Sur le toit de l’Arche de la Défense, un nouvel espace de 1200 m2 entièrement consacré au photojournalisme surplombe désormais les costards et les attaché-case en contrebas. Pour inaugurer les lieux, c’est la très engagée Stéphanie Sinclair qui recouvre les murs en béton de ses formidables photographies – à la hauteur, voire plus, de ce qu’on imaginait pour un tel endroit. Car le résultat est époustouflant : après avoir traversé l’Afghanistan, l’Ethiopie, l’Inde ou encore les Etats-Unis, l’Américaine nous présente une enquête sur les mariages forcés de jeunes filles mineures.
Cette série de clichés, radieuse mais tragique, nous raconte au fil des images l’horreur et le quotidien de ces gamines défigurées, mutilées, mères à 15 ans ou esclaves domestiques partout dans le monde. Et le choc est rude. On pense forcément à ce tirage où Tahani, mutique, coiffé d’un voile et enrobée dans une robe rose pétante, épouse à l’âge de 6 ans son oppresseur – de dix-neuf-ans son aîné ! Ou à ces trois sœurs, Yagana, Yakaka et Fatimata, enlevées par Boko Haram au Nigéria avant d’être violée et souillée à l’envi par leurs oppresseurs… Avant de pouvoir revivre.
Loin d’être anecdotique – ces actes barbares touchent environ 140 millions de fillettes dans le monde –, on ose espérer que, à travers la force et la puissance du travail de Sinclair, cette exposition touchera le plus grand nombre. Et que le public en ressortira comme nous : complètement bouleversé.