Si L’Empire des sens est une bien belle expression, le titre original du film le plus sulfureux d’Oshima, traduit en français, donnerait en fait « La Corrida de l’amour ». Ce qui n’est pas mal non plus, et correspond surtout davantage à ce film au sein duquel, à travers le sexe, il est bien question de mise à mort d’un des partenaires. L’inspiration d’Oshima vient d’ailleurs d’une histoire vraie, et relativement délirante : celle de Sada Abe, ancienne geisha devenue servante et prostituée, et de son amant Kichizo, qui s’entraînèrent mutuellement, au milieu des années 1930, dans une spirale érotique sans autre fin que la mort pour l’un, la folie pour l’autre. Avec ablations d’organes génitaux au dessert. Mettant en scène de nombreux actes sexuels non simulés, L’Empire de sens aura d’ailleurs conservé la même aura subversive que Le Dernier Tango à Paris. Sauf que le film d’Oshima a nettement mieux vieilli que celui de Bertolucci – dont, à la longue, la fameuse scène de la plaquette de beurre a manifestement ranci.
Erotisme cru, ultraviolence, amoralisme ou déviances surréalistes : le cinéma aime transgresser les normes, filtrer le réel pour en tirer une vision radicale, excessive, apte à retranscrire l'existence dans sa perspective la plus entière, torrentielle, jusqu'au-boutiste. Parmi ces œuvres les plus choquantes - et, en même temps, signifiantes - produites à travers l'histoire du septième art, nous en avons choisi treize, de Luis Buñuel à Harmony Korine en passant par Haneke, Pasolini ou Oshima, pour représenter la transgression au cinéma. Détraqués, dérangeants, obscènes, ces films sont autant de chefs-d'œuvres de subversion, pour la plupart inoubliables. Parce que c'est bon quand ça fait mal.