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A l’occasion du festival Paris en toutes lettres, La Bellevilloise propose le 16 novembre un débat-lecture-banquet autour de l’œuvre de l’auteur de 'Plateforme'.
On l’avoue, « banquet » n’est pas le mot que l’on accolerait spontanément à Houellebecq : ses personnages ont plutôt tendance à nous évoquer des célibataires dépressifs qui se nourrissent de plats surgelés… Et pourtant, c’est à travers la cuisine que Jean-Marc Quaranta, maître de conférences à l’université d’Aix, a étudié l’œuvre littéraire de Houellebecq dans son essai intitulé 'Houellebecq aux fourneaux'.
A l’occasion de Paris en toutes lettres, festival « fondé sur les hybridations entre les genres et les formes artistiques », les spectateurs pourront donc déguster des plats « houellebecquiens » (du sandwich pâté-cornichon au demi-poulet rôti au four, frites et sauce béarnaise), le tout commenté par Jean-Marc Quaranta.
Questions à l'initiatrice de cette soirée, Lauren Malka, journaliste culturelle.
On associe souvent Houellebecq à la malbouffe, ce n’est pas le cas ?
Dans l'esprit des lecteurs, les personnages qui recevront le qualificatif sinistrement poétique de « houellebecquiens » picolent, épongent la cuite de la veille avec des sachets-repas pour célibataires qu'ils avalent à la lumière crue d'une cuisine de vieux garçon, d'un restaurant d'entreprise ou d'une cafétéria. Le tout épicé de Doliprane et d'antidépresseurs ! Or, ce que remarque l'auteur de 'Houellebecq aux fourneaux', c'est qu'il émane finalement de l'œuvre de Houellebecq une odeur de cuisine perpétuelle et très significative. Ses six livres contiennent selon l'auteur plus de deux cents plats qui en disent long sur l'intrigue, la psychologie de l'écrivain et de ses personnages. Par exemple, dans 'Extensions du domaine de la lutte', premier roman de Houellebecq dans lequel la nourriture paraît totalement absente, le personnage principal, Michel, évoque à certains moments clés de l'histoire le poulet rôti au four comme emblème du plat familial d'une époque révolue, idéalisée, celle de ses parents. C'est d'ailleurs le plat que ses parents ont mangé en forme de repas post-coïtal le jour de sa conception, à l'époque dit-il où l'on trouvait de « vrais poulets ». Même éclairage sociologique et affectif pour le baklava, pâtisserie orientale qui représente, dans 'Soumission', l'islamisation des coutumes alimentaires mais réserve des surprises...
Le festival Paris en toutes lettres est « fondé sur les hybridations entre les genres et les formes artistiques », en plaçant la nourriture au sein de ce débat est-ce une façon de lui conférer une mission « artistique » ? Se nourrir comme une performance ?
Dans un monde comme celui de Houellebecq, où l'on croise souvent des corps fatigués, squelettiques, des personnages qui souffrent à l'endroit même où ils pourraient jouir dans cette œuvre que l'on n'associe pas au plaisir des sens mais à la désolation, à la désincarnation, manger devient une performance, c'est vrai ! Et en ce sens, l'hybridation des genres et des formes qui constitue la base du festival Paris en toutes lettres, comme vous le dites, mais aussi le moteur des événements que j'aime organiser, paraît tout à fait adaptée
Quelle forme va prendre ce banquet Houellebecquien ?
La très belle salle de la Bellevilloise où ce banquet aura lieu, la Halle aux oliviers, contient à la fois un restaurant et une scène. Le public dégustera les plats houellebecquiens proposés par une carte spéciale réalisée par les cuisiniers de la Bellevilloise, sous la houlette de Jean-Marc Quaranta. Jean-Marc sera sur scène pour commenter au micro les assiettes au fur et à mesure du service - commentaire littéraire, sociologique, psychologique ; et - surprise du chef ! - le comédien Noam Morgensztern, pensionnaire de la Comédie française et fan de Houellebecq, nous fera le plaisir de lire des extraits de l'œuvre pour illustrer les analyses de Jean-Marc. Les questions du public seront bien sûr les bienvenues.
On a presque faim maintenant, alors quel sera le menu ?
Il y aura, entre autres, un sandwich pâté-cornichon (issu de 'La Carte et le Territoire'), des petits nems croquants au basilic et à la citronnelle ('Plateforme') ou un demi-poulet rôti au four, frites et béarnaise (dans 'Extension du domaine de la lutte').
Toutes les infos ici.
Quand ? • Le 16 novembre à 20h.
Combien ? • entrée libre (+ prix des plats) réservation ici ou là.
Où ? • La Bellevilloise, La halle aux Oliviers, 19-21 rue Boyer, Paris 20e.