Imaginez une taverne chaleureuse, dotée d’un bar en bois à la longueur démesurée, et où résonne de la musique celtique. Dans une déco industrielle, des tables à rallonges invitent à discuter avec ses voisins en se serrant les coudes et en se payant des « rounds ». Sur les murs, on trouve le classique tableau noir où sont inscrites à la craie les spécialités du moment. Fáilte chuig an The Green Goose (« bienvenue au Green Goose »), un vrai petit coin d’Irlande perdu dans un angle de la rue des Boulets, entre deux gros boulevards du 11e. Mais attention ! Amateurs de pubs en plastique déversant des litres de Stella pour arroser des fishs and chips industriels, passez votre chemin ! Le Green Goose ne boit pas de cette bière-là... Ne comptez pas non plus y trouver pléthore d’écrans rediffusant un match de Ligue des champions d’il y a cinq ans.
Vous êtes bien dans un vrai pub où l’accueil est aussi chaleureux que l’accent est prononcé. Traditions et qualités, les deux mots d’ordre de cette maison. En connaisseurs légitimes, les Irlandais pure souche aux commandes du Green Goose ont soigneusement choisi des bières artisanales (7 € en pinte à la pression). Ils savent aussi vous conseiller humblement. Si les termes stout, ale, pilsner ou encore wheat beer vous sont aussi inconnus que la date du premier poème de James Joyce, n’hésitez pas à vous laisser guider. Le soin apporté à la sélection de bière se retrouve aussi dans la cuisine. Au menu, les indémodables de la culture gastropub, de la dinde au chou rouge, au carotte cake à la cannelle. C’est au Christmas Menu que nous nous sommes frottés. Œuf mollet bio enveloppé dans un cocon de saucisse et roulé dans de la chapelure (6,50 €) et des noix de Saint-Jacques et sa fine croûte de noisette sur des topinambours et betteraves rôties (9 €). Un vrai délice. Toute résistance à la carte et à l’ambiance étant inutile, impossible de s’arrêter en si bon chemin. On recommande alors une pinte et on ne résiste pas au magret de canard avec ses choux rouges et sa dauphinoise de pomme de terre (16 €). Pendant ce temps, le pub s’est rempli et l’ambiance va crescendo, ponctuée par des rires forts et sincères. Dans ce brouhaha bienveillant résonne du français, pas mal d’anglais et du gaélique. Au moment de franchir la porte pour partir, on se demande bien si l’on foulera les trottoirs parisiens, où les pavés de Dublin.