Se sentant à l’étroit rue Beethoven et après un long retard dans les travaux, l’Astrance, fameux restaurant gastronomique, a enfin déménagé rue de Longchamp dans nettement plus grand. L’Astrance 2 est un duplex aux allures de salon VIP Air France, adouci de formes organiques, de bois blond, de banquettes crème BCBG et, au fond, d’une grande cuisine étincelante comme une nef. À son bord, Pascal Barbot, jadis triplé étoilé, qui fait ici du neuf avec de l’ancien, cette gastronomie brillante, végétale et agrumière qui montre la voie depuis l’an 2000 à la nouvelle garde : Adeline Grattard, Tatiana Levha, Manon Fleury…
Maître Barbot sur son arbre perché revient le couteau de cuisine entre les dents. Comme il veut “faire rentrer la nature dans la salle”, le resto fait aussi pépinière arboricole (véridique) et le menu dej à 125 € (285€ au diner ouch !) s’ouvre sur des bouchées végétales toutes crues : rondelle de kiwi rouge, shiitakés marinés au saké, pousses d’herbes amères, et tranches d’un stupéfiant agrume croquant comme une pomme, jamais goûté avant… Le contraire des amuse-bouches chichiteux : ici, le palais se désennuie dans l’épure maraîchère.
S’ensuit un menu gambadeur, qui va un peu à hue et à dia dans le vaste pré carré du chef : sablé au comté et granny smith ; colossal bulot à piquer d’un trident en cure-dent ; céleri vapeur et jus d’oignon en bon plat végan de rôtisseur. Puis un classique de la maison depuis vingt piges : le maquereau mariné au miso, beurre blanc, navet cru, agrume et riz koshihikari, toujours aussi délicieux. Un plat évanescent contrasté dans la foulée par l’opulence d’une part de tourte au canard colvert et foie gras, vernie d’un jus luminescent, à faire s’exclamer d’aise le mousquetaire qui sommeille en nous… A la fin, on a plaisir à retrouver la mousseline de pomme de terre et glace vanille, gimmick du chef, puis à cuillérer une tartelette choco plus coulante que votre mère quand vous faisiez une bêtise le jour de votre anniversaire.
Et puis ça boit en grand, comme nous l’autre jour qui avons dilapidé nos étrennes dans un blanc rayonnant du grand Hervé Souhaut, parmi plein de refs de ouf (dès 55 €). En somme, malgré un service en salle encore un peu vert, Barbot et Christophe Rohat, son associé de toujours, sont de nouveau prêts à en découdre avec les astres culinaires.