2001, l'Odyssée de l'espace
2001, l'Odyssée de l'espace
2001, l'Odyssée de l'espace

Guide du film de science-fiction

Notre sélection des 50 meilleurs films de SF de l'histoire du cinéma

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Retrouvez ici notre guide du film de science-fiction, avec les plus grands classiques de la SF, de Tarkovski à Kubrick en passant par Ridley Scott et George Lucas. Mais vous y croiserez aussi un joyau latino-américain méconnu, quelques délicieuses perles de propagande vintage, des liens vers le cinéma d'horreur ou le romantisme, des dessins animés visionnaires, des séries Z cultes, de bons gros paquets d'extra-terrestres flippants. Parés pour le décollage ?

Guide du film de science-fiction : top 10

Film de science-fiction de Stanley Kubrick, avec Keir Dullea, Gary Lockwood et William Sylvester

La grande idée : un film-somme des tendances de la science-fiction. Et un ordinateur pervers à la cruauté sarcastique.

La réplique : « Je suis désolé, Dave. Je crains de ne pas pouvoir faire ça. »

Du singe à l’ordinateur, toute l’étendue des ambitions humaines
‘2001’, premier des films de science-fiction ? Voilà qui pourrait agacer les fans de ‘Star Wars’ (plus nombreux) comme les thuriféraires du très pointu Andreï Tarkovski. Pourtant, cette odyssée de l’espace reste un monolithe absolument incontournable dans l’histoire du cinéma. D’abord, en mêlant les différentes tendances de la SF : après une introduction qui n’est pas sans évoquer ‘La Planète des singes’ (sorti la même année), Kubrick aborde le voyage dans l’espace et le temps, la claustrophobie au sein du vaisseau spatial (qui paraît anticiper ‘Alien’ et ses semblables), un fœtus intergalactique (si, si) et, surtout, les dangers de l’informatique toute-puissante et de l’intelligence artificielle – le tout sur une musique ironique et grandiloquente de Richard Strauss, ‘Ainsi parlait Zarathoustra’.

Enigmatique, ‘2001, l’Odyssée de l’espace’ aura suscité un déluge d’interprétations, dont celle d’une relecture du concept nietzschéen de « surhomme » ou d’une approche visionnaire du futur de l’humanité après le règne des machines. Car aux côtés des hommes, le grand héros maléfique de ‘2001’ reste, bien sûr, le super-ordinateur HAL9000, capable de pulsions meurtrières perverses et dont la voix, douce et implacable (celle de l’acteur Douglas Rain), résonne pour longtemps dans l’espace vidé du cerveau du spectateur après la fin du film. Fin qui reste d’ailleurs l’une des plus bizarres et étourdissantes de l’histoire de la science-fiction, après une phase d’accélération psychédélique qui vous laisse dans le même état qu’une longue impro du Grateful Dead. Après tout, on est bien en 1968.

Blade Runner (1982)
Blade Runner (1982)

Film de science-fiction de Ridley Scott, avec Harrison Ford, Rutger Hauer et Sean Young

La grande idée : laisser planer le doute sur la véritable identité du personnage principal.

La réplique (en VO) : « It’s too bad she won’t live. But then again, who does ? »

Une histoire sans fin
Si le film de Ridley Scott sorti en 1982 est devenu un classique de la science-fiction, ce n’est pas seulement pour ses qualités intrinsèques. Bien entendu, il y a ces effets spéciaux à la sobriété éclatante, ce Los Angeles futuriste (plus tant que ça, car 2019 approche) dont la noirceur évoque plus le crépuscule de l’humanité que son épanouissement, cette bande-son terriblement obsédante signée Vangelis, ces influences mêlant le 'Metropolis' de Fritz Lang aux dessins de Moebius, et puis cette histoire originale tirée du roman de Philip K. Dick au titre moins « bankable » et pourtant si drôle, 'Do Androids Dream of Electric Sheep ?'. Dans le cas de 'Blade Runner', l’histoire entourant les interprétations du film ajoute du mythe au mythe, car c’est l’ambiguïté d’une fin aux multiples scénarios qui va en faire un enjeu cinéphilique de premier ordre.

En 2019, l’humanité est parvenue à créer des robots androïdes dont l’apparence physique est indissociable des autres hommes. Nommés « réplicants », ceux-ci sont utilisés comme esclaves pour coloniser d’autres planètes, mais certains d’entre eux se révoltent. La police crée alors une unité spéciale, les « blade runners », chargés d’éliminer ces réplicants insoumis. Reprenant à leur compte le cogito cartésien (« I think, therefore I am », explique une réplicante à un généticien), conscients de leur existence et de leur mort prochaine, ces modèles les plus avancés d’androïdes revendiquent une nature humaine qui leur est refusée par leurs créateurs. Ce qui ne serait qu’un questionnement classique de la science-fiction trouve un écho plus profond dans la controverse autour de l’identité réelle de Rick Deckard (référence à peine voilée à Descartes), le « blade runner » joué par Harrison Ford auquel les spectateurs peuvent s’identifier.

[SPOILER ALERT] On le sait aujourd’hui : durant le tournage, une lutte a opposé Harrison Ford et les producteurs d’une part, Ridley Scott d’une autre, à propos de la véritable nature de Rick Deckard. En 1982, c’est la vision des producteurs qui domine, une sorte de happy end un brin nunuche laissant de côté l’ambivalence autour du personnage principal, même si déjà la question est posée : et si Rick Deckard était un réplicant ? Il faudra attendre le director’s cut de 1992, puis le final cut de 2007 pour que les doutes s’immiscent dans les esprits. Pour certains, dont Ridley Scott qui l’avoue en interview, il est évident que Deckard est un androïde, comme le laissent entendre un grand faisceau d’indices : la licorne en origami laissée par le policier au domicile de Deckard, les photographies que ce dernier installe sur son piano, ou encore la phrase prononcée par Gaff à Deckard, en parlant de la réplicante dont il est tombé amoureux : « Dommage qu’elle doive mourir, mais c’est notre lot à tous. » Mais le plus séduisant dans cette thèse, c’est qu’elle force le spectateur à se poser des questions sur sa propre identité.

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Film de science-fiction de Ridley Scott, avec Sigourney Weaver, Tom Skerritt et John Hurt

La grande idée : dans l’espace, personne ne vous entendra vous plaindre de votre salaire, du café, ou de la présence d’un très agressif huitième passager.

La réplique : « Je peux finir mon café ? C’est la seule chose de bonne sur ce rafiot. »

La créature du docteur Freud
Pour les membres du Nostromo, l’espace ne saurait se réduire en un palpitant terrain d’aventures, un Nouveau Monde infini où tout n’est que conquête stellaire, planètes hostiles à défraîchir et rencontres avec des civilisations d’amazones à quatre poitrines.

Embarqués dans le monument d’horreur que deviendra ‘Alien, le huitième passager’, le cosmos n’est pour cet équipage qu’un espace de travail comme les autres, où la cryogénisation revêt autant d’importance que les plaintes quant aux bonus de fin de mission ou les remarques sur la qualité du café à bord de ce qui finira par être leur tombeau. Fort heureusement pour Ridley Scott, qui reprend à son compte l’alors récent ‘Star Wars’ et son univers où l’Homme n’est qu’infinitésimal, ce cynisme emprunté à Conrad (tout comme le nom du vaisseau) poussé à l’extrême et l’imagerie freudienne parfois grotesque ne viennent jamais entacher la leçon de tension cinématographique qu’est aujourd’hui encore ‘Alien’ premier du nom.

Des apparitions plus que mesurées de l’effrayante créature gothique conçue par HR Giger à la paranoïa ambiante menée par le double-jeu du robotique Ash, le film plonge le spectateur en plein dans un labyrinthique vaisseau-hanté qu’il arpente en compagnie des six acolytes de Sigourney Weaver, six ingénieurs à la panique communicative. Difficile de rester de marbre et de ne pas s’égosiller de frayeur devant cet horriblement angoissant chef-d’œuvre. Attention, car vos voisins, eux, risquent bien de vous entendre crier de terreur.

Rencontres du troisième type (1977)
Rencontres du troisième type (1977)

Film de science-fiction de Steven Spielberg, avec Richard Dreyfuss, François Truffaut et Melinda Dillon

La grande idée : faire de la nature humaine un spectacle de SF haletant

La réplique « On ne va quand même pas me dire que c’est un coup de lune, ça ! »

Premier contact avec l’humain
A tous ceux qui ne croiront jamais en un esprit supérieur barbu niché quelque part dans les nuages, l’hypothétique découverte d’une forme de vie extra-terrestre représente l’expérience la plus proche ce que l’illumination déistique peut-être, et ‘Rencontres du troisième type’ ce qu’il y a de plus près de l’Ancien Testament. En tout premier lieu pour Spielberg lui-même, qui n’a eu de cesse d’utiliser ses films comme terrains d’expérimentation de sa propre foi.

Toute la magie de ce film réalisé par un Steven Spielberg à peine trentenaire réside précisément dans cette volonté de créer un spectacle pareil à une grande messe, sans violence, tout en exacerbation des sentiments humains. ‘Rencontres du troisième type’ joue d’affects simples, comme l’émerveillement ou la découverte de l’autre, là où la science-fiction classique s’épuise en tours de passe-passe bon marché pour créer le spectacle. Spielberg n’est pas le « roi du divertissement » pour rien, quoique ce titre lui fut honorifiquement donné pour des productions bien plus naïve, comme le tout de même génial ‘E.T. l’extra-terrestre’.

Là réside précisément la seconde grande force de ‘Rencontres du troisième type’. Loin de la trop grande candeur de ses réalisations précédentes, le film réussit à montrer le meilleur de l’humain sans en cacher le pire. La présence de Truffaut n’y trompe d’ailleurs pas, et aucun personnage dans le cinéma américain des années 1970 ne ressemble autant à l’infantile Doinel que Neary, le traducteur du professeur Lacombe (François Truffaut), capable d’abandonner sa femme comme seul Léaud chez Truffaut pouvait le faire. Le réalisateur a d’ailleurs avoué penser que plus personne n’oserait, dans le milieu hollywoodien, oser faire tenir un pareil comportement à son personnage principal. Bouleversant, le personnage interprété par Richard Dreyfuss l’est au moins autant que la bande-son de John Williams, base de montage du film par Spielberg, ou la messianique arrivée du vaisseau, merveille d’effets spéciaux si révélatrice de ce qui fait de 1977 la plus grande année de la science-fiction au cinéma.

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L'Empire contre-attaque (1980)
L'Empire contre-attaque (1980)

Film de science-fiction d'Irvin Kershner, avec Mark Hamill, Harrison Ford et Carrie Fisher

La grande idée :
la Force – mélange de philosophie bouddhiste et de mystique science-fictionnelle, incarnée par Yoda, le plus sage des petits hommes verts.

