Loin des menus fleuves et des formules balisées, les bars à vin apparaissent comme des restaurants en liberté. Sublimés au début des années 2000, ils accueillent à bars ouverts les appétits volages en proposant bien plus que la planche mixte de survie. Certains vont très au-delà de la simple buvette : on y cuisine vraiment, on y met la gastronomie en bouteille. C’est le cas de ce Trouble, troquet dandy à bois brun et devanture bleu ciel cornaqué par le chef très habile Stefano De Carli (ex-Passerini), en assemblage avec le sommelier Nicolas Phillips (de Fulgurances).
Le cuistot italien miniaturise des grands plats, savants mais décontractés, comme une loquace langue de bœuf snackée avec champignons enoki frits et tarama au fenouil sauvage (12 €) ; un hot-dog de poulet rôti mieux toiletté qu’un caniche de concours coiffé de guanciale, oignons frits et sauce romesco (14 €) ; ou, en dessert, un coquinissime « tiramichou », chimère au jeu de mots aussi onctueux que son mascarpone (8 €). Mais le banger des lieux, c’est la milanaise de la mer : une fine escalope panée de seiche couleur porcelaine, version Super Saiyan du calamar à la romaine, énergisé d’un kaméhaméha d’aïoli au piment et poutargue (18 €).
Et comme la soif est enfant de Bohème qui n’a jamais connu de loi, papillonnez de verre en verre parmi les pifs de Nicolas (dès 7 €) : blanc sylvaner alsacien du domaine Durrmann, mondeuse rouge bugeysienne du domaine Les Grangeons de l’Albarine, trebbiano romagnolo orange du domaine Podere Pradarolo… Bref, un barav qui compte double, voire triple – qui compte trouble.