Grâce à Jesus Ortega, vous pouvez boire le parfum de Kylie Minogue. Ou presque. Après avoir rencontré (et bien sentie !) la chanteuse, le bartender chouchou des classements mondiaux lui a rendu hommage à travers un cocktail : le Showgirl. S’il est devenu ambassadeur de London Essence, c’est certainement un peu pour son nez. Car avant de se spécialiser dans les mixers, la marque de tonics et sodas haut de gamme fût l’un des plus importants distillateurs d’essences naturelles au monde, à destination des parfumeurs. Depuis 2018, Jesus imagine avec eux des cocktails en forme de voyages olfactifs. À travers une riche discussion, entrecoupée de dégustations, il nous a révélé les secrets de ces créations, mettant en éveil nos cinq sens. En voici un aperçu.
Salut Jesus. Tu es bartender et ambassadeur pour London Essence, avec qui tu partages un goût certain pour le parfum. Comment est-ce que ça se traduit dans ton travail ?
Pour la grande majorité de mes créations, je me base sur un parfum réel, que ce soit le parfum de quelqu’un, ou celui d’un lieu. L’odeur de Kylie Minogue pour mon cocktail Showgirl, par exemple, où celle d’un ami très proche pour mon cocktail Carnal, qui signifie à la fois « charnel » et « frère ». C’est comme ça que je fonctionne : d’abord le nez, ensuite le goût. Je travaille comme un parfumeur, en tenant compte des différentes couches qui composeront ma création : les notes de tête (qui arrivent tout de suite), de cœur (qui se développent dans un deuxième temps) et de fond (celles qui restent le plus longtemps). La plupart du temps, la note de fond, c’est le spiritueux. Tout ce qui est bois, résine, vanille… sont des notes de fond. Mais étant sobre, ce qui m’intéresse, c’est d’abord le goût. Le choix du spiritueux vient plus tard. Je fais en sorte d’imaginer des cocktails qui pourront aussi bien être bus avec que sans alcool.
Certains spiritueux ont un nez très puissant, comme le fumé du mezcal, comment le reproduire dans un cocktail non alcoolisé ?
Avec du thé ! Pour mon cocktail Carnal, je voulais absolument cette odeur de fumé, en clin d'œil à la moto de mon ami. Avant de penser au mezcal, j’ai tout de suite pensé au thé fumé. J’utilise un thé noir fumé très boisé Mariage Frères, L’Empereur Chen-Nung. De manière générale, j’utilise beaucoup de thé, beaucoup de vin aussi, comme le Xérès. La quantité de notes différentes et complexes contenues dans un seul liquide, thé ou Xérès, c’est hyper intéressant pour moi. Dans un thé vert au jasmin, tu vas avoir les notes vertes des feuilles de thé, les notes du jasmin, mais aussi les notes des tanins qui sont créés… Je cherchais des notes de beurre pour un autre cocktail : j’ai tout de suite pensé au Oolong. J’avais fait un blend avec du thé, du distillat de beurre, goyave… Je voulais retrouver l’odeur de la pâtisserie Rosetta, au Mexique. Comme un parfumeur, je cherche à jouer avec ton cerveau.
Comment faire en sorte que le mixer (soda, tonic ou ginger beer) ne vienne pas diluer ce travail olfactif ?
Au contraire, un mixer peut participer à ce travail olfactif, en être une composante déterminante. C’est complètement le cas avec les mixers de London Essence, ils sont tous réalisés à partir d’essences botaniques distillées. Tous nos distillats sont produits à Grasse, par des maîtres parfumeurs. Et ils vont permettre de faire briller chaque note d’un cocktail à travers les leurs. Plutôt que de les fondre, le mixer va séparer les différentes couches, nous faire sentir chaque note au fur et à mesure. Mais c’est aussi dû au fait qu’ils sont très peu sucrés, les moins sucrés du marché. Et puis nos bulles sont très fines, comme celles du champagne ! Parce qu’on n’a pas d’arrière-goût à cacher.
Pour donner encore plus de force à l’odeur, il t’arrive d’utiliser des sprays, que tu pulvérises en fin de préparation sur le cocktail… Pourquoi ?
C’est encore une question d’équilibre. Prenons la vanille, par exemple. C’est une note de fond, c’est ce qui reste le plus longtemps. Le risque, c’est qu’elle prenne le dessus quand on la met dans un cocktail. Avec un spray, j’amène la vanille, mais c’est beaucoup plus délicat que si j’en faisais un ingrédient du cocktail. Pour le fabriquer, je mélange de la vanille avec de la vodka « overproof », c’est-à-dire avec une haute teneur d’alcool, 70°. Plus l’alcool est fort, plus l’odeur sera puissante. Mais ça me permet aussi d’amener des notes à mon cocktail qui seraient introuvables autrement, ou plus difficilement. Comme le cuir, par exemple. Pour mon cocktail Carnal, j’ai imaginé un spray à partir de leather liquid, c’est de l’essence de parfum de cuir. J’en mets seulement une goutte dans de la vodka, associée à une goutte d’ambre.
Au-delà du nez, quels autres sens vont impacter la dégustation ?
Tous les sens sont importants. Tous. Même l’ouïe. Et ça va au-delà du cocktail lui-même. La musique, dans un bar, par exemple, va avoir un énorme impact sur la dégustation. Et puis il y a le son des bulles dans le cocktail, le tintement des glaçons… Ensuite, il y a la vue, évidemment. À chaque fois que je crée un cocktail, je fais des tests couleurs. Parce que c’est la première chose que tu vois quand ton cocktail arrive. London Essence me facilite beaucoup la tâche à ce niveau-là parce qu’on a des couleurs très délicates, agréables à regarder. Nos colorants sont naturels : carotène, caramel (sans sucre)… Pour préserver le goût, encore une fois. Mais au-delà des sens physiques, il y a pour moi un dernier sens, psychologique, qui correspond aux souvenirs. C’est le facteur émotionnel du cocktail. Et ce sens-là est très lié à l’odeur, qui est intrinsèquement liée à la mémoire.
Est-ce qu’il y a un cocktail en particulier qui te ramène à cette dernière dimension ?
Mon cocktail phare, et le plus demandé aujourd’hui, est inspiré du parfum des femmes de ma vie, ma mère et mes deux grands-mères, qui portaient toutes Gardénia de Chanel. À l’intérieur, seulement trois notes, pour n’en perdre aucune et rendre à chacune toute sa puissance. Le jasmin, avec du thé vert au jasmin (que j’achète chez Terre de Chine), la fleur d’oranger, via de l’essence de Néroli, au parfum moins sucré pour un rendu plus frais, et puis la vanille, en spray, pulvérisée sur le cocktail juste avant de le servir. Je le sers avec le soda à la pêche blanche et au jasmin de London Essence, ça redonne toute sa puissance à chaque note du cocktail. Mais toutes mes créations sont liées à des souvenirs. Le Dévotion, par exemple, est inspiré d’une église au Mexique où il est interdit de prendre des photos. Quand tu entres dans cette église, mon Dieu, l’odeur… J’ai imaginé un cocktail qui s’en inspire, à base de clou de girofle, œillet, ylang-ylang. C’était une manière de partager ce souvenir avec les gens, autrement que par l’image.
Et pour ceux qui voudraient réaliser des cocktails à la maison, sachez que vous pouvez retrouver les produits London Essence chez Monoprix.