A réouverture muséale exceptionnelle, programmation exceptionnelle ! Et pour l’occasion, les musées Rodin et Picasso s’allient afin de nous proposer un match digne d’un Mayweather-McGregor. Deux mastodontes de l’art pour deux expos historiques croisant les regards de ces pionniers. Pas question ici de montrer l’influence - évidente - de Rodin sur Picasso mais plutôt de mettre en lumière les points de convergences du peintre et du sculpteur. Alors, ça donne quoi ?
La proposition est tout ce qu’il y a de plus alléchante. Maîtres absolus du monde de l’art, chef d'œuvre assurés, musées magnifiques, difficile de se rater. Oui mais voilà. Malgré des œuvres à la qualité indéniable, on reste quand même dans une thématique d’expo un peu scolaire que le musée Picasso a d’ailleurs surexploitée (Picasso-Giacometti en 2016, Picasso-Calder en 2019 …). Mais soit, si le seul problème résidait dans le manque de surprise du projet, on s’en sortirait bien. Non, le véritable souci ici, c’est qu’à force de vouloir tout mettre en relation, on se retrouve avec des comparaisons superficielles, dénuées de toute dimension critique. Rapports à la nature, au réel, au corps, à l’atelier… Après tout, ne s’agit-il pas ici de thématiques si larges qu’elles auraient pu être appliquées à une bonne majorité d’artistes ?
Les frustrations ne s’arrêtent pas là. Si les deux artistes sont reconnus pour leur immense talent, ils sont aussi connus pour avoir été de sacrés salauds avec les meufs. Et, là où les musées auraient pu exploiter ce rapport ultra chelou qu'entrettenaient ces messieurs avec leurs compagnes, on se retrouve avec des salles pleines de corps nus présentées comme des odes à la femme, à l’eros et à l’odor di femina. Nier complètement la perversité de Rodin et Picasso en 2021, est-ce de la maladresse, une absence totale de critique ou un choix politique déguisé ?