La réplique : « Je crois qu'on a un pépin. »

George Lucas contre-attaque
Intemporelle, la suite de ‘Star Wars’ représente l’exemple même de ce qui peut, sans une démesure de moyens, transformer une simple histoire de famille incestueuse en un submergeant conte spatial. Plus de 35 ans après sa sortie, l’hexalogie de George Lucas domine encore et toujours les classements de meilleurs films toutes catégories confondues, ainsi que ceux des meilleurs déguisements en soirée, des films inspoilables car vus de tous et du nombre de références placées à la minute dans les conversations quotidiennes.

Seul volet de la première trilogie à ne pas se finir par une épique bataille spatiale et l’avènement du Bien triomphant, l’’Empire contre-attaque’ vient surclasser ‘Un nouvel espoir’ et ‘Le Retour du Jedi’ en jouant dans une catégorie qui leur est diamétralement opposée. Au milieu de cette suite plutôt grand public, manichéenne à souhait et à l’humour un brin potache, ce deuxième-mais-cinquième épisode sera, comme pour tordre le cou à la Fox qui avait taxé le premier volet de « film pour enfants », celui de l’éveil spirituel, de la trahison, de la souffrance et du sacrifice, offrant au passage le plus fameux twist de l’histoire du cinéma. Pour la première fois de la série – et très certainement la seule, le producteur barbu réussit l’alliance de l’héroïsme chevaleresque des films américains des années 1940 à la science-fiction de l’après-conquête de l’espace.

Mais plus encore que pour le double retournement final et ses aspects chevaleresques, ‘L’Empire contre-attaque’ restera comme le film le plus sombre de la série, oppressant, niché dans des paysages désertiques ou inhospitaliers. Une base implacable à la richesse de cette galaxie lointaine, très lointaine, et qui fait de cette série, n’en déplaise aux fans des plus sixties ‘Star Trek’, ‘Battlestar Galactica’ ou ‘Thunderbirds’, la plus grande des épopées spatiales. Des millions de fans encostumé(e)s ne peuvent pas se tromper !

Brazil (1985)
Brazil (1985)
Film de science-fiction de Terry Gilliam, avec Jonathan Pryce, Kim Greist, Michael Palin et Robert De Niro

La grande idée : la bureaucratie n’est plus une simple nuisance, mais un incontrôlable Béhémoth.

La réplique :
« Voici le reçu pour votre mari. Et voici le reçu pour votre reçu. »

Brazil, aquarelle dans laquelle Gillian peint sa science des rêves
Dans ‘Brazil’, Jonathan Pryce n’incarne pas seulement Sam Lowry, exceptionnel quidam dont les rêves grandioses dépassent de très loin son rôle de simple maillon dans la machine à broyer imaginée par Terry Gilliam. L’acteur gallois, qui tient chez l’ancien Monty Python son premier grand rôle au cinéma, personnifie l’idée même du rêve comme arme face à l’oppression, éternelle marotte du réalisateur devenue fil conducteur de la trilogie partant de ‘Time Bandit’ en 1981 pour se finir dans l’exceptionnel échec des ‘Aventures du Baron de Munchausen’ quatre ans plus tard. Avec, bien entendu, ‘Brazil’ comme point d’orgue.

Remarquablement imaginatif, totalement surréaliste, le film décrit la lente descente aux enfers d’un modeste fonctionnaire rêvasseur pris au piège d’une société absurde et totalitaire. Décharnant le ‘1984’ d’Orwell (massacré quelques années plus tard par Michael Radford), ‘Docteur Folamour’ pour le rôle de Michael Palin et l’adaptation du ‘Procès’ de Kafka par Orson Wells, citant ‘Casablanca’ et ‘Metropolis’, ‘Brazil’ développe une esthétique que l’on retrouvera dix ans plus tard chez plusieurs très grands noms du cinéma en devenir : Tim Burton, le duo Caro/Jeunet, ou les frères Coen pour ‘Barton Fink’ et ‘Le Grand Saut’. Tout simplement révolutionnaire.

Non-content de poser les bases de ce qui deviendra également le mouvement steampunk (quoi que l’on pense de celui-ci), Gilliam, en moquant le totalitarisme, dresse également un remarquable portrait des craintes quotidiennes sous l’ère Thatcher. Les rêves mécaniques de Lowry, borne de départ onirique du film, rappellent les espoirs ouvriers brisés par une Angleterre qui n’a pas manqué de réaliser sa prophétie : presque aussi froide et anxiogène que les décors du film, volontairement gigantesques mais néanmoins fermés. Un cauchemar devenu réalité.

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Metropolis (1927)
Metropolis (1927)
Film de science-fiction de Fritz Lang, avec Alfred Abel, Brigitte Helm et Gustav Fröhlich

La grande idée : le chef-d’œuvre de Fritz Lang comme matrice de toute la science-fiction à venir – entre robots, scientifiques fous, mégapoles et cauchemars dystopiques.

La réplique : « Il ne peut y avoir d’entente entre la main et la tête, à moins que le cœur n’en soit le médiateur. »

La pierre angulaire de la SF
« J’ai récemment vu le film le plus idiot qui soit », écrivait HG Wells, l’auteur de ‘La Guerre des mondes’, en 1927 dans le New York Times. D’ailleurs, il n’était pas seul : les critiques furent généralement acerbes à l’égard du monument épique de Fritz Lang à sa sortie. Pourtant, le temps leur donna tort et ‘Metropolis’ est sans doute devenu, au fil des ans, le film de science-fiction le plus influent de l’histoire du cinéma. Dans une cité futuriste bondée, Freder, le fils d’un riche industriel, tombe éperdument amoureux d’une fille des bas-fonds où les ouvriers se tuent à la tâche pour la classe dominante, vivant dans la ville haute.

Impossible sans doute de venir à bout de la richesse de ‘Metropolis’ et de ses échos futurs : la machine M, divinité sacrificatrice et mécanique, aura par exemple clairement influencé le C-3PO de ‘Star Wars’, tout comme les Replicants de ‘Blade Runner’. De même, les gratte-ciels et les autoroutes surélevées du film de Lang se retrouvent dans la majeure partie des architectures futuristes. Dans son article de l’époque, Wells se moquait de la description faite par Lang du prolétariat de ‘Metropolis’, estimant que la technologie abolirait la misère des classes les plus défavorisées. Pourtant, près de 90 ans plus tard, la critique sociale portée par le film de Lang n’a pas perdu une once de son acuité. L’un des films de science-fiction les plus visionnaires jamais réalisés.

Stalker (1979)
Stalker (1979)
Film de science-fiction d'Andreï Tarkovski, avec Alexandre Kaïdanovski, Alisa Freindlich, Anatoli Solonitsyne et Nikolaï Grinko

La grande idée : la Zone – un lieu où les lois de la physique s’effondrent et où l’humanité pourrait accomplir ses désirs. Enfin, d’après ce qu’on en raconte…

La réplique : « La Zone doit être respectée. Sinon, elle te punira. »

Gare à tes désirs
‘Stalker’ a beau être librement adapté d’un roman de science-fiction (‘Pique-nique au bord du chemin’ de Boris et Arcadi Strougatski), il n’empêche qu’il pousse la définition du genre bien plus loin que n’importe quel film de cette liste. L’histoire suit trois hommes, un scientifique curieux, un écrivain retors en panne d’inspiration et un « stalker », sorte de guide permettant aux deux autres de pénétrer au sein de la Zone. Empreinte laissée par le passage d’une puissance extra-terrestre, celle-ci promettrait de réaliser les rêves de ceux qui en domptent l’esprit.

Mais au fond, comme dans l’ensemble de l’œuvre de Tarkovski, l’intrigue compte ici moins que l’atmosphère, mystérieuse, triste et hantée, qui offre au spectateur un ample espace de contemplation où explorer ses propres sentiments. En outre, ‘Stalker’ est peut-être le film le plus sombre du cinéaste russe. Et il est difficile de ne pas voir cette Zone, terre promise qui se révèle être un enfer post-industriel à l’abandon, comme une métaphore, sauvage et désolée, des utopies soviétiques. Encore qu’une lueur d’espoir semble scintiller dans sa vertigineuse dernière séquence.

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Aliens, le retour (1986)
Aliens, le retour (1986)
Film de science-fiction de James Cameron, avec Sigourney Weaver, Michael Biehn et Carrie Henn

La grande idée : l’exosquelette, qui permet à Weaver d’affronter la gigantesque reine des Aliens.

La réplique : « Ne la touche pas, sale pute ! »

Mauvaises mères
Trois décennies après sa sortie, ‘Aliens, le retour’ ressemble toujours à un petit miracle. Comment James Cameron, qui sortait certes de 'Terminator', mais surtout du très mauvais 'Piranha 2', a-t-il pu réussir à faire de l’un des plus inventifs films de science-fiction jamais réalisé une suite encore plus jouissive et intense ? Incisif, enchaînant les situations à la vitesse de l’éclair, le script du deuxième volet des aventures d’Ellen Ripley réussit à proposer des répliques cultes tout en tenant un rythme infernal, avec un budget total à peine suffisant pour le catering de son futur ‘Avatar’.

Evidemment, le plus gros du film provient directement du premier épisode : les créatures bien sûr, mais aussi les poursuites labyrinthiques, les histoires de grosses corporations et l’héroïne déchaînée contre son acide ennemi. Mais Cameron ne se contente pourtant pas de piocher les idées dans le premier ‘Alien’, allant également en grappiller quelques-unes du côté de ‘Blade Runner’, mais aussi dans les films sur le Vietnam du tournant des années 1980 pour les dialogues, ainsi que des pans entiers de l’esthétique des comic books du moment, prenant soin au passage d’améliorer et d'imbriquer au projet final chacun de ces apports avec une telle perfection que l’on croirait cette série la sienne. Chaque personnage, chaque petit détail en profite pour prendre une ampleur supplémentaire. L’équipage, voué à la mort dès le générique, y gagne en identité, tandis que Ripley, quasiment mère, ose affronter frontalement son ennemie devenue reine des Aliens, au travers d'un colossal exosquelette.

Dans sa filmographie, Cameron n’a jamais su pour l’instant réitérer l’exploit. Ses films suivants possèdent de bons passages, mais, à l’image de Ridley Scott et de son premier ‘Alien’, aucun ne saura jamais surpasser celui-ci. Si tant est qu’il ne nous aurait laissé qu''Aliens, le retour’ derrière lui, le réalisateur n’en serait pas moins une légende, tant cet épisode foudroie par sa magnitude. Un film brûlant comme le mythique lance-flamme de la série.

