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Malgré l’arrivée des beaux jours, on assiste ces dernières semaines à une avalanche de (bons) albums. Uniquement de quoi vous réchauffer le cœur, rassurez-vous. Alors pour vous aider à débuter le printemps dans la bonne humeur et en musique, voici une sélection totalement subjective et limitée à l’essentiel (d’ailleurs si vous avez des disques à nous conseiller, les commentaires en bas de page vous attendent) de 5 albums sortis ces dernières semaines, pour étancher votre soif de découvertes musicales.
Kevin Morby, ‘Singing Saw’ (Dead Oceans)
(Pop-folk rêveuse)
Si vous ne connaissez toujours pas ce petit génie originaire de Kansas City, il est plus que jamais temps de vous rattraper. Initié à la guitare à l’âge de 10 ans, tâtant aussi du piano, du micro voix et de la basse (notamment dans les groupes Woods et The Babies), Kevin Morby se taille depuis son premier album solo en 2013 (‘Harlem River’) une discographie à la mesure de son talent. Et son troisième et excellent disque (un « album de la maturité » à 28 ans ? oui c’est possible) ne fait que confirmer. D’abord parce qu’il contient au moins deux titres imparables, "I Have Been to the Mountain" et "Singing Saw", merveilles qui vous embarquent immédiatement pour une virée délicatement psyché sur les routes californiennes, où Morby traîne désormais ses guêtres. Ensuite parce que tout au long de l’album affleurent des influences plus ou moins évidentes dans la voix et les orchestrations, et pas des moindres : Bob Dylan ("Water"), Neil Young ("Drunk and On a Star"), Lou Reed ("Dorothy"), et une myriade d’autres dont on se souviendra plus tard, dans de futurs « eureka ! ». Enfin et surtout parce qu’on a du mal à s’empêcher de faire tourner cet album encore et encore sur notre platine. Bref, vous savez ce qu’il vous reste à faire.
Glenn Jones, ‘Fleeting’ (Thrill Jockey)
(Story-telling guitar)
Rares sont les musiciens parvenant, avec une économie de moyens frôlant le minimalisme, à raconter des histoires sans paroles. Comme si les notes plus que les mots étaient porteuses de sens, fertiles pour stimuler notre imaginaire. Glenn Jones compose ainsi des morceaux en forme de comptines pour adultes, développant avec sa guitare une palette d’émotions large et colorée. Guitariste accompli, il ne laisse pourtant jamais les différentes techniques qu’il utilise se donner comme telles, puisqu’elles restent toujours au service d’une grande expressivité. Idéal pour faire passer une gueule de bois carabinée en douceur, endormir votre chérubin, ou même flirter avec une nouvelle conquête. Un disque au moins un 3 en 1, on vous dit.
Et pour encore mieux commencer le printemps, Glenn Jones sera en concert privé en appartement (Paris 8e) le dimanche 1er mai avec Daniel Bachman. Réservation et infos : lachaiselestabourets@gmail.com
The Field, ‘The Follower’ (Kompakt)
(Techno ad lib)
« Boucler la boucle », telle semble être la devise d’Axel Willner, le producteur et DJ suédois derrière The Field. The Field, c’est typiquement le type de projet qui fâche, avec sa techno minimale et ultra répétitive : d’un côté, ceux qui refusent jusqu’au concept, expliquant que n’importe quel gugusse équipé de quelques machines pourrait faire aussi bien ; de l’autre, des esthètes du XXIe siècle avides d’expériences sonores différentes, débarrassées des formats conventionnels. Il faut dire que ce nouvel album fait preuve d’un savoir-faire jamais démenti, nous embarquant dès son premier morceau "The Follower" dans une transe aux relents acid, puisant à la source de la techno et (ré)inventant une sorte de poétique du CD rayé. Des sons qui vous happent pour vous relâcher une heure plus tard, les pupilles et oreilles bien dilatées. Miam.
Andrew Bird, ‘Are You Serious’ (Universal Music)
(Pape du pop)
Andrew Bird, un oiseau pas si rare ? Avec la régularité d’un métronome et une constance impressionnante, le compositeur et musicien américain livre chaque année un album et/ou un EP de grande qualité, pour le plus grand bonheur des fans. Et pourtant, si ces derniers sont fidèles, beaucoup d’amateur de pop ne connaissent pas encore la musique du Bird. Ca tombe bien, ce ‘Are You Serious’ très personnel constitue une bonne porte d’entrée dans la discographie du plus british des Américains. Enjoué, léger et fourmillant pourtant de détails, voilà un disque facile d’accès qui conjugue encore et toujours arrangements (notamment de cordes) somptueux, voix qui pourrait chanter le bottin, et idées à la pelle. King of pop !
Moderat, ‘III’ (Monkeytown Records)
(L’électro-pop à l’épreuve du bon goût)
Vous connaissez un genre musical plus casse-gueule que l’électro-pop ? Entre les collages bancals de guitares, machines et voix doucereuses sur fond de beats maladroits, les innombrables clones de M83 et les groupes à paillettes et plumes colorées dans le fondement, y’avait de quoi désespérer. Mais les trois zigues de Moderat semblent bien décider à nous faire mentir, sublimant le genre avec ce dernier album qui trouve un équilibre entre densité électronique et légèreté de la voix de Sascha Ring (notamment sur "Eating Hooks" et "Ghostmother"). Désormais affranchis de l’influence écrasante de Modeselektor et Apparat, leurs projets d’origine, les membres du trio trouvent sur ce ‘III’ un style propre à Moderat (comme ils nous l’expliquent ici). Pas l’album de l’année donc, mais au moins une réussite dans le genre.