Body Configurations va venir nourrir le débat et la nouvelle vague féministe qui s’interroge sur l’androcentrisme de notre société. La place réduite laissée à la femme dans l’espace a tardé à intéresser les sociologues, urbanistes et géographes, mais a été embrassée bien plus vite par les artistes. L’exposition Women House en témoignait récemment à la Monnaie de Paris et celle de l’artiste autrichienne Valie Export en prend quelque part le relais. Septuagénaire née Waltraud Lehner en 1940, elle a endossé une nouvelle identité en chipant le nom d’une marque de cigarettes associée à une certaine virilité. Elle était alors, au début des années 70, parée pour présenter son travail comme un coup de pied dans la phallocratie artistique viennoise d’alors.
Cette exposition, réalisée sous le commissariat de Caroline Bourgeois à la galerie Thaddaeus Ropac dans le Marais, nous parvient sans avoir malheureusement pris de ride dans sa remise en question perpétuelle et tortueuse de l’occupation de l’espace par le corps de la femme. Si ceux qui la connaissent ont retenu d’elle la photo du tatouage d’une jarretelle sur sa cuisse (l’œuvre Body Sign B), l’exposition sur deux étages met l’accent sur ses actions dans la ville, avec les photographies Körperkonfigurationen. Là, elle s’y approprie le territoire dans des positions pas toujours confortables, en trouvant une place pour son corps dans une crevasse, un amas de bois ou une cage d’escalier. En boule, dans la position du chat à plat ventre ou collant son corps à la pierre, elle s’impose dans cet espace public inégalitaire qui ne représente souvent qu’un lieu de passage où l’on ne s’attarde pas.
Avec le film …Remote …Remote qui accompagne le corps du visiteur hors de l’exposition, Valie Export pousse l’exploration de notre enveloppe de chair jusque dans ses profondeurs, à en atteindre le sang, en s’écharpant les doigts devant un portrait d’enfants, interrogeant ainsi le passé qui colle à la peau.