Terminator 2 : Le Jugement dernier (1991)
Terminator 2 : Le Jugement dernier (1991)

Film de science-fiction de James Cameron, avec Arnold Schwarzenegger, Linda Hamilton et Edward Furlong

La grande idée : faire de l'atroce cyborg du premier épisode le sauveur de l'humanité dans le suivant.

La réplique (en VO) : « I'll be back. »

Vous êtes Sarah Connor ?
Le deuxième volet de 'Terminator' meilleur que le premier ? C'est l'évidence, tant James Cameron atteint des sommets avec ce second volet. Alors que le premier 'Terminator' fut réalisé pour une bouchée de pain (6,5 millions de dollars) par un jeune cinéaste, la suite bénéficie de gros moyens financiers et surtout du progrès des effets spéciaux. Grâce aux images de synthèse, Cameron peut donner vie à un T1000 à la fois magistralement incarné par le terrifiant Robert Patrick, et en même temps d'une fluidité évanescente qui lui permet de se transformer en quasi n'importe qui ou quoi. Mais le vrai coup de génie du film, c'est d'avoir transformé le méchant du premier film, Arnold Schwarzenegger, en héros protecteur, un tour de force narratif et une façon originale d'enrichir un personnage.

Lire aussi : 20 suites de films meilleures que l'original

Guide du film de science-fiction : 11-20

Star Wars (1977)
Star Wars (1977)

Film de science-fiction de George Lucas, avec Mark Hamill, Carrie Fisher, Harrison Ford et Peter Cushing

La grande idée : réaliser un grand film d’heroic-fantasy rempli de droïdes, d’hyperespace et de sabres-laser avec les moyens d’un modeste film de cape et d’épée.

La réplique : « Toutes ces croyances à la noix et ces armes démodées, ça ne vaut pas un bon pistolaser. »

Une galaxie pas si lointaine
Chef-d’œuvre d’ingéniosité et de créativité, ‘Star Wars : un nouvel espoir’ est, avant toute question de réussite commerciale, le succès d’un réalisateur ingénieux. Ce premier volet de la saga familiale des Skywalker, tourné avec un budget ridicule par un réalisateur de films indépendants, projeté aux producteurs rehaussé d’images de films de guerre faute d’effets spéciaux pour la grandiose séquence finale, n’aurait, sur le papier, jamais dû rencontrer un tel succès. Avant sa sortie, George Lucas lui-même ne croyait plus en cette épopée de cape et d’épée complètement bricolée qui deviendra finalement le premier blockbuster à parcourir l’hyperespace. Un tel succès, bien sûr, n’aurait jamais pu voir le jour sans une profondeur d’écriture insaisissable au premier abord. Citant Kurosawa à de multiples reprises, s’inspirant de Tolkien et de HG Wells pour créer l’ensemble de personnages et de machines parcourant son monde merveilleux, Lucas poussera l’immersion à un degré tel que l’ordre Jedi est aujourd’hui reconnu comme la sixième religion d’Angleterre. Une preuve de plus du succès du film bien au-delà des chiffres. Seul Lucas y trouvera finalement à redire, voire à maugréer. Peiné par tant de difficultés à mettre son film en boîte, le réalisateur ne touchera plus une caméra jusqu’au tournage de l’épisode I en 1999.

  • Cinéma
  • Epouvante-horreur

Film de science-fiction de John Carpenter, avec Kurt Russell, Wilford Brimley et Keith David

La grande idée : un alien à l'apparence humaine, ça n'a rien de neuf. Mais celui-ci se métamorphose comme personne d'autre.

La réplique : « La confiance met du temps à s'installer, ces temps-ci. »

La chose venue du froid
Parmi le cortège de possibilités alléchantes qu’un voyage dans le temps pourrait permettre, on se dit qu'on aimerait bien profiter d’un détour pour aller dire au John Carpenter de 1982 qu'un jour, son nouveau film serait à la fois reconnu comme l’un des plus grands films de science-fiction et d'horreur jamais réalisés. Car comme nombre de futurs classiques, ‘The Thing’ fut d'abord boudé, critiqué comme un vague clone d’’Alien’, plus intéressé à repousser les limites des effets spéciaux. La réception du film fut donc un flop désastreux, menaçant la réputation de Carpenter, pourtant alors reconnu comme maître de l'horreur. Mais avec le recul, cette angoissante histoire de mal intérieur et de créature métamorphe, perdue dans l'environnement inhumain de l'Antarctique, en est arrivée à poser certains des jalons essentiels du cinéma de SF et d'angoisse contemporain.

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Solaris (1972)
Solaris (1972)

Film de science-fiction d'Andreï Tarkovski, avec Natalia Bondartchouk, Donatas Banionis et Jüri Järvet

La grande idée : l’intelligence extra-terrestre pourrait ne pas avoir la forme que nous imaginons. Et ses intentions dépasser de loin notre compréhension.

La réplique : « Nous ne voulons pas d’autres mondes, nous voulons un miroir. »

L’espace mental
Si elle inspira en 2002 un remake à Steven Soderbergh, cette adaptation mélancolique du roman futuriste de Stanislas Lem par Andreï Tarkovski est également souvent rapprochée du ‘2001, l’Odyssée de l’espace’ de Stanley Kubrick. On y suit Kris Kelvin (Donatas Banionis), un scientifique désespéré, hanté par la mort de sa femme. Après un prologue halluciné à travers une métropole d’un autre monde, Kelvin séjourne à bord d’une station spatiale en orbite autour de la planète Solaris – qui aurait apparemment le pouvoir de ressusciter les morts. Mais au moment où son épouse (Natalia Bondartchouk) réapparaît mystérieusement, les événements prennent une tournure de plus en plus étrange. Moins intéressé par les règles du genre que par la création d’une atmosphère profondément suggestive, la maître du cinéma russe livre une œuvre unique sur l’amour, le deuil et la mémoire.

  • Cinéma
  • Drame

Film de science-fiction d'Alfonso Cuarón, avec Clive Owen, Julianne Moore et Michael Caine

La grande idée : et si l’humanité devenait inexplicablement stérile ?

La réplique : « Votre enfant est le miracle que le monde entier attendait. »

Baby shower
Impossible de regarder ‘Les Fils de l’Homme’ sans un sentiment trouble, à la fois cauchemardesque et familier. Le Londres qu’il dépeint en 2027 ressemble à s’y méprendre à celui d’aujourd’hui, en juste un peu plus sale, moche et lugubre. Réalisé par l’ambitieux Alfonso Cuarón d’après le roman de PD James, ce thriller socio-politique montre Clive Owen dans un futur dystopique où les humains, malgré leurs efforts, ne parviennent plus à se reproduire. La réussite du film tient notamment à la manière dont Cuarón filme son récit comme un reporter de guerre, avec un réalisme à couper le souffle.

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  • Cinéma
  • Fantastique
La Jetée (1962)
La Jetée (1962)

Film de science-fiction de Chris Marker

La grande idée : une poésie multidimensionnelle sur un simple (mais puissant) ensemble de diapositives.

La réplique : « Rien ne distingue les souvenirs des autres moments : ce n’est que plus tard qu’ils se font reconnaître, à leurs cicatrices. »

Monument minimal
Pour quiconque s'intéresse au cinéma, à la vidéo ou la photo (en un mot, aux images), le dispositif de 'La Jetée' se révèle immédiatement passionnant : une série d'images fixes, de photos noir et blanc, sont projetées sur l'écran comme des diapositives, tandis qu'une voix-off narre la formidable fable d'anticipation qu'elles illustrent. Or, ce parti pris radical et a priori austère, cette définition ultra minimale d'un cinéma dépourvu de mouvements, c'est précisément ce qui donne au film sa densité méditative et sa formidable ouverture. Entre philosophie et poésie, ce petit chef-d’œuvre de 29 minutes est impossible à résumer. Et si réaliser un film de science-fiction aussi novateur et profond, à partir de simples diaporamas et d'un texte était un pari risqué, la forme de 'La Jetée' apparaît pourtant comme une évidence, mieux adaptée à son récit que les effets spéciaux de 'L'Armée des douze singes" (pour lequel Terry Gilliam s'inspira ouvertement du film de Marker, sans jamais tout à fait tenir la comparaison). Enfin, inutile d'en dire plus : 'La Jetée' est un court métrage suffoquant de beauté et une leçon de cinéma incontournable, qui, à plus de 50 ans, n'a pas pris une ride.

Interstellar (2014)
Interstellar (2014)

Film de science-fiction de Christopher Nolan, avec Matthew McConaughey, Anne Hathaway, Jessica Chastain et Michael Caine

La grande idée 
: exploiter le concept des « trous de ver », permettant de passer d’un espace-temps à un autre à travers le cosmos.

La réplique : « On avait l’habitude de regarder le ciel en nous interrogeant sur notre place parmi les étoiles. Maintenant, on baisse les yeux en nous demandant où nous situer dans la crasse. »

L’Odyssée de l’espèce
S’il peut paraître étrange de retrouver ‘Interstellar’ parmi ces 50 meilleurs films de science-fiction alors qu’il vient tout juste de sortir, c’est que le film de Christopher Nolan s’impose immédiatement comme un classique du genre, foisonnant et assez old school (refus de la 3D et des fonds verts, abondance de décors naturels, etc.). Visuellement admirable, sous la double influence de Kubrick (‘2001’) et de Tarkovski (‘Solaris’, en particulier) avec des bouts d''Alien' et 'Star Wars' dedans, ‘Interstellar’ reste avant tout un film de Christopher Nolan, où l'on retrouve tous ses thèmes de prédilection, à commencer par une mélancolie sourde et par la question de la filiation, de la trace laissée à ses proches, en particulier à ses enfants. Alors, peut-être y a-t-il trop de dimensions dans ‘Interstellar’… Mais au fond, ça tombe bien, puisque c’est toute la question du film (eh oui, ceci est bien un jeu de mots sur la physique quantique). Sans doute l'un des derniers classiques de la SF pour ce monde-ci. Lire la critique complète.

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Moon (2009)
Moon (2009)

Film de science-fiction de Duncan Jones, avec Sam Rockwell, Robin Chalk et Kevin Spacey

La grande idée : personne n’est irremplaçable, même sur la Lune.

