Il y a quelques semaines, dans le Quartier latin. Les écoliers se pressent sur les trottoirs, le dos plié par le poids indécent de leur cartable. Les étudiants flânent et flirtent. Les touristes profitent d’un reste de soleil pour se prendre en photo devant les chimères de la fontaine de la place Saint-Michel. C’est là que nous avons rendez-vous avec un dandy scabreux de la scène rock française. Nicolas Ker, chanteur de Poni Hoax, Paris et Aladdin, nous retrouve à l’heure dite. Accompagnés de ce prince lunaire, nous entamons une balade littéraire et philosophique, qui s’achèvera aux abords du Panthéon.
Une heure d’un tourbillon facétieux passée en sa compagnie, qui d’emblée nous a happés dans l’univers composite et la conscience survoltée de son cerveau bien nourri, à l’intérieur duquel fusent étincelles de clairvoyance comme de folie – l’une étant certainement dépendante de l’autre.
Ainsi, au détour des rues nous a-t-il décrit le parallèle qu’il entrevoit entre mathématiques et musique, conté la relation qu’ont entretenue certains artistes avec la tentation du meurtre, confié ses pensées sur l’écriture, matière ardue et intransigeante, et ses paradoxes de rocker qui se rêve père au foyer. Et quand il a cessé de se mesurer à Leonard Cohen et à Bob Dylan, c’était pour se comparer à Homer Simpson ou blaguer sur Jean Moulin.
Un être normal dans le sens où sa complexité ne peut se résumer en quelques lignes ou en une interview. Une personnalité volatile – dont l’électricité heurtera les rigoristes – mais entière et belle parce qu’inconditionnellement sincère. Voilà un grand homme : sensible, cultivé, un sublime énergumène.