Ici, c’est Parigi ! Vu de l’assiette, on pourrait penser que Paname est une ville italienne tant elle regorge de bonnes adresses de la Botte où faire ribote : Passerini le sérénissime, Dilia la douce, Anna la survoltée… Alors forcément, quand une nouvelle enseigne affiche une carte avec des prétentions transalpines et une finale en -o sur sa devanture, elle doit être prête à soutenir la comparaison.
La dernière en date, c’est Il Camino (le chemin, dans la langue de Pasolini), par la team Déviant qui a renvoyé au pays le four de l’ancienne pizzeria Da Graziella pour le remplacer par un bijou de grill et une carte courte sur pâtes. Un chemin tout tracé vers de la néo-osteria avec bougies sur table, spectaculaire faïence bigarrée aux murs et un esprit festif, marque de fabrique du groupe Savoir Vivre, déconseillé aux intolérants aux décibels ou simplement à qui aime discuter sans hurler pendant le repas. Et dans l’assiette ? Le service attentionné n’enlève rien à des plats rudement tarifés et d’une grande imprécision : artichaut à la braise et poutargue neurasthénique (11 €) ; tagliatelles dans un ragú flotteux (21 €) ; cinq (5) tortelli à la ricotta, sans sauce aucune, vaguement parsemés de confetti d’asperge comme une fête d’anniversaire ratée (21 €)…
On reprend espoir avec un beau pavé d’agneau de lait, justement grillé dehors, fondant dedans, trônant dans un jus corsé (29 € ), flanqué d’une salade de puntarelle astiquée de vinaigrette anchois-citron sans doute sortie du frigo à la dernière minute et donc servie bien trop froide (7 €) – prière de goûter les plats avant envoi ! Jusqu’au coup de grâce porté à nos espérances, avec un tiramisu surgras et sec (10 €)… On noie notre chagrin dans l’excellente bulle de Croci (8,50 €) et dans un « rouge léger qui va bien » – à 14 € le verre, l’air de rien. Une adresse qui vient d’ouvrir, certes, et qui a des ajustements à faire, soit, mais la route est longue et la pente est raide pour ce Camino.