La réplique : « J’espère que la vie sur Terre est vraiment telle que tu t’en souviens. »

Science-fiction de poche
Pour un premier film, ‘Moon’ a tout du coup de maître. Son père David Bowie faisait déjà voyager ses fans vers de lointaines contrées dans ‘Space Oddity’ et ‘Ziggy Stardust’ ; Duncan Jones poursuit l’odyssée avec ce long métrage de SF minimaliste et intimiste. De la « SF de poche », pourrait-on dire, qui fait beaucoup avec peu : des moyens limités pour un long métrage situé dans l’espace (5 millions de dollars seulement), un acteur principal et presqu’unique. Mais voilà, Jones a de bonnes idées, dont celle de donner le premier rôle à l’impressionnant Sam Rockwell. Ou plutôt aux Sam Rockwell. Employé par l’entreprise Lunar pour extraire de la matière première sur la Lune, Sam Bell souffre de l’isolement et de l’éloignement d’avec sa famille. Il attend patiemment la fin de sa mission et son retour sur Terre, avec pour seul compagnon un robot à son service. Dès les premières minutes, calmes et comme en apesanteur, l’atmosphère ouatée nimbe le film d’un halo d’irréalité. L’empathie envers le sympathique Sam est immédiate, et si l’on pense inévitablement à ‘2001’, ‘Moon’ évoque étrangement un autre Kubrick : ‘Shining’, cette fois transposé sur la Lune, avec une folie qui ne peut jamais vraiment s’exprimer, et personne à assassiner. Froid, captivant et redoutablement bien mené, ‘Moon’ est une excellente alternative à la SF tapageuse et démonstrative.

  • Cinéma
  • Science-fiction
Matrix (1999)
Matrix (1999)

Film de science-fiction d'Andy et Larry Wachowski, avec Keanu Reeves, Laurence Fishburne et Hugo Weaving

La grande idée : la question existentielle n’est plus de savoir quel est le sens de la vie, mais si celle-ci n’est pas une simple illusion.

La réplique : « N'envoyez jamais un humain faire le travail d'un programme. »

Et si on se tirait dessus au ralenti ?
Le bug de l’an 2000 a beau être l’une des angoisses les plus risibles de l’histoire de l’humanité, il sied au film ‘Matrix’ comme un gant en néoprène noir, c’est-à-dire près, très près du corps. Ultime expression de la paranoïa humaine, point culminant du cyberpunk numérique, ce film de cyber-action des frères Wachowski, mené tambour battant par un Keanu Reeves plus rapide que les balles de ses adversaires, ne fait pas que questionner le sens de la vie. Il en interroge son existence même. Mélangeant kung-fu en combinaison de latex noire, effets spéciaux briseurs de colonnes vertébrales, peur phobique des nouvelles technologies sur un fond vert fluo de techno industrielle sans saveur, ‘Matrix’ se révèle être, en compagnie de ‘Fight Club’, le film ultime de la fin des années 1990 ; daté, certes, mais toujours extrêmement jouissif à revisionner. Ses suites ont beau l’avoir totalement ridiculisé en faisant notamment apparaître Wilson Lambert au générique, ‘Matrix’ fut, pendant au moins quatre ans, l’image unanimement partagée comme étant celle du futur.

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  • Cinéma
  • Epouvante-horreur
La Mouche (1986)
La Mouche (1986)

Film de science-fiction de David Cronenberg, avec Jeff Goldblum et Geena Davis

La grande idée : le télépode  le futur de la téléportation à condition que son créateur résolve quelques bugs...

La réplique : « Je suis un insecte qui a rêvé qu'il était un homme. Mais désormais le rêve est fini, et l'insecte bien là. »

Bzzzzzzzzz...
Délirante reprise par David Cronenberg d'un canevas de la science-fiction (où un scientifique voit ses expériences de téléportation se solder par un vilain quiproquo génétique), 'La Mouche' n'est pas seulement un film d'horreur fantastique des plus élégants : c'est aussi l'une des histoires d'amour les plus tragiques du septième art. La relation, charmante, hésitante, magnifiquement écrite, entre Jeff Goldblum et Geena Davis, commence en effet comme une fragile romance du cinéma classique… ce qui ne rend que plus atroce la dégradation physique et mentale à laquelle le film va peu à peu soumettre Goldblum. Aussi, entre les mains de Cronenberg, la maladie génétique devient-elle une puissante métaphore de tout mal intérieur imaginable, qu'il s'agisse du cancer, du sida, de la vieillesse, ou encore de l'amour perdu, du désespoir sentimental… Superbe, écœurant, exaltant, sauvage, inspirant et inspiré, 'La Mouche' est un film humaniste et paradoxal, dont l'humain lui-même tend à disparaître. Et c'est aussi certainement l'une des plus grandes réussites de son réalisateur, alors à l'apogée de son art.

Planète interdite (1956)
Planète interdite (1956)

Film de science-fiction de Fred M. Wilcox, avec Walter Pidgeon, Anne Francis et Leslie Nielsen

La grande idée : aussi développée que peut être une civilisation, elle finit toujours par courir à sa propre perte.

La réplique : « Qui aurait cru que sa cervelle de singe contiendrait les secrets des Krell. »

Freud et Shakespeare mis en orbite
Librement inspiré de ‘La Tempête’ de Shakespeare, ‘Planète interdite’ fut, en 1956, le premier film de science-fiction hollywoodien à s’extirper de la série B comme « Bêtement anticommuniste ». Et il existe tellement de différences entre ce film et ses contemporains, que l’on peine à croire que celui-ci sortit si tôt. De la race alien télépathe disparue sous ses vertigineuses ambitions à l’homme consumé par sa passion pour Freud incapable de laisser sa fille grandir, ‘Planète interdite’ a su renvoyer toutes les productions contemporaines et leurs scénarios bancals au statut de simples coups d’essai. Egalement porté par une bande-son expérimentale, des effets spéciaux particulièrement réussis pour l’époque et une ironie de tous les instants incarnée par le robot Robbie (« Sorry, miss. I was giving myself an Oil-Job. ») et son équipage de spationautes lassés, le film finira par résister comme rarement à l’épreuve du temps dans un genre très vite daté. Mieux que son interprète principal, Leslie Nielsen, qui adoptera le costume de Pierre Richard nord-américain dans la série des ‘Y a-t-il un pilote dans l’avion ?’.

Guide du film de science-fiction : 21-30

Retour vers le futur (1985)
Retour vers le futur (1985)
Film de science-fiction de Robert Zemeckis, avec Michael J. Fox, Christopher Lloyd, Lea Thompson et Crispin Glover

La grande idée : faire de la DeLorean, un retentissant échec commercial, la voiture la plus cool pour voyager dans le temps.

La réplique : « Quitte à voyager dans le temps au volant d'une voiture, autant en choisir une qui ait de la gueule ! »

Le futur dans le rétro
Derrière chaque grand film de science-fiction, sous une large couche de sabres lasers, de portes papillons et d’exosquelettes en acier indestructibles, se cache avant tout un script génial. Florilège de tirades et de personnages comme seules les années 1980 ont su en produire – pensez à cet idiot de Biff Tannen –, la trilogie ‘Retour vers le futur’, née du travail commun de l’écrivain Bob Gale et du réalisateur Robert Zemeckis, déchainera ainsi les passions et les entrées au box-office avec pas grand-chose de plus qu’un bon paquet de blagues et un concept fumeux. Avec un Michael J. Fox au sommet de sa gloire juvénile, splendide de naïveté et de décontraction dans son rôle de Marty McFly. Il n’en fallait de toute façon pas beaucoup plus. Prônant la hardiesse au même niveau que la débrouillardise, le je-m’en-foutisme et les joies du rock'n’roll dans la meilleure scène de bal jamais vue au cinéma, le jeune vaurien embarque le doux-dingue Emmett Brown dans une fable d’où sortent vainqueurs les trouillards, les marrants et les hoverboards du second épisode. Et la DeLorean, entrée dans la légende.

L'Armée des douze singes (1995)
L'Armée des douze singes (1995)

Film de science-fiction de Terry Gilliam, avec Bruce Willis, Madeleine Stowe et Brad Pitt

La grande idée : reprendre le concept de ‘La Jetée’ de Chris Marker et d’un temps tragique immuable, pour y plonger Bruce Willis et Brad Pitt.

La réplique : « Il n’y a ni justice, ni injustice, il n’y a que l’opinion populaire. »

Mais de quoi tu parles, Willis ?
Sans rester comme un sommet de la science-fiction à la ‘Brazil’, l’autre chef-d’œuvre du genre qu’on doit au Monty Python Terry Gilliam, cette ‘Armée des douze singes’ conserve un charme singulier, étrange et déboussolant. Bruce Willis y incarne un criminel de seconde zone sur une Terre rongée par la maladie, renvoyé dans le passé afin d’observer les racines de l’épidémie. En chemin, il tombe amoureux de Madeleine Stowe (c’est de bonne guerre) et se fait enfermer dans un asile de fous furieux, où il rencontre Brad Pitt dans l’un de ses meilleurs rôles, en éco-terroriste illuminé et ultra-nerveux. Inspirée de ‘La Jetée’ de Chris Marker, l’intrigue surréaliste de Gilliam part un peu dans tous les sens, mais avec de quoi agréablement pulvériser le cerveau du spectateur. De plus, ‘L’Armée des douze singes’ reste l’occasion de voir Bruce Willis porter une perruque blonde et un t-shirt hawaïen – ce qui représente un joli bonus.

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E.T. l'extra-terrestre (1982)
E.T. l'extra-terrestre (1982)
Film de science-fiction de Steven Spielberg, avec Dee Wallace, Henry Thomas et Drew Barrymore

La grande idée : créer une interaction sentimentale forte entre un enfant et un extra-terrestre.

La réplique : « Je suis toujours là. »

Vers la Lune et au-delà
L’histoire est connue. Sur le plateau de ‘Rencontres du Troisième Type’, François Truffaut clame que Spielberg devrait abandonner les vaisseaux spatiaux pour se mettre à filmer des enfants. S’il a bien entendu la deuxième partie de la phrase, Spielberg décide de faire fi de la première pour réaliser ce qui restera comme le film le plus vu au box-office mondial, avant de se dépasser lui-même avec 'Jurassic Park'. Toujours obsédé par la famille idéale et le rire des enfants, le réalisateur raconte l’arrivée pacifique sur terre d’un extra-terrestre botaniste et son adoption par une famille en pleine crise. Bien moins clément avec les humains que son précédent ‘Rencontres du Troisième Type’, ‘E.T. l’extra-terrestre’ n’en reste pas moins un excellent divertissement familial ponctué de scènes mémorables, comme l’enlèvement de la petite créature et son ultime traversée du ciel, à classer du côté du quatrième épisode de la série ‘Star Wars’ à qui il adresse d’ailleurs plusieurs clins d’œil. Bien involontairement le plus grand succès commercial de Truffaut.

RoboCop (1987)
RoboCop (1987)

Film de science-fiction de Paul Verhoeven, avec Peter Weller, Nancy Allen et Ronny Cox

La grande idée : les nouvelles technologies vont s’imposer à tous les aspects de notre vie quotidienne, y compris le respect de la loi.

