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Cet article a été publié originellement sur le site de Time Out Londres (interview : Dave Calhoun ; traduction : Malo Barrette)
Scarlett Johansson a partagé ses opinions haut et fort cette année. Début mars, elle attaquait Ivanka Trump lors de son passage au "Saturday Night Live". Elle était tout aussi vindicative quand nous l’avons rencontrée en janvier dernier pour parler de son rôle dans 'Ghost in the Shell’, film de science-fiction et remake du célèbre anime japonais des années 1990. C’était quelques jours avant la passation des pouvoirs à Donald Trump, et la conversation s’est quelque peu écartée du film pour s’orienter vers la politique : Scarlett Johansson était furieuse et voulait le faire savoir. Une semaine après notre entretien, l’actrice prenait la défense de l’avortement et des droits liés à la reproduction lors de la Marche des femmes à Washington. Certains acteurs préfèrent ne pas exprimer leurs opinions publiquement - ce qui n'est visiblement pas le cas de Scarlett Johansson.
Vous jouez un cyborg dans 'Ghost in the Shell’. Comment êtes-vous parvenue à incarner un personnage qui n’est pas humain ?
Je me suis sentie à l’étroit. Il n’y a rien de très singulier ou original chez elle. Elle est efficace et ne s’y reprend pas à deux fois. Elle n'hésite pas. Pourtant, elle n’est pas entièrement mécanique, même si elle file droit. En tant qu’acteur, on accorde beaucoup d’importance aux nuances physiques, vocales, aux choses qui peuvent être perçues par le public. Là il ne fallait pas être trop monotone, tout en restant fidèle au personnage. C’était un vrai défi.
Comment voyez-vous le rôle que prend la technologie dans nos vies quotidiennes ?
Je m’en méfie. Certainement plus que quelqu'un qui n’est pas sous le feu des projecteurs. J’estime que l’anonymat est une chance dont on ne peut se rendre compte qu’en l’ayant perdu. C’est une chose si précieuse dans un monde où l’on partage tant sur nous. Je ne peux pas imaginer qu'on puisse souhaiter s’en débarrasser. C’est pour cela que je suis peu active sur les réseaux sociaux, cela me semble être une grande perte de temps.
Vous vivez et travaillez beaucoup en Europe ces temps-ci. Les films 'Avengers' ont été tournés au Royaume-Uni. Vous considérez-vous toujours comme une new-yorkaise ?
Oui. Et je le serai toujours. Etre new-yorkais, c’est appréhender la vie en tant qu'enfant de la ville. C’est une part de moi, que j’en sois consciente ou non, et cela affecte mon comportement, ma façon de communiquer dans les autres villes. Je suis le produit d’une ville où tout est possible. New York est inoubliable, belle et tragique, vous savez, à la fois accueillante et distante, tout cela en une après-midi.
Vous êtes une citadine, n’est-ce pas ?
Oui, j’aime participer à la vie de la ville. J’aime savoir ce qui la fait bouger et ce qui s’y passe de nouveau. Vous qui travaillez pour Time Out, dites-moi qui fait bouger la ville !
La ville que l’on voit dans le film 'Ghost in the Shell’ est-elle une dystopie ? Est-ce un monde qui a mal tourné ?
Je ne pense pas. Non, je ne crois pas que ce soit une vision pessimiste du futur. Ça y ressemble, bien sûr, mais ce ne serait pas si farfelu.
Pensez-vous que la situation politique actuelle a incité beaucoup d’entre nous à s’intéresser au futur ?
Oui, et nous avons été plutôt complaisants. Aux Etats-Unis, nous n’avons rien qui s’apparente à un service militaire ou quoi que ce soit du genre. Donc les gens ne pensent pas nécessairement à voter, alors que c’est un devoir de premier ordre dans d’autres pays. Et maintenant, c’est le retour de bâton. Cela nous a conduit à ce nouveau gouvernement, qui est effrayant.
Qu’est-ce qui vous effraie le plus dans ce gouvernement ?
Je suis très inquiète des mesures prises concernant l’environnement car elles seront irréversibles. Nous avons déjà connu des administrations qui n’étaient pas du tout progressistes, mais cette présidence est une première dans le sens où nous sommes gouvernés par quelqu’un qui n’a aucune expérience en politique. Il est imprévisible et clairement mégalomane. Une personne comme Trump est complètement déconnectée du monde réel depuis des dizaines d’années !
Et pourtant, Donald Trump a fait campagne en tant que candidat anti-système et proche du peuple…
Je ne pense pas qu’il soit perçu comme un homme du peuple. Les gens sont si dégoûtés d’eux-mêmes qu’ils ne parviennent pas à élire quelqu’un qui leur parle directement. Les votants ont simplement dit : essayons autre chose ! Sans même se demander ce que cela pouvait bien signifier. Réformer : oui, je suis pour. Mais être anti-gouvernement pour être anti-gouvernement n’a pas de sens. C’est ignorant, idiot et frustrant. Mais maintenant nous y sommes - et pour quatre ans ! Les ténèbres se rapprochent… Mais je continuerai à me battre !
Vous êtes davantage connue à travers le monde pour votre rôle de Black Widow dans la série des 'Avengers'. Qu’est-ce que ce personnage a gardé d’intéressant depuis si longtemps ?
Cela fait huit ans que je travaille avec ce personnage. Je suis pressée de découvrir ce qu'elle va devenir. J’attends les scénarios des 'Avengers' 3 et 4 - comme nous tous ! « Où est ce p***** de script Marvel ? » Je joue Black Window depuis longtemps, ce qui me permet d’avoir mon mot à dire et d’adapter mon jeu d’acteur comme je l'entends. C’est intéressant en tant qu’acteur de se replonger dans un rôle que l’on connait.
Les médias vous considèrent comme la femme la plus sexy sur Terre. Comment gérez-vous ça ?
J’ai déjà été approchée pour faire la couverture de différents magazines, mais j’ai refusé. Je me suis dit : non, je ne veux pas être traitée comme un objet. Mais parfois je me résigne, c’est comme ça. Une chose est sûre : on ne reste pas à vie la chose la plus sexy de quoi que ce soit !