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Depuis octobre 2016, le hip-hop est dans La Place. Et pas n'importe où, aux Halles, bien logé sous le toit de la Canopée. Quoi ? La nouvelle version des Halles n'aurait donc pas seulement permis l'installation de nouvelles boutiques et restaurants huppés ? Eh non.
« Le projet était tellement ambitieux, que je ne croyais pas qu'il allait se faire. »
Outre la médiathèque et la MPAA (Maison des pratiques artistiques amateurs), la mairie de Paris a aussi soutenu l’ouverture de La Place : un centre culturel dédié au hip-hop. Et par hip-hop, entendez toutes les formes artistiques liées : la musique bien sûr mais aussi la danse, les arts graphiques, le cinéma, la photo... Un lieu qui ne remplace pas les autres, mais qui s'inscrit dans une démarche complémentaire, principalement de diffusion. Mille quatre cents mètres carrés à inventer.
A la tête de cette nouvelle institution (depuis octobre 2013 !) Jean-Marc Mougeot, dit JM, directeur de l'Original, festival lyonnais de hip-hop. En quelques réponses, il nous explique son projet.
Comment s'est déroulée votre prise en main de La Place ?
J'avais des envies mais il fallait d'abord voir quels étaient les espaces en question. On parle d'un mouvement fondé sur cinq disciplines artistiques piliers mais qui aujourd'hui en englobe beaucoup plus. Les artistes, les générations ou les gens d'esprit hip-hop font de la vidéo, de la photo, du théâtre ou encore du multimédia. Pour être un lieu hip-hop moderne, il faut s'apprêter à accueillir tout ça mais aussi son évolution. Il a fallu donc beaucoup d'écoute des différents acteurs pour dresser un état des lieux de ce qui existe et des attentes.
Un des paramètres essentiels c'est aussi que La Place est un lieu incorporé dans un plus grand lieu. Ce n'est pas un bâtiment dédié à La Place mais à la culture, avec une bibliothèque, une Maison des pratiques amateurs, un kiosque jeunes. Une seule entrée pour quatre équipements culturels. Il fallait aussi que notre activité - qui est différente de celle de la bibliothèque et de MPAA - ne gêne pas celle des autres et inversement. Il a fallu réfléchir à un process, sur l'accueil du public, des horaires...
Qu'en est-il de la programmation ?
On travaille par trimestre. L'actuelle programmation court par exemple jusqu'à décembre. Tout a commencé avec Paris-New York, un événement sur lequel on s'est greffé, mais qui correspond tellement symboliquement à La Place, parce que le hip-hop est né dans une partie du Bronx à New York.
La Place est un lieu hip-hop pas seulement dédié à la musique, à la danse, aux arts graphiques, mais tout ça à la fois et plus encore. On doit travailler avec des communautés artistiques qui étaient ensemble quand le hip-hop a émergé mais qui aujourd'hui évoluent dans leur propre circuit de développement. Dans notre programmation Paris-New York, il y avait de la danse, de la conférence, des projections ciné, des concerts de différentes générations, des artistes des années 1980 et des nouvelles générations telles que Sianna ou encore Dynasty. On n'est pas là pour ne faire que du rap actuel, mais on fait l'ensemble du rap et on met tout ça en perspective.
On a un spectacle de danse par mois. Le premier a eu lieu le vendredi 14 octobre avec un plateau de trois compagnies (ndlr : Richard M'Passi, Circul'R et Phorm). Un solo et deux duos, des formes courtes pour montrer de la diversité. La vie du lieu démarre avec un concert de Khondo et une exposition de photos (ndlr : 'Les Visages du rap de David Delaplace). On voit comme ça d'entrée de jeu que La Place c'est de la musique, de l'expo et de la danse. La salle de spectacle représente une jauge de 100 places et celle des concerts de 400 places. Nous sommes dans une position de lieu d'émergence, ce qui nous convient parfaitement.
Est-ce qu'il y aura également des cours, de danse par exemple ?
Quand j'ai proposé ce projet artistique, c'était pour qu'il s'installe dans un écosystème qui existe déjà. Des cours de danse, il y en a des pléthores un peu partout. On est un lieu de projet artistique avant tout. Il n'y aura pas de cours réguliers mais pendant une semaine, cinq fois dans l'année, La Place deviendra un lieu de transmission. Pour la danse, par exemple, on pourra travailler les techniques et la chorégraphie mais aussi la création de bande son, de décor, de mise en lumière... On peut aussi s'intéresser à comment diffuser et financer un spectacle, comment préserver la santé du danseur... Une vision beaucoup plus globale de la transmission sur une même thématique artistique, en danse, en musique ou encore en vidéo. On ne remplace pas ce qui existe déjà, mais on devient complémentaire.
Etre aux Halles, c'est symbolique ?
Si toutes les générations d'artistes venaient aux Halles, c'est parce que c'était pratique. On venait de partout en métro ou en RER. Il y avait des espaces de danse et de rencontre comme la place carrée, des boutiques de disques ou de sapes. C'est là que tout le monde venait.
Le but, c'est aussi de faire de La Place un lieu accessible...
J'ai voulu que les tarifs soient très clairs, c'est 12 et 16 € pour tous les spectacles payants que ce soit danse ou musique. Cela nous permet de montrer que l'on accorde la même importance aux deux types de discipline. Je ne dis pas que le tarif va rester comme ça, c'est un défi. On ouvre un lieu, il y a un modèle économique à trouver. En tout cas pour ce premier trimestre, on fait cela. Pour le reste, on verra, ça dépendra des plateaux, de l'envie des gens de voir des spectacles...
Quoi ? • La Place, centre culturel hip-hop.
Où ? • Canopée des Halles, Paris 1er.