Katerine
© rentingart
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Rencontre avec Philippe Katerine, chantre du mignonisme

On a rencontré l’homme aux 58 casquettes, qui expose jusqu’au 17 septembre ses gros bonhommes roses entre Paris et la ville de Clichy.

Zoé Terouinard
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Si vous boulinguez dans le nord-ouest de Paris, entre le 17e et la ville de Clichy, vous risquez de le croiser. Un bonhomme rose aux yeux microscopiques mais au bide infini plus gros, comme s’il avait testé trois fois notre classement des meilleurs restos de la capitale. Ce Monsieur Rose (c’est son nom), sorte de bulle de chewing-gum auquel un souffleur expérimenté aurait donné forme humaine, qui nous rappelle un fameux personnage de Dragon Ball Z, émane du cerveau de Philippe Katerine. Tour à tour chanteur, acteur et plasticien, l’artiste déploie le temps de l’expo Invasion périphérique tout une armée de personnages, qui viennent s’alanguir devant la mairie du 17e ou sur le parvis du TGI. L’occasion pour nous de papoter avec ce joyeux excentrique. Et de prendre un cours de mignonnisme.

On vous a connu chanteur, acteur, écrivain et artiste plastique ! Comment en êtes-vous arrivés là ?

J’ai commencé à dessiner comme tous les enfants et je ne me suis jamais arrêté (pas comme tous les enfants). Dessiner me permet de voir la vie de façon plus marrante et plus poétique. Faire des chansons, c’est un peu la même chose : on cristallise une vision fugace, comme une photographie un peu déformée. Et surtout, on se sent plus léger.

Depuis le début des beaux jours, Paris et Clichy sont envahis de vos désormais célèbres Messieurs Roses. Qui sont-ils, comment sont-ils nés et pourquoi sont-ils là ?

Mes Messiers Roses viennent de l’autre côté de la vie, mais ils nous ressemblent dans notre paranoïa enfantine. Je ne pourrai pas vous dire s'ils sont féminins ou masculins, mais leurs formes sont celles d'un gros doudou déchiré et souillé par la vie… Il est donc censé être rassurant, mais Monsieur Rose, lui, n'est pas du tout rassuré ! Placé au-dessus des rayons parfumerie au Bon Marché Rive Gauche à Paris en 2022 ou sur le pont du périphérique dans le 17ème arrondissement, prêt à se jeter dans le vide, Monsieur Rose est comme un miroir.

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Justement, contrairement au Bon Marché en 2022, vous revenez cette fois dans les rues de Paris et au Pavillon Vendôme de Clichy. Quelle différence faites-vous d’exposer dans un lieu clos et dans les rues de Paris ?

J’avais déjà expérimenté la chose dans les rues de la Rochelle il y a un an. Aujourd’hui, voir les Messieurs Roses aux proportions anormales dans la ville de Clichy, ça donne à sourire ! Ils ont l’air à la fois mélancoliques mais coquins et handicapés dans leur candeur et leur nudité. Les enfants montent dessus sans crainte, c’est comme une tache de couleur dans un camaïeu gris urbain, et ça fait du bien.

Vous avez baptisé votre propre courant artistique de "mignonisme". C’est quoi le mignonisme ?

Le mignonisme est l’idée qu’en cherchant bien, on peut trouver un côté mignon à une chose ou une situation pas du tout mignonne. Ça aide à vivre ça.

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Êtes-vous le seul artiste "mignoniste" ou pensez-vous que d'autres artistes puissent être affiliés à ce courant ?

Pour l’instant je suis le seul artiste mignoniste, et ça me fait rire parce qu’on dirait un dictateur dans un pays inhabité ! Pour autant, il y a eu beaucoup d’artistes mignonnistes que l’on connaît : Luis Buñuel, Jeff Koons, Niki de Saint Phalle, Yoko Ono, Paola Pivi, Amandine Urruty et pourquoi pas Théo Mercier… Certains artistes peuvent être mignonnistes à un moment et ne pas l’être à d’autres. C’est mon cas. J'aime bien savoir quand je l’ai été ou quand je le suis. Ça m'aide à comprendre.

Quelle forme le mignonisme prend-t-il dans la vie ?

La forme d’une araignée qui tisse sa toile, patiemment. Une forme fragile qui va tuer dignement.

Si vous deviez choisir une seule de vos chansons pour illustrer ce courant, laquelle serait-elle ?

Toutes mes chansons ne sont pas mignonistes. Loin de là ! Mais Aimez-moi ou Les objets sont mignonistes. Puisque je vous le dis ! 

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