La réplique : « Tu vas te rendre, crapule ! »

La loi, c’est lui
A force de visionner des films de science-fiction, nous connaissons tous la fin du film : le futur sera vicieux, odieux même, et la Terre plus pauvre et plus violente. Les grandes fortunes vont se cacher dans de belles résidences avec vue sur la misère du monde tandis que la plèbe va devoir se frayer un passage dans des rues peuplées de clochards mangeant des rats à la broche. Après tout, si c’est dans un film, c’est que c’est vrai. La seule chose qui reste à l’humanité est donc l’espoir de voir surgir rapidement RoboCop, capable seul de nettoyer les rues de Détroit dans le futur extrêmement satirique et dystopique de Paul Verhoeven. Le film, sorti en 1987, ne brille pas uniquement par son humour omniprésent. Il symbolise toujours et encore les gouvernants assoiffés de pouvoir et les réseaux de corruption organisés à l’échelle d’une ville entière. Sombre et extrêmement violent, 'RoboCop' présente à peu de détails près ce qui pourrait être le pire des futurs imaginables, et il semble bien ne rien y avoir à faire contre ça. Si ce n’est prier pour sa venue le plus rapidement possible.

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L'Invasion des profanateurs de sépultures (1956)
L'Invasion des profanateurs de sépultures (1956)

Film de science-fiction de Don Siegel, avec Kevin McCarthy, Dana Wynter et King Donovan

La grande idée : est-ce qu'un classique film de propagande antisoviétique ne pourrait pas aussi être une critique du maccartysme ?

La réplique : « Ils sont déjà là ! Vous êtes le prochain ! Vous êtes le prochain ! »

Coucher avec l'ennemi
S'agit-il d'une satire futée du conformisme et du consumérisme américain, ou d'une parabole réac sur l'infiltration rampante du communisme aux Etats-Unis ? C'est certainement cette ouverture, cette indécision qui a rendu si durable cette adaptation de l'angoissant roman de Jack Finney par Don Siegel. Mais au fond, tout cela ne serait pas grand-chose sans le caractère extrêmement divertissant et dynamique du film. Bien sûr, le côté col blanc coincé des années 1950 a pris un sérieux coup de vieux  surtout quand des scientifiques à pipes s'en mêlent , mais ce côté vintage ne manque pas de contribuer au charme décalé et fantastique du long métrage. Jusqu'à sa fin explosive, l'une des plus sombres du cinéma de science-fiction, et diablement audacieuse pour son époque.

La Planète des singes (1968)
La Planète des singes (1968)

Film de science-fiction de Franklin J. Schaffner, avec Charlton Heston, Roddy McDowall et Kim Hunter

La grande idée : les singes sont ici le miroir des hommes : les pires des animaux.

La réplique : « Enlève tes pattes puantes de là, espèce de singe ! »

Gare au gorille
Rod Serling, le créateur de la série ‘The Twilight Zone’, travailla sur l’une des premières moutures du script, inspiré par le roman éponyme de Pierre Boulle. Et il n’y a pas à dire : on nage effectivement en pleine « quatrième dimension ». Astronaute américain cynique, George Taylor (Charlton Heston) débarque ainsi sur une planète dont les grands singes constituent l’espèce dominante, et où les humains se voient réduits à n’être que des animaux stupides. Taylor se lie alors avec deux scientifiques chimpanzés, qui vont l’aider à s’enfuir vers la Zone Interdite, où l’attend une surprise encore plus détonante. Récit d'aventure aux costumes impressionnants pour l'époque, ‘La Planète des singes’ fait aussi partie de ces films de science-fiction qui eurent une influence considérable sur la culture populaire américaine, occasionnant de nombreuses suites et parodies  qui n'en retrouvèrent jamais le charme vintage.

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A.I. Intelligence Artificielle (2001)
A.I. Intelligence Artificielle (2001)
Film de science-fiction de Steven Spielberg, avec Haley Joel Osment, Jude Law et Frances O'Connor

La grande idée : une exploration de la morale humaine et de notre culture du jetable.

La réplique : « Les humains… Rien ne peut les arrêter. »

Assez d’enfantillages
Au commencement était un projet pour Stanley Kubrick. Un conte situé dans un futur proche, basé sur la nouvelle de Brian Aldiss racontant l’histoire d’un garçonnet robotique programmé pour aimer. Le réalisateur new-yorkais, finalement peu convaincu, laissera l’idée à son compatriote Spielberg, qu’il jugeait plus à même de mener cette histoire à bon port. Après le décès du maître de la science-fiction en 1999, celui-ci en fît un hommage a son ami disparu. Kubrick, bien entendu, avait une fois de plus raison. Ce David, au visage si délicat, est l’incarnation suprême du héros spielbergien, un être coincé à jamais dans l’enfance et les caprices de sa mère de substitution, qui l’adopta pour mieux l’abandonner. Les circonstances, ici la rébellion des Hommes face aux machines, pousse le jeune robot à parcourir le monde pour découvrir son véritable géniteur. Un périple cauchemardesque calqué sur le conte de ‘Pinocchio’ incluant Jude Law en gigolo d’acier, une fête de la décroissance avant l’heure, une visite de Manhattan immergé et un climax tout spielbergien. En deux mots ? Controversé et spectaculaire.

Le jour où la Terre s'arrêta (1951)
Le jour où la Terre s'arrêta (1951)
Film de science-fiction de Robert Wise, avec Michael Rennie, Patricia Neal et Hugh Marlowe

La grande idée : l'imposant et inarrêtable robot Gort. Imaginez T2000 en plus balaise avec un côté bienveillant.

La réplique : « Klaatu barada nikto ! »

Le nucléaire ? On fera sans
1950 a clairement marqué une nouvelle aube pour la science-fiction hollywoodienne, marquée par trois films alors en production : ‘Destination Moon’, ‘The Thing from Another World’ et le désormais classique ‘Le jour où la Terre s’arrêta’. Le film de Robert Wise a défini le genre en tellement de points, comme la bande-son tout en thérémine de Bernard Herrmann, la standardisation de la soucoupe volante comme récipient servant à voler pour les extra-terrestres, l’aspect du robot Gort qui marquera deux décennies de robots-ménagers et la meilleure tirade en langue extra-terrestre. Cependant, outre ces quelques détails devenus bien plus drôles qu’ils ne l’étaient à l’origine, le film se base sur la réponse que l’humanité donnerait à une apparition pacifique d’une civilisation inconnue, évidemment hostile. Face à elle, le robot et son maître-chien décidé à se venger et à notamment faire s’arrêter le monde entier pendant 30 minutes. Tirer en premier n’était vraiment pas une bonne idée.

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  • Cinéma
  • Fantastique
Bienvenue à Gattaca (1997)
Bienvenue à Gattaca (1997)

Film de science-fiction d'Andrew Niccol, avec Ethan Hawke, Uma Thurman et Jude Law

La grande idée : dans un futur proche où les données génétiques décident du statut social, un jeune homme ambitieux décide de rompre le statu quo.

La réplique : « Désormais, nous avons fait de la discrimination une science. »

Quand les gènes gênent
Rêvant de rejoindre l’élite des astronautes d’une société eugéniste, Ethan Hawke se retrouve à devoir tricher lors de multiples tests génétiques : empreintes digitales, tests sanguins et urinaires, relevé d’ADN… Dans ce meilleur des mondes, oppressant et tyrannique, mis en scène par Andrew Niccol, une enquête sur un homicide – a priori sans rapport avec l’intrigue principale – menace de dévoiler la mascarade existentielle et les plans secrets de son héros. Un récent classique de la SF, doublé d’une irrésistible montée en tension dramatique.

Silent Running (1972)
Silent Running (1972)

Film de science-fiction de Douglas Trumbull, avec Bruce Dern, Cliff Potts et Ron Riefkin

La grande idée : l’humanité va tellement démolir sa planète que l’on sera bientôt forcés d’embarquer les derniers espaces verts avec nous dans le cosmos.

La réplique : « Il n’y a plus de beauté et il n’y a plus d’imagination. Il n’y a plus de frontière à conquérir. »

Jardins suspendus
Au cours des années 1970, les hippies étaient vraiment partout, y compris à l’écran et jusqu’aux tréfonds de notre univers. Dans un futur qui a vu la flore disparaître d’une planète Terre à laquelle la science-fiction n’a vraiment rien épargné, une poignée de vaisseaux spatiaux servent de jardins biologiques pour les quelques espèces sauvées de l’extinction totale. Avec l’espoir, à terme, de revégétaliser une planète bleue plus vraiment très verte. Mais les pilotes se voient confiés l’ordre de détruire les serres pour reprendre des missions commerciales bien plus convenables. Freeman Lowrell, contrairement à ses confrères ravis de retrouver la terre ferme, décide de désobéir et de préserver ses serres en compagnie de quelques droïdes bipèdes et joueurs de cartes. Le peace and love ne suffisant pas, Lowrell n’hésite pas à tuer ceux s’opposant à sa volonté de préservation. Aussi daté que Joan Baez (dont la voix parcourt l’espace du film), ‘Silent Running’ fait preuve de trop de naïveté pour concurrencer un ‘2001, l’Odyssée de l’espace’, dont il partage le directeur des effets spéciaux (que l’on retrouvera également sur ‘Star Trek’, ‘Blade Runner’, ‘Rencontre du Troisème Type’ et ‘Tree Of Life’), ainsi que la thématique du rapport de l’Homme à son ambition. Mais on ne peut s’empêcher d’en goûter le final, autrement plus cynique, deuxième mort pour le rêve hippie.

Guide du film de science-fiction : 31-40

Akira (1988)
Akira (1988)

Film de science-fiction de Katsuhiro Ōtomo (animation)

La grande idée : mêler SF post-apocalyptique, drogues de synthèse, sectes gouvernementales et tourments de l'ego adolescent.

La réplique : « Ce n'est pas votre ami, c'est le nôtre. Si quelqu'un doit le tuer, il faut que ce soit nous. »

Pandemonium dystopique
Difficile de retranscrire l'énorme claque que fut 'Akira' en France, à sa sortie en 1991, pour les gamins alors âgés d'une douzaine d'années. Loin des versions censurées des mangas alors présentés à la télé, le chef-d'œuvre post-apocalyptique de Katsuhiro Ōtomo semblait évoquer pour le première fois sans détour la violence des mégapoles, la délinquance, la drogue, le sexe, la corruption, le pourrissement du pouvoir... En outre, l'animation d''Akira' reste, aujourd'hui encore, d'une impressionnante fluidité, notamment à travers ses inoubliables courses-poursuites en moto. Seul bémol : le film fut réalisé alors que le manga papier n'était pas encore terminé. Du coup, une bonne partie du scénario  alors encore en cours d'écriture  manque à cette version de l'histoire. Aussi complètera-t-on cet anime par la lecture des six volumes (quatorze dans la version colorisée) de ce manga incontournable.

