Il y a dans ces bars de banlieue populaire comme une impression que le temps ne passe pas. A la Nouvelle Comédie à Montreuil, on sent que l’atmosphère devait être, à peu de choses près, la même il y a cinquante ans. Petit voyage dans le passé donc, direction l’époque où la banlieue ressemblait à celle dessinée par Frank Margerin et chantée par Renaud : un mélange paisible de blousons noirs rock ’n’ roll et d’immigration maghrébine, qui apparaît aujourd’hui comme un âge d’or en comparaison avec les immense difficultés éprouvées par les cités d'aujourd'hui. La Nouvelle Comédie nous convie à ce fantasme, celui de retrouver l’ancien esprit gouailleur de Paris et de ses villes limitrophes.
Au milieu d’une population hétéroclite comme on n'en trouve dans aucun bar parisien, le visiteur aperçoit des jeunes filles et des jeunes garçons pleins de rêves, des trentenaires abîmés par la vie mais pas trop, des quinquas recouverts de tatouages, des vieux pas sages, des employés, des fonctionnaires, des marginaux, des types en costard… Sur scène, le Riquet Jug Band envoie son blues et son swing déglingués, pendant que les filles dansent. Ils seront suivis par le rockabilly des non moins formidables Moonshiners, au look irrésistible tout droit sorti de la BD ‘Lucien’. Avec une pinte à 4 €, les mines sont rapidement avinées, et l’atmosphère se réchauffe sans s’échauffer.
Derrière le groupe qui joue, une petite porte ouvre sur une cour. Un écriteau prévient : « Clopes et barbeuk : zone enfumage ». Un Kabyle prépare des sandwichs et grille des merguez en posant ses mains burinées à même le barbecue. Elles semblent ignifugées. Un enfant passe, l’homme l’interpelle : « Hé ! Mon neveu, tu veux une merguez ? Je suis fâché avec ton père, mais pas avec toi hein ! » Retour à l’intérieur du bar pour constater qu’il est décoré comme un temple du foot : flipper de la Coupe du monde 1994, babyfoot, écharpes du PSG et du Red Star, écran pour projeter les matchs… Pourtant, La Nouvelle Comédie n’a rien d’un bar pour footeux : chacun ici semble porter sa propre histoire, longue et riche, à l'instar de ce punk massif comme une armoire normande qu’on jurerait échappé du Londres de 1977. Le regard ailleurs, il boit dans sa bouteille en plastique son propre alcool frelaté. Il repartira sur un vélo. Punk hipster ?
Time Out dit
Infos
- Adresse
- 88 rue Edouard Vaillant
- Montreuil
- 93100
- Transport
- Métro : Roberpierre ou Croix de Chavaux, Vincennes (RER A)
- Prix
- Pinte à 4 €, mojito à 5 €, ti punch à 3 €.
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