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Le Hitchcock que tout le monde connaît appartient au cinéma parlant. C'est un cinéaste qui tourne aux Etats-Unis, il est surnommé le maître du suspense et il inspire la Nouvelle Vague. Avant cela pourtant, Alfred Hitchcock fut très célèbre en Angleterre dès la période du cinéma muet, durant laquelle il pose les fondations de son style. Du 31 août au 27 septembre, la Fondation Seydoux-Pathé nous convie à découvrir ce pan méconnu de l'œuvre de ce génie, soit neuf films muets de la fin des années 1920 en version restaurée.
C'est avec 'The Lodger' (1927), que nous avons eu la chance de voir en ciné-concert avec au piano un élève de la classe d'improvisation de Jean-François Zygel, que le réalisateur débute véritablement sa carrière. Dans son livre d'entretiens en compagnie de François Truffaut, il le qualifie ainsi de premier « Hitchcock picture », c'est-à-dire un film où la mise en scène visuelle porte le point du suspense à son comble. C'est aussi un immense succès public et critique, qui permettra à Hitchcock d'enchaîner vite sur d'autres grands films comme 'The Ring' (1927) ou 'Blackmail' (1929), eux aussi projetés à la Fondation.
Filmer les scènes d'amour comme des scènes de meurtre
Inspiré de 'Jack L'Eventreur', 'The Lodger' raconte l'histoire d'un mystérieux locataire dont on soupçonne qu'il est l'auteur des crimes qui terrifient tout Londres. Entre humour burlesque (la scène du tisonnier, hilarante), suspense et romance, Hitchcock applique déjà le principe que Truffaut théorisera plus tard en disant : « Toutes les scènes d'amour sont filmées comme des scènes de meurtre, et toutes les scènes de meurtre sont filmées comme des scènes d'amour. » Le gros plan sur le visage inquiétant et diaphane du locataire, joué par l'hypnotique Ivor Novello, en train d'embrasser la jolie blonde du film, contient en germes toutes les futures scènes du maître.
Surtout, Hitchcock nous apprend dès 'The Lodger' à nous méfier des signes, à interroger les indices qui nous porteraient à des conclusions hâtives. Avant 'La Mort aux trousses' et son quiproquo célèbre, le réalisateur nous met face à un homme qui ressemble parfaitement à la description d'un autre mais qui n'est pas lui. Le locataire correspond en effet à la description du tueur faite par les témoins : il est grand et son écharpe cache le bas de son visage. Peu à peu, d'autres détails vont entretenir l'ombre d'un doute, pour reprendre le titre d'un film fameux. Mais chez Hitchcock, les apparences sont souvent trompeuses, et le thème du soupçon mal dirigé reviendra régulièrement dans ses films, que ce soit dans 'Jeune et innocent', 'Soupçon' ou encore 'Le Faux Coupable'.
Grâce au travail de restauration incroyable opéré par le British Film Institute, mais aussi grâce aux interprétations en direct au piano, il est désormais possible d'apprécier à leur juste valeur ces neuf chefs-d'œuvre muets, dont certains très rares, matrice de tout le travail ultérieur du maître du suspense.
Quoi ? • Neuf films muets d'Alfred Hitchcock projetés en ciné-concert à la Fondation Pathé.
Quand ? • Du 31 août au 27 septembre 2016.
Où ? • 73 avenue des Gobelins, Paris 13e.
Combien ? • 6,50 € tarif normal, 5 € tarif réduit, 4,50 pour les moins de 14 ans.