Inception (2010)
Inception (2010)

Film de science-fiction de Christopher Nolan, avec Leonardo DiCaprio, Ellen Page et Jospeh Gordon-Levitt

La grande idée : un rêve dans un rêve dans un rêve.

La réplique : « - Si je vous dis de ne pas penser à des éléphants, à quoi pensez-vous ? - Des éléphants. »

Dédale mental
S’il vous a donné la migraine au ciné, on ne peut que vous conseiller de le revoir chez vous, confortablement installé. Vous pourrez même faire une pause – pipi ou autre – sans (trop) perdre le fil. Car ‘Inception’ demande une attention soutenue durant 2h30 pour pleinement apprécier la complexité et la profondeur de son scénario labyrinthique, parfois confus. D’autant que Christopher Nolan n’hésite pas à imbriquer les codes de plusieurs genres cinématographiques (film d’action, thriller, drame et surtout… SF), histoire d’épaissir un propos déjà dense : une équipe de hackers mercenaires, dirigée par DiCaprio himself, est employée par un homme d’affaires pour influencer un concurrent via ses rêves. Une mise en abyme du principe de rêve lucide tenant largement ses promesses, malgré un didactisme parfois répétitif – les personnages sont eux-mêmes amenés à expliquer les procédés qu’ils utilisent pour remplir leur mission, s’adressant à travers d’autres personnages au spectateur lui-même. Une lourdeur que le rythme soutenu et le casting impeccable nous font vite oublier : Ellen Page, Joseph Gordon-Levitt, Ken Watanabe et Tom Hardy sont notamment de la partie. Au final, rarement un film grand public aura été aussi exigeant avec ses spectateurs, et on en vient même à se demander comment Nolan est parvenu à obtenir de Warner quelque 160 millions de dollars pour le réaliser – la réputation bankable de l’Anglais ayant certainement plus joué que la lecture du scénario. Un projet fou mûri pendant 10 ans, primé 13 fois, et un énorme carton au box office avec près de 5 millions d’entrées rien que pour la France : ce qu’on appelle réaliser ses rêves.

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Primer (2004)
Primer (2004)

Film de science-fiction de Shane Carruth, avec Shane Carruth et David Sullivan

La grande idée : deux geeks, depuis leur garage, peuvent changer le monde.

La réplique : « Si tu continues à creuser cet après-midi… je te montrerai en retour la chose la plus incroyable qu’un organisme vivant ait pu observer. »

La vie en boîte
Supposément tourné pour à peine 7 000 dollars, le tout premier film de l’auteur-réalisateur-éclairagiste Shane Carruth prouve que les grandes idées ne coûtent finalement pas grand-chose. Lorsque la « boîte », créée par le duo d’amis Aaron (Carruth lui-même) et Abe, réagit de manière inattendue et incompréhensible, les dilemmes se mettent à pleuvoir sur les deux ingénieurs travaillant jusqu’alors dans leur garage. Aussi bien primé à Sundance qu’au Festival de science-fiction de Londres, ‘Primer’ honore le spectateur en lui offrant un développement elliptique et implicite, ainsi qu’une admirable plongée dans l’angoisse paranoïaque de ses principaux protagonistes. Jamais totalement explicite, ce drame périurbain avance dans un climat de doute perpétuel qui force à se poser cette question toute simple, mais qu’aucun autre film du genre n’avait abordée : si votre double voyageur dans le temps est de l’autre côté de la ville et que votre femme vous appelle, quel téléphone sonnera en premier ?

L'Invasion des profanateurs de sépultures (1978)
L'Invasion des profanateurs de sépultures (1978)

Film de science-fiction de Philip Kaufman, avec Donald Sutherland, Brooke Adams et Jeff Goldblum

La grande idée : la liberté de pensée n’est rien d’autre qu’une nouvelle forme de conformité.

La réplique : « Pourquoi s’attend-on toujours à des vaisseaux en métal ? »

Oui, nous sommes des personnes à part entière
L’habituelle question de la machine à remake qu’est devenu Hollywood. Si ‘La Mouche’ ou ‘The Thing’ incarnent des exemples plus connus de franches réussites, la reprise du classique de 1956 par Philip Kaufman, réalisateur – entre autres – de ‘L’Etoffe des héros’, mérite également une mention de ce que peut être une adaptation sûre d’elle et maniant l’ironie avec maestria. Placée dans le San Francisco des années 1970, Mecque des diseurs de bonne aventure et des tenants de la théorie de l’enfant intérieur, le film révèle une pensée sardonique sur l’après-rêve hippie et ose poser la question qui fâche : et si l’humanité pouvait se passer d’émotions et de libre-arbitre ? Brooke Adams et Donald Sutherland y plantent un couple assez anodin, plutôt drôle et totalement crédible en compagnie de Jeff Goldblum et de la souffrante Veronica Cartwright, tous dominés par un sournois gourou interprété par Leonard Nomoy. Naviguant entre les doubles et la paranoïa, les deux couples finissent par sombrer et, finalement, accepter l’inacceptable. Jusqu’à la chute, inattendue et laissant le spectateur dans un sentiment de grand vide. A peu de choses près, le même que celui combattu par les humains tout au long du film.

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Mars Attacks ! (1996)
Mars Attacks ! (1996)

Film de science-fiction de Tim Burton, avec Jack Nicholson, Glenn Close et Annette Bening

La grande idée : un film volontairement niais où les humains passent pour les êtres les plus stupides de la galaxie.

La réplique : « En tout cas, ils auront pas la télé ! »

Life on Mars
En 1994 sortit ‘Ed Wood’, biopic centré sur l’homme considéré à titre posthume par deux vils critiques comme étant « le plus mauvais réalisateur de tous les temps ». Gagné petit à petit par l’esprit du fantasque transformiste, à qui il voue un incommensurable respect, le réalisateur du film Tim Burton décide de se lancer dans la réalisation d’un long métrage à-la-manière-de, sciemment aberrant, en hommage à celui qu’il venait de dépeindre avec tendresse. Deux ans plus tard, ‘Mars Attacks !’, film de série Z inspiré de cartes à jouer ayant nourri l’enfance du Californien, envahi les écrans mondiaux. Dès les premiers instants de ce qui restera comme la plus grande farce cinématographique des années 1990, Burton prouve qu’il ne compte pas y glorifier le genre humain. Derrière un casting fantastique, composé de noms précieux comme ceux de Jerzy Skolimowski, Michael J. Fox ou la jeune Natalie Portman, se cache un ramassis de personnages tout au mieux moyens, souvent minables, niais, nombrilistes, trouillards et idiots où chacun vient interpréter ce qu’il n’a jamais été : Jack Nicholson un président calme et mesuré, Pam Grier une femme flic aimante, Pierce Brosnan un scientifique à la Jeff Goldblum dans 'Jurassic Park', Jack Blake un fier apprenti militaire. Comble de la moquerie, le film, sorti un 13 décembre, présentera ses extra-terrestres en jerseys rouges et verts. Fin 1996, le père Noël n’apporta pas que des cadeaux aux petits terriens.

Pi (1998)
Pi (1998)

Film de science-fiction de Darren Aronofsky, avec Sean Gullette, Mark Margolis et Ben Shenkman

La grande idée : les mathématiques sont une discipline si effrayante qu’ils en deviennent un excellent sujet de science-fiction.

La réplique : « Tout, autour de nous, peut être représenté et expliqué au travers des chiffres. »

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Si l’on interrogeait Darren Aronofsky quant à sa plus grande peur enfantine, il est à parier que celle-ci se cachait non pas sous son lit comme les enfants ordinaires, mais bien dans un livre d’exercices de maths, à l’ombre d’une figure isocèle. En 1997, très certainement pour se venger des heures passées à devoir s’y plonger, le jeune réalisateur signe avec ‘Pi’ un premier film hautement claustrophobe, où fanatisme religieux et sciences cartésiennes se donnent la main pour venir hanter l’anachorète Max Cohen. Du fond d’un appartement lugubre qu’il peine à quitter, l’ermite urbain de la science des chiffres projette de trouver le modèle numérique prédisant les mouvements des marchés financiers. Accroc aux sédatifs et en proie à de fulgurantes hallucinations, le mathématicien reclus voit sa vie basculée lorsque sa paranoïa rencontre la folie d’un numérologiste kabbaliste pensant que les secrets du monde se cachent effectivement dans les suites chiffrées du paranoïaque juif new-yorkais, qui finira par se les extraire à coup de perceuse. Tourné en toute clandestinité avec une équipe restreinte, ‘Pi’ offre un modèle de science-fiction hallucinatoire, ouvert dans son interprétation et dont l’esthétique particulièrement réussie semble avoir eu une influence notable sur des films comme ‘The American Astronaut’, ‘Primer’ mais aussi ‘Matrix’, qui n’hésita pas à reprendre sèchement deux ans plus tard la séquence de codes sur fond de drum'n'bass ouvrant le film.

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Total Recall (1990)
Total Recall (1990)

Film de science-fiction de Paul Verhoeven, avec Arnold Schwarzenegger, Sharon Stone et Michael Ironside

La grande idée : Si la mémoire peut être manipulée, comment savoir lesquels de nos souvenirs sont réels ? Et d’ailleurs, qui sommes-nous ?

La réplique : « Considère ça comme un divorce ! »

Un tour sur Mars et ça repart
Adaptation libre d’une nouvelle de Philip K. Dick, ‘Total Recall’ voit Arnold Schwarzenegger recevoir un implant de mémoire défectueux, qui le persuade qu’il est agent secret, que sa femme (Sharon Stone, que Paul Verhoeven retrouvera bientôt pour ‘Basic Instinct’) essaie de tuer et qu’il se trouve inextricablement lié à une mutinerie sur Mars. Comme à son habitude, le réalisateur de ‘Starship Troopers’ joue sur l’ironie et un humour parfois potache et pervers – à l’image de cette inoubliable prostituée à trois seins. Entre action et science-fiction, ‘Total Recall’ propose en outre l’un des rôles les plus savoureux du futur gouverneur de Californie, au nom épuisant à épeler.

  • Cinéma
  • Drame
Under the Skin (2014)
Under the Skin (2014)

Film de science-fiction de Jonathan Glazer, avec Scarlett Johansson

La grande idée : une extra-Scarlett, incognito en Ecosse, fait disparaître des hommes, un à un.

