Critique

Soulèvements

5 sur 5 étoiles
Et si l'imagination soulevait les montagnes ?
  • Art, Art contemporain
  • Recommandé
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Time Out dit

Au Jeu de Paume, 'Soulèvements' retrace l'histoire des luttes debout à travers une chronologie chamboulée des œuvres qui s'en sont fait les témoins. « Debout. » Ce mot si puissant et droit, si engagé et insoumis, politique et parfois même enragé, prend tout son sens dans le soulèvement. Tout sauf rester assis, planté. Il faut se redresser, se lever, se soulever. C'est cet élan, cette volonté forte et déterminée qui nous fait nous dresser sur nos pieds, que le philosophe et historien d'art Georges Didi-Huberman se propose d'observer à travers des images produites à des époques de contestations ou de calme. 'Soulèvements' fait ainsi se rencontrer les œuvres de Goya, Courbet, Man Ray, Vallotton, Manet ou Bertolt Brecht, de même que les dernières vidéos performatives de Maria Kourkouta à la frontière gréco-macédonienne, ou les photographies de Michel Caron lors des émeutes parisiennes de 1968.

La portée du geste 

Parce qu'« il est un mouvement dans une durée très brève, presque un arrêt, une contraction du temps » (Antonio Negri, dans le catalogue de l'exposition) le soulèvement se manifeste comme un état qui se tient suspendu entre deux temps, deux moments, sans que l'on puisse le saisir et le décrire. Georges Didi-Huberman choisit donc de l'appréhender selon les différentes incarnations que le corps soulevé lui prête : gestes, mots et désirs. Trois actes qui guident la visite et créent une résonance entre ce qui se lève, ce qui flotte sur un vent agité, ce qui se crie et se poétise et ce qui s'érige. De simples gestes comme taper du poing sur la table ou lever le bras, on saisit alors l'immense portée tant symbolique qu'effective. Puis se sont les bouches qui s'exclament (la superbe fresque photographique de Graciela Sacco), ensuite les phrases qui se forment (magnifique ciné-poème anonyme, ou bribes griffonnées au coin d'un cahier de la main de Pasolini), enfin les barricades qui matérialisent autant le refus que le désir.

Elévation politique et parcours a-chronologique

Richement documentée et intelligemment présentée, l'exposition déploie le vaste panel visuel et artistique qu'ont inspiré les soulèvements au cours de ces trois derniers siècles. Articles de presse, unes de journaux, photos, vidéos, gravures, collages et objets, tout incarne cette élévation politique et cette prise de position. Tourbillon d'oeuvres qui nous emmène dans la folle course de la résistance à l'ordre établi, en proposant un panorama esthétique, 'Soulèvements' construit non seulement un parcours a-chronologique qui met en parallèle des œuvres que l'on n'aurait jamais regardées ensemble, mais galvanise aussi notre soulèvement intérieur et notre conscience (a)politique. « Et si l'imagination soulevait les montagnes ? » De la place de la République au Jeu de Paume, il n'y a finalement qu'un pas, qui se fait dans la même foulée : celle de l'action et de la rébellion.

Cette exposition fait partie de notre sélection des meilleures expositions à Paris

Infos

Site Web de l'événement
www.jeudepaume.org
Adresse
Prix
10 €
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