Difficile de résumer l’ampleur de l’œuvre de Raymond Depardon, cinéaste, photographe, fondateur et directeur de Gamma, voyageur, journaliste… Qu’il sillonne les campagnes françaises (‘Profils paysans’), décortique le travail quotidien de la justice (‘10e chambre, instants d’audiences’), d’un asile psychiatrique (‘San Clemente’) ou les stratégies de conquête du pouvoir politique (‘1974, une partie de campagne’ – sur un Giscard candidat à la présidentielle qui, fraîchement élu, en interdira la diffusion), toujours Depardon impressionne par la pertinence éthique de son regard. Plus concrètement, le dispositif du film, juste et touchant, fait alterner deux espaces-temps. Le premier : des séquences où Depardon photographie, au jour le jour, des villages de France, avec un appareil à plaques argentique antédiluvien. Devant la caméra, sa parole est profonde, directe, et laisse de l’espace au regard, à la réflexion du spectateur. Souvent, cet héroïsme humble et contemplatif de Depardon lui confère une admirable manière d’aller au fond des choses – c’est-à-dire, au sens propre, à leur matérialité.
L’autre partie du film, enchâssée dans ce documentaire sur le photographe, consiste en un montage de rushes accumulés par Depardon-cinéaste depuis 1969. Cette sélection d’extraits inédits, il l’a confiée à Claudine Nougaret, sa compagne et ingé-son depuis vingt-cinq ans. Comme on pouvait s’y attendre, ces fragments oubliés se révèlent très riches. Par leur variété, leurs thèmes, leurs mouvem