La réplique : « Quand est-ce que tu as touché quelqu'un pour la dernière fois ? »

La Veuve Noire de l'espace
« Fantastique », le film de Jonathan Glazer l’est dans tous les sens du terme. D’abord parce qu’il mêle les genres avec brio : sous couvert de science-fiction, ‘Under the Skin’ en appelle ainsi tour à tour au road movie, au thriller, au survival, avec de jolis détours par l’érotisme et l’horreur onirique, le tout avec une cohérence, à la fois visuelle et narrative, absolument magistrale. Basé sur le roman homonyme de Michel Faber publié en 2000, le long métrage de Glazer en réduit subtilement le propos à l’essentiel : une mystérieuse femme – mais est-elle seulement humaine ? – séduit des hommes à travers l’Ecosse, pour les faire disparaître un à un. Or, sur ce pitch aussi intriguant que décharné, servi par une musique dissonante, vénéneuse, signée Mica Levi et des séquences surréelles et hypnotiques, Jonathan Glazer offre à Scarlett Johansson l’un des plus beaux rôles de sa carrière – et très certainement son meilleur depuis ‘Match Point’ de Woody Allen, en 2005. Et c’est là le deuxième génial aspect d’‘Under the Skin’ : outre son envoûtante beauté plastique, le film joue sur de multiples tableaux et grilles de lectures. Fable sur le désir et ses paradoxes, sur les liens entre l’érotisme et le goût du risque, de l’inattendu, il constitue en outre une ode à « Scarjo », omniprésente et méconnaissable, une réflexion sur son statut de célébrité, mais aussi et surtout sur le cinéma lui-même comme mécanique illusoire et dévorante.

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District 9 (2009)
District 9 (2009)

Film de science-fiction de Neill Blomkamp, avec Jason Cope, Robert Hobbs et Sharlto Copley

La grande idée : les autorités sud-africaines veulent mettre de l’ordre dans un quartier rempli d’aliens sans la moindre forme de respect.

La réplique : « Enlève tes putains de tentacules de mon visage ! »

Les crevettes de l’espace
Pour Peter Jackson, ‘District 9’ est un « petit film ». Certes, le producteur néo-zélandais a depuis quelques années revu ses standards à la hausse en termes de budget, mais 30 millions d’euros restent tout de même une coquette somme pour un parfait inconnu venu de la pub, Neill Blomkamp en l’occurrence, qui signe grâce à cet honorable pécule un premier film d’action haletant dans les townships de Johannesburg. Vingt-huit ans après qu’un vaisseau spatial se soit retrouvé coincé au-dessus de la ville sud-africaine, le gouvernement décide de s’occuper des 1,8 millions d’aliens parqués derrière des grilles protégeant le quartier de District 9, dans lequel personne ne sait ce qui se trame. Si ce n’est, bien sûr, une multinationale qui y exploite allègrement ses hôtes. Au travers de cette allégorie des mentalités ségrégationnistes, le jeune réalisateur offre, outre un portrait acerbe du temps de l’apartheid, une plus fine critique de la période de privatisation l’ayant suivi, tout en étant porté par une esthétique de circonstance empruntée au documentaire. Blomkamp plonge ainsi sa caméra dans un camp de réfugiés en pleine déportation massive et renoue avec la vague de productions SF dénonçant certains travers du capitalisme à la manière d’un ‘RoboCop’. Un film sans doute plus grand que ne l’avoue son producteur.

Hombre mirando al Sudeste (1986)
Hombre mirando al Sudeste (1986)

Film de science-fiction d'Eliseo Subiela, avec Lorenzo Quinteros et Hugo Soto

La grande idée : dans un asile psychiatrique, un homme prétend être venu sur Terre pour étudier l’humanité.

La réplique : « On ne soigne pas les gens ici. »

Téléportation dans un nid de coucou
A l’exception de quelques films d’horreur sensationnalistes, il n’y a rien de plus morne et immuable au cinéma que le quotidien d’un asile psychiatrique. Chez Hitchcock, dans ‘La Maison du Docteur Edwards’, ou chez l’Argentin Subiela, la vie y semble si répétitive, si laconique et si calibrée que l’on en viendrait à se demander si, finalement, les plus fous ne sont pas ceux qui les dirigent. Le docteur Denis, qui ne supporte plus de ne pouvoir guérir personne depuis sa chaise de psychiatre – à commencer par lui-même – voit sa vie basculer lorsque l’étrange Rantes, jeune homme affreusement placide prétendant venir d’une autre planète, apparaît mystérieusement dans son établissement. Bientôt, le quadragénaire solitaire délaissera le saxophone, son seul salut, pour l’étude de son prodigieux missionnaire céleste qu’il considère être un mystificateur. Très tourné sur la science-fiction littéraire de ses compatriotes Borges et Casares, évoquant l’encore récente dictature militaire et la guerre des Falklands, ‘L’Homme regardant le Sud-Est’ aurait mérité un meilleur destin que celui qui fut le sien. Passé inaperçu, le film inspirera plusieurs scénarios aux Etats-Unis, en premier lieu ‘K-Pax’ et ‘The Man From Earth’, sans jamais trouver d’autre reconnaissance que quelques critiques bien inspirés ayant, eux aussi, regardé fixement du côté du Sud-Est.

Guide du film de science-fiction : 41-50

Donnie Darko (2001)
Donnie Darko (2001)

Film de science-fiction de Richard Kelly, avec Jake Gyllenhaal, Jena Malone et James Duval

La grande idée : le voyage dans le temps ou dans des dimensions parallèles, ce n’est finalement qu’un simple aspect de l’adolescence.

La réplique : « C’est quoi, ce putain de nom ? T’es un super-héros ou un truc dans le genre ? »

Bah, t’en fais une tête, mon lapin
‘Donnie Darko’ est certainement l’un des teen-movies les plus détraqués du genre. Parfois, on se dit même que c’est un peu comme si David Lynch racontait ici ses souvenirs de lycée. Donnie Darko (Jake Gyllenhaal, mémorable à 21 ans) est un garçon un peu renfermé, pas hyper à l’aise. Mais tout n’est pas perdu : son amie Gretchen accepte de sortir avec lui. Jusqu’ici, rien de plus banal. Mais Donnie a aussi un autre pote, un inquiétant lapin géant et pousse-au-crime, à la face recouverte d’un masque assez effrayant. Sinon, il faut savoir que des moteurs d’avion ont tendance à s’écraser dans la chambre que Donnie occupe chez ses parents. Et que cette fête d’Halloween à venir le rend de plus en plus anxieux… Un premier film vénéneux et inattendu  qui aura très vite su conquérir de nombreux fidèles.

Je t'aime, je t'aime (1968)
Je t'aime, je t'aime (1968)

Film de science-fiction d'Alain Resnais, avec Claude Rich et Anouk Ferjac

La grande idée : déguiser une histoire d'amour intemporelle en voyage dans le temps.

La réplique : « Et maintenant je suis mort. J'ai froid. J'entends mes mots. »

La recherche du temps perdu
A priori, ‘Je t’aime, je t’aime’ est un film de science-fiction : le héros, Claude Ridder, sert de cobaye à des scientifiques qui ont inventé une machine permettant de remonter le temps pendant une minute. Mais c’est en réalité à un voyage passionnant à travers la mémoire du personnage que nous invite Alain Resnais. Car l’expérience tourne mal : Claude semble se cramponner au passé et reste prisonnier de la machine, qui fait surgir des souvenirs aléatoires en pagaille. Comme les morceaux fragmentés d’un puzzle recomposés peu à peu, l’histoire d’amour entre Claude et Catrine renaît alors sous nos yeux. D’abord heureuse, l’idylle laisse vite place à une tragédie que le montage échevelé du cinéaste installe par à-coups, par va-et-vient successifs dans la vie et les rêves du personnage joué par Claude Rich. Avec ‘Je t’aime, je t’aime’, Alain Resnais invente en fait une mise en scène participative, il compte sur l’intelligence et la mémoire du spectateur pour reconstituer le film, de la même manière que le cerveau humain sait lire un mot dans le désordre à condition que les première et dernière lettres soient les bonnes. Ce procédé habile permet à Resnais de détruire les codes classiques de la narration et de peindre à la place un tableau impressionniste et poétique. Hélas, le film connaîtra un échec commercial dû à des circonstances défavorables. Sélectionné à Cannes en 1968, il ne pourra pas être projeté à cause de l’annulation du festival, puis sa sortie en salles coïncidera avec les événements de mai 68. Il faudra donc attendre plusieurs années avant qu’il ne devienne culte.

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  • Cinéma
  • Film d'animation
Ghost in the Shell (1995)
Ghost in the Shell (1995)

Film de science-fiction de Mamoru Oshii (animation)

La grande idée : le cyborg, nouvelle étape de l’évolution ?

La réplique : « Récemment encore, nous étions de la science-fiction. »

Metropolice
Avec ‘Ghost in the Shell’, la fascination typiquement japonaise pour la technologie trouve une manifestation inédite. Si ‘Akira’ (1988), ‘Jin-Roh’ (1999) ou encore ‘Perfect Blue’ (1999), autres chefs-d’œuvre de l’anime, se font eux aussi l’écho des possibles dérives (politiques, humaines ou sociales) de nos sociétés dans le futur, le film de Mamoru Oshii adapte un scénario plus ambitieux encore, en gardant la même exigence visuelle (nombreux détails, décors somptueux, etc.). Adapté du manga de Masamune Shirow, ‘Ghost’ met en perspective l’histoire de l’humanité et son futur, à travers le personnage d’une flic cyborg, l’agent Kusanagi. Aussi compétente que mystérieuse (voire inquiétante), elle constitue la preuve qu’un cyborg peut tout à fait s’intégrer à une société humaine, qui tend d’ailleurs massivement vers la cybernétique (cyborgs donc, mais également êtres humains augmentés ou encore hackers « incarnés »). Les choses se compliquent quand elle est chargée d’arrêter un hacker expérimenté, le Puppet Master, impliqué dans une affaire d’espionnage politique qui la poussera à remettre en cause sa part d’humanité. Un peu comme le spectateur, confronté à des questions existentielles : qu’est-ce qui, au fond, fait de nous des humains ? Nos gènes, notre mémoire, nos caractéristiques physiques ? Et quel sera le prochain stade de l’évolution sur Terre ? Après les animaux, après les êtres humains : les cyborgs ? Autant de questions qu’évidemment le film ne résout pas, ouvrant au contraire sur un deuxième épisode (2004) tout aussi réussi.

  • Cinéma
Alphaville (1965)
Alphaville (1965)

Film de science-fiction de Jean-Luc Godard, avec Eddie Constantine et Anna Karina

La grande idée : une cité futuriste où la liberté individuelle est déclarée hors-la-loi.

La réplique : « Plus personne ne se souvient du sens du mot "conscience". »

Une ville sans pitié
Parsemant ses dialogues de citations plus ou moins cachées de Borges, Orwell, Bergson, Nietzsche ou Eluard, Godard n’en oublie pas pour autant ici de jouer avec les codes des pulp novels ou du roman noir, plongeant le personnage de l’espion Lemmy Caution (Eddie Constantine) dans une sombre fantaisie narrative, où le super-ordinateur Alpha 60 contrôle chaque aspect d'Alphaville. Surtout, le film conserve un charme très particulier, dû à son mélange d’un humour souvent extravagant, absurde, et d’un profond sérieux sous-jacent lorsqu’il fait le lien entre la brutalité du fascisme et la logique inhumaine des machines. Enfin, dans un espace où la folie des sentiments devient une condamnation à mort, qui mieux que l’espiègle Anna Karina pourrait nous faire croire que le jeu en vaut pourtant la chandelle ?

