C'est l'un des musées les plus intimes de la capitale. Un de ces rares coins paisibles, presque secrets, où l'on peut se ressourcer tout en prenant un bon bol d'art moderne. Converti en musée en 1982 selon les souhaits de l'artiste, l'ancien atelier et domicile d'Ossip Zadkine a toujours su conserver l'âme de ces lieux habités pendant une quarantaine d'années par le sculpteur d'origine russe et son épouse peintre, Valentine Prax. S'il cultivait autrefois un charme un brin foutraque et dépassé, le musée Zadkine a repris du poil de la bête depuis l'automne 2012. Le charme singulier est toujours là, mais il cohabite désormais avec une élégance dépouillée, suite à la rénovation de la maisonnette et de son jardinet.
Subtile, épurée, la refonte a été une vraie réussite. On (re)découvre avec plaisir un défilé de petites salles lumineuses, tout en verrières, en parquet de bois brut, en murs et socles blancs. Les sculptures en bois, en pierre, en plâtre et en terre respirent à nouveau, remises en valeur par la douceur du décor (on pense notamment à cette Rebecca, grande porteuse d'eau baignée par la lumière naturelle). De Valentine Prax ne reste plus qu'un furtif clin d'œil, émis par un tableau accroché en haut d'un escalier : Zadkine est redevenu le maître de ces lieux encore étrangement marqués par sa présence, et désormais dominés par ses portraits anguleux, ses corps de femmes taillés dans de robustes troncs d'arbre, ses formes elliptiques évocatrices de l'art africain… Il n'y a plus qu'à parcourir le jardin planté de statues en bronze, très stylisées (dont le fameux Monument à la Ville détruite de Rotterdam), pour savourer encore quelques instants cette plongée dans le Montparnasse des avant-gardes, où se croisèrent, à l'époque, Amedeo Modigliani, Blaise Cendrars ou Arthur Miller.