« Qui de nous deux inspire l'autre ? », chantait M, alias Matthieu Chedid, en 2003. Aujourd'hui, c'est exactement la même question que l'on pourrait se poser à propos de l'exposition 'MMM' qu'il partage avec le photographe britannique Martin Parr. Et avoir la réponse en la visitant.
Voir une symphonie, écouter une image : voilà la promesse que nous fait « M au cube ». Un parcours hybride, musico-pictural et insolite, fruit de la rencontre entre les deux artistes aux univers aussi drôles et fantasques l'un que l'autre. Le tout compartimenté en neuf espaces ouverts, neuf expérimentations particulières associant chaque fois un instrument à un sujet photographique. L'angoissante vibration du synthétiseur s'accouple donc aux clichés de parcs aquatiques surpeuplés de 'Busy/Plein', les chinoiseries du Zheng au défilé de 'Text' et les accords délicats de célesta à la série 'Animals', égrainant des diapositives de chiens de concours, de chatons sur cartes postales et même de poulets frits. Certes, les partitions font corps avec l'imagerie qui leur sert de support, l'ornant même d'un cadre auditif décuplant la profondeur des émotions procurées. Mais voilà, la patte compositrice de M se ressent difficilement dans ces airs.
Quand le silence photographique prend le pas sur la musique
A vrai dire, il n'y a que dans les sonorités d’un piano nostalgique, embellissant l'unique galerie de photos noir et blanc de Martin Parr, que la « Chedid touch » s'entend réellement. Alors que, paradoxalement, ces clichés bicolores sur les routes d’Angleterre, s'éloignent, eux, terriblement de la « comédie humaine » parresque habituellement saturée de couleurs et jetant un œil plus (gentiment) critique que bienveillant sur notre société. Un jeu de vases communicants, presqu’un déséquilibre permanent. Que l’on contemple avachi dans des transats, tels les miroirs de ces corps saisis par Parr sur les plages du monde entier, eux aussi abandonnés mollement sur leur serviette. Car le génie de Parr réside dans cette capacité à zoomer sur des petits riens, des détails qui paraissent insignifiants et sont pourtant porteurs de sens et d’humanité une fois révélés. Ainsi que dans son aptitude à la mise en abîme, de lui comme de son spectateur, dont témoigne la kyrielle de clichés d’appareils photo sur laquelle se clôt ce singulier voyage en Absurdie.
En vérité, c'est donc une belle exposition photo que nous avons là, avec une ambiance sonore splendide mais qui aurait pu être l'œuvre de n'importe quel musicien talentueux. On sait donc qui a inspiré l'autre, voire même aspiré. En somme, les admirateurs de Martin Parr seront donc comblés par 'MMM'. Les fans de M un peu moins, si ce n'est frustrés.
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