement moderne. Loin des courbes épanouies qui les caractérisent habituellement, les trois Grâces affichent ici des formes androgynes et affectent des poses étranges. Celle qui nous tourne le dos, la colonne penchée, le cou déformé, les oreilles pendantes, semble même étonnamment disgracieuse, tandis que sa voisine garde le petit doigt en l'air, moqueuse. Au carrefour du réalisme des peintres du Nord et de la volupté des Italiens, Cranach signe l'un des chefs-d'œuvre de la Renaissance allemande, servi par un savoir-faire d'une finesse stupéfiante, à l'image du voile dentelé et transparent qui recouvre les trois personnages.

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Le Scribe accroupi, Egypte, 4e ou 5e dynastie, 2600-2350 av. J.-C.

Qui est le scribe accroupi ? Mystère. La statue, découverte en 1850, a beau figurer parmi les chefs-d'œuvre les plus célèbres du Louvre, l'identité de son modèle reste à ce jour inconnue. Il y a toutefois fort à parier qu'il ne s'agissait pas d'un quelconque scribouillard, destiné à compter les moutons des bergers de l'Egypte antique (dont il provient) ou à griffonner des poèmes mièvres pour le premier venu. Son traitement complexe et raffiné suggère que cet homme assis en tailleur, la peau ocre rouge, le regard incroyablement perçant, était un personnage éminent, probablement rattaché à l'élite égyptienne. Peut-être même s'agissait-il d'un fils de pharaon représenté en fonctionnaire studieux – un papyrus légèrement déroulé dans une main, un outil d'écriture dans l'autre (sans doute un roseau, aujourd'hui disparu).

Dos droit, mains délicates, yeux vibrants en cristal de roche, incrustés dans un visage aux pommettes saillantes… Avec ses couleurs vives et son réalisme minutieux (l'artiste a même pris la peine de souligner les tétons à l'aide de deux chevilles en bois et de modeler un léger bourrelet au-dessus du pagne), cette sculpture en calcaire remarquablement bien conservée reste un des vestiges les plus extraordinaires de l'art égyptien.

La Vierge à l'Enfant avec sainte Anne, Léonard de Vinci, c. 1503-1519

Eh bien non, on ne vous parlera définitivement pas de La Joconde dans cette sélection des œuvres incontournables du Louvre. Non pas que la signorina au sourire ambigu ait soudainement perdu la place de choix qu'elle occupe depuis des lustres. Mais, au contraire, parce que l'attention démesurée que les visiteurs du Louvre portent aux beaux yeux de Mona aurait tendance à occulter d'autres peintures de Léonard de Vinci présentes dans les collections, et pourtant tout aussi extraordinaires.

A sa mort en 1519, le maître florentin laisse notamment derrière lui un tableau inachevé, scène biblique à la composition ambitieuse. Taraudé par sa vision, il passe les vingt dernières années de sa vie à perfectionner cette Vierge à l'Enfant avec sainte Anne, faisant longuement mariner des recherches formelles, qu'il épice de croquis et d'études (en 2012, le Louvre consacrait d'ailleurs une exposition au processus créatif et aux documents témoignant de l'évolution de ce minutieux chantier). En résulte une construction très complexe, à la charpente pyramidale, dans laquelle on voit l'Enfant Jésus en compagnie de maman (Marie, à gauche) et de mamie (Anne, au centre) : trois générations grandeur nature de la sainte Famille, entourées d'un paysage aux accents fantastiques, caractéristique de l'art de Léonard de Vinci.

Dynamiques, les corps se croisent dans un même élan : la Vierge tend les bras vers son fils qui, lui, tend les bras vers l'agneau, incarnation du sacrifice christique à venir – comme s'il s'agissait de retarder, quelques instants au moins, la destinée qui précipitera Jésus vers le gouffre symbolique représenté au premier plan. Variation magnétique et surprenante sur le thème de la Vierge à l'Enfant, l’œuvre a été restaurée en 2010 ; une restauration très contestée par certains conservateurs, qui jugent excessif le nettoyage du vernis. Au cours du lifting, le visage de sainte Anne aurait, paraît-il, perdu une once de douceur et d'onctuosité… Mais quand bien même le bistouri aurait excédé de zèle, il faut bien admettre que, du haut de ses 500 ans, Madame reste admirablement conservée.

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