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Into Eternity (2010)
Into Eternity (2010)

Film de science-fiction de Michael Madsen (documentaire)

La grande idée : la réalité rejoint parfois la (science-)fiction.

La réplique : « Faites-vous confiance aux générations futures ? »

Underground opera
A l’image de son sujet, ‘Into Eternity’ est une entreprise qui n’a pas de précédent, et pas d’équivalent à l’heure actuelle. Premier documentaire de SF, le film de Michael Madsen explore la délicate question du traitement des déchets nucléaires et de ses implications, en prenant pour cas pratique un site d’enfouissement en cours de construction. Après le space opera, voici l’underground opera. Quelque part en Finlande, une équipe de spécialistes travaille sur un tunnel géant – la solution la plus fiable à l’heure actuelle pour stocker ce type de déchet –, qui sera ensuite muré et devra permettre d’éviter tout danger durant 100 000 ans. Oui mais voilà, comment imaginer ce que sera la Terre alors, et qui la peuplera ? Faut-il laisser des messages (des « markers ») pour que les générations futures ne rouvrent jamais le site – comme sur les tombeaux des pharaons, pourtant visités ? Autant de questions que ce documentaire soulève, et pose directement aux scientifiques ayant élaboré ce projet. Plus qu’un simple film sur un sujet de société, ‘Into Eternity’ met en perspective notre rapport à l’espace où nous vivons, ainsi que notre responsabilité vis-à-vis des générations futures (tout en s’adressant directement à celles-ci). Superbement réalisé, avec notamment des plans fixes impressionnants sur des détails du tunnel ou la nature, un dispositif d’interview simple et un souci constant pour la bande-son, ce documentaire est bien loin de ce que vous pourrez voir ailleurs sur le sujet. Ici pas d’alarmisme ni de défaitisme, simplement des interrogations justes et souvent sidérantes. Le site d’Onkalo (la « cachette » en finnois) sera achevé au XXIIe siècle. D’ici là, l’être humain a encore du temps pour se poser les bonnes questions, et penser à son avenir sur Terre.​

  • Cinéma
  • Action & aventure
Minority Report (2002)
Minority Report (2002)

Film de science-fiction de Steven Spielberg, avec Tom Cruise, Colin Farrell, Max von Sydow et Samantha Morton

La grande idée : l’intention de tuer vaut le crime.

La réplique : « Vous êtes en état d’arrestation pour le futur meurtre de Sarah Marks. »

Karma police
Aux côtés de ‘Blade Runner’ (1982) et ‘A Scanner Darkly’ (2005), ‘Minority Report’ fait partie des adaptations réussies du pape de la SF Philip K. Dick. Poussée paranoïaque autant qu’œuvre visionnaire (ou simplement clairvoyante), la nouvelle de l’écrivain américain investit la police de pouvoirs bien supérieurs à ce qu’on connaît sous nos latitudes – mais pas si éloignés de ce que peuvent pratiquer des gouvernements totalitaires, à l’est de l’Europe par exemple. L’unité d’élite Pre-Crime se voit ainsi chargée, après signalement par l’équipe de pré-cognitifs prédisant le futur, d’appréhender des suspects avant même qu’ils ne commettent un crime. Jusqu’au jour où l’agent Pre-Crime John Anderton (Tom Cruise) est lui-même inculpé et recherché. Un rebondissement classique de la SF – le personnage soumis au système qui en vient à le remettre en cause, et à lutter contre celui-ci –, mené par un Steven Spielberg en grande forme. Tout y est : équipements techno inventifs, fond de mysticisme, questionnements moraux et scènes d’action savamment dosées. Même si Dick aurait certainement eu à y redire, le rôle de John Anderton semble parfaitement taillé pour le plus célèbre des scientologues, d’ailleurs revenu au genre depuis, avec ‘Oblivion’ et ‘La Guerre des mondes’. Un "classique moderne" du genre, donc.

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La Planète sauvage (1973)
La Planète sauvage (1973)

Film de science-fiction de René Laloux (animation)

La grande idée : un film d'animation en forme de conte philosophique pour dénoncer la domination, la guerre et le colonialisme.

La réplique : « Ni les Ohms ni les Draggs ne veulent se détruire. Nous devons faire la paix d'une manière ou d'une autre. »

Les extraterrestres géants et les petits hommes pas verts du tout
'La Planète sauvage' s'inspire librement d'un roman de science-fiction de Stefan Wul, 'Oms en série', où les humains se voient renvoyés au rang d'animaux domestiques pour des géants d'une lointaine planète, les Draags. Variation sur Gulliver à partir d'un scénario de Laloux coécrit avec Roland Topor (également à l'origine des dessins, animés selon la technique des papiers découpés), 'La Planète sauvage' obtint le prix spécial du Jury au Festival de Cannes 1973. Ovni d'animation d'une poésie toute seventies, le film pourra d'ailleurs être rapproché du long métrage suivant de René Laloux, 'Les Maîtres du temps' (1981), dessiné par Moebius sur des dialogues de Jean-Patrick Manchette. Une bien belle étrangeté à redécouvrir.

  • Cinéma
  • Film d'animation
Le Congrès (2013)
Le Congrès (2013)

Film de science-fiction d'Ari Folman, avec Robin Wright, Harvey Keitel et Jon Hamm

La grande idée : cryogéniser Robin Wright pour un film d'animation délirant.

La réplique : « Quatre cafards qui jouent au poker sur tes genoux, c'est une blague ? »

Satire engagée ou « bad trip sous acide » ?
Difficile de qualifier – et d’évaluer – ‘Le Congrès’, tant il s’éloigne de tout ce que l’on a déjà pu voir au cinéma. Dès le générique d’ouverture, la couleur est annoncée : ce ne sera pas « Robin Wright, dans ‘Le Congrès’ », mais « Robin Wright, au Congrès ». Car le nouveau projet d’Ari Folman, auteur de ‘Valse avec Bachir’, est moins un film qu’une expérience sensorielle farfelue et hautement déconcertante. Un produit hybride. D’un côté, un méta-film sur la mort du cinéma tel qu’on le connaît, au profit de la numérisation à tout-va (3D, capture de mouvements et autres horreurs technologiques). De l’autre, l’adaptation d’un bouquin sci-fi des années 1970, ‘Le Congrès de futurologie’ de Stanislas Lem. La première partie, en prise de vue réelle, est magistrale. Elle s’ouvre sur le visage de Robin Wright (dans son propre rôle), en pleurs, alors que son agent (Harvey Keitel) lui fait la leçon : mecs foireux, films foireux... A 47 ans, sa carrière est au point mort. Il ne lui reste donc qu’une solution : laisser une société de production « scanner » son corps, son visage, ses émotions, pour en faire un produit numérisé capable de jouer à sa place dans n’importe quel film. La vraie Robin, elle, cesserait d’être actrice... Puis le film bascule dans un monde futuriste, où les dessins animés ont remplacé la réalité, et où les stars d’Hollywood peuvent être consommées en milkshake ou en smoothie.

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  • Cinéma
  • Comédie

Film de science-fiction de Luc Besson, avec Bruce Willis, Milla Jovovich et Gary Oldman

La grande idée : la SF, ça peut aussi être sexy et drôle.

La réplique : « Je n’ai pas été conçue pour aimer, mais pour protéger la vie. »

Le futur a les cheveux oranges
Rares, très rares sont les films de Luc Besson que l’on a pu regarder plusieurs fois avec le même plaisir. Il en va ainsi du ‘Cinquième Elément’ (1997), l’un des seuls longs métrages de SF français à intégrer ce classement. Et pour cause : si avec celui-ci se clôt une période pour le réalisateur (à la filmographie jusqu’alors respectable), il s’ouvre également des possibilités pour le cinéma hexagonal, et des brèches dans pas mal de cerveaux de jeunes spectateurs. En ce sens, ‘Le Cinquième Elément’ a tout d’un film générationnel, qui ne traversera sûrement pas aussi bien le temps que ‘2001’ ou ‘Stalker’, mais aura au moins eu le mérite de rendre la SF accessible à tous sans la dévoyer. Du grand public donc (d’où sans doute le scénario mince), qui s’autorise tout de même un univers riche et inventif, empruntant autant à ‘Blade Runner’ qu’à ‘L’Incal’. Si le film a effectivement vieilli, le casting garde le charme des grosses productions des nineties : Bruce Willis en blond peroxydé et désabusé (comme d’hab), Gary Oldman l’éternel méchant, Chris Tucker en présentateur barré, Tricky jouant au bad guy et même Maïwenn dans le rôle d’une diva extraterrestre (si si) – sans oublier Jean-Paul Gaultier aux costumes et Eric Serra à la composition musicale. Nostalgie du futur, quand tu nous tiens.​

Le Monde sur le fil (1973)
Le Monde sur le fil (1973)

Film de science-fiction de Rainer Werner Fassbinder, avec Klaus Löwitsch et Barbara Valentin

La grande idée : des années avant ‘Matrix’ et ‘Second Life’, un cinéaste allemand novateur explore l’idée d’un ordinateur simulant la réalité.

La réplique : « - Est-il vrai que vous avez créé un monde artificiel ? - "Monde", c'est une exagération. »

404 – Seite Nicht Gefunden !
Pour le maestro de la Nouvelle Vague allemande, Rainer Werner Fassbinder, 'World on a Wire' restera sa seule et unique réalisation dans le domaine de la science-fiction. Dommage, car, comme attendu, le résultat est épique, riche et élaboré, quoique le film et son héros (proche du Jack Nicholson de 'Chinatown', si celui-ci avait échangé ses costumes clairs pour un casque de cosmonaute connecté à un réseau d’ordinateurs) n’eurent vraiment pas le destin mérité. Seulement diffusé à la télévision en trois parties, le film restera pendant 27 ans, tel 'La Maman et la Putain' d’Eustache, comme une œuvre sur laquelle mettre la main était presque impossible. Adapté librement de la nouvelle de science-fiction écrite par Daniel F. Galouve en 1964, 'Simulacron-3', ce chef-d’œuvre enfin restauré en 2010 préfigure tout ce qui jouera avec le concept de réalité, du récent 'Inception' au plus ancien 'Le Cobaye' (sorti en 1992), avec peu de moyens, mais beaucoup d’imagination et de style. Beaucoup, beaucoup, beaucoup de style.

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