Au diapason de la mode des jazz kissa, ces cafés japonais où, bercé par les vinyles de Coltrane du patron, le salaryman vient siroter un highball entre deux burn-out, Mesures veut faire vibrer le Marais toute la journée à coups de petites assiettes nipponnes, cocktails chiadés et bande-son analogique. La salle joue l’épure : grandes baies vitrées, mobilier en bois sombre et parquet clair. La carte des cocktails imaginée par Guillaume Castaignet, venu du Très Particulier, se montre en revanche assez exubérante et très technique (ingrédients recherchés, glace taillée) mais échappe à la monomanie jap’.
On entame ainsi avec un puissant Haitian Fight Song (d’après un morceau de Mingus) mixant arbois-savagnin de Jérôme Arnoux, rhum, whisky et sirop de banane aux subtiles notes cacaotées. Nettement plus frais et anisé, le Gus (blanche de Normandie, rhum, réduction de cidre, émulsion de poire et fenouil) donne l’impression de se balader dans les prés salés en face du Mont-Saint-Michel. Ça ouvre les chakras pour la grignote du soir : bel assortiment de tempuras de légumes (13 €) mais oubliable croquette de bœuf (8 €). Pour goûter une cuisine plus personnelle du chef Cyril Pham (Dersou), il faut s’attabler le midi : sashimi du jour, poulet au koji et purée de céleri…
Derrière le comptoir en marbre, Benoît de Bonnefamille, musicien et ancien DA du Très Particulier, enquille des incunables jazzy et funkoïdes tirés des étagères pour une ambiance ouatée et très sage. Au final, un lieu séduisant mais un peu perturbant avec ce positionnement qui hésite entre bistrot et bar.