Entre ses murs palpitait autrefois le cœur du Claude Sainlouis, un bistrot légendaire ancré à Saint-Germain-des-Prés depuis les années 1960. La silhouette de son propriétaire dansait alors entre les tables pour offrir à ses convives une cuisine lyonnaise traditionnelle consacrée aux viandes. Repris depuis par le médiatique Cyril Lignac, le 27 rue du Dragon a désormais changé de nom sans perdre pour autant son mythique papier peint à fleurs.
Aux Prés, anciennement Au chardenoux des Près, frère cadet du Chardenoux installé rive droite, a gardé son charme d’antan, avec son air de salle à manger de grand-mère, ses photographies des présidents de la Ve République, son comptoir de marbre et sa trancheuse Berkel. Si la salle semble ne pas avoir bougé, l’assiette s’est métamorphosée sous les doigts du chef.
Confortablement avalé par des banquettes couleur cognac, on hésite longuement entre sacrifier son budget pour une entrée (autour de 15 euros) ou se fendre d’un dessert. Une poêlée de chipirons relevée de piments d’Espelette ou un généreux baba au vieux rhum ? Une fricassée de girolles ou des figues fraîches baignées de crème glacée à la vanille ? La lecture de la carte a tout d’un choix cornélien. Servie dans une petite marmite, une poignée de coques taquine un dos de cabillaud onctueux tandis que de fines lamelles de pomme réveillent le lieu jaune. Si les saveurs mériteraient parfois d’être un peu relevées, la chair blanche du poisson fond littéralement sur la langue. De la gastronomie de bistrot d’une délicatesse rare, plus abordable à l’heure du déjeuner avec une formule entrée-plat ou plat-dessert pour 34 euros. Que demande le peuple ?