Dans un Paris où le foncier coûte un rognon, Loïc Minel et Christophe Juville tentent la coloc de restos. Une idée audacieuse des deux comparses qui ont déjà ourdi Lolo cave à manger, un réduit à vin nature (avec kitchenette) dont la taille en loi Carrez est inversement proportionnelle à la surface symbolique de cool. Dans ce Lolo Bistro, le duo voit plus grand, plus cuisiné et plus enflammé avec son massif braséro qui, derrière le comptoir, flambe plus qu’un ludopathe à une table de black jack.
Le principe ? Au dej, ce local accueille Spok, 41e adresse de la chaîne de cantines lancée avec succès par Christophe Juville. Au dîner, ils changent d’équipe, de carte et retournent l’enseigne réversible (très malin) pour que les lieux deviennent Lolo Bistro, avec son néon rouge sang et ses tables de troquet échangistes où s’envoyer les flèches enflammées bien décochées par Zac Gannat. Ce soir-là, kiffants temakis de Saint-Jacques titillés de raifort, posés sur une feuille de nori ouverte (9 €), salace flat bread à l’ail noir et crème de cheddar (7 €), massif scotch egg merguez-vermouth sous son lourd kilt de panure (11 €), impeccables agnolotti à l’ail des ours (14 €), érotique côte de cochon milanaise épaisse comme un livre de poche de 400 pages mais servie un peu trop crue à notre goût (22 €)…
De la “bistronomy” d’auteur, fougueuse dans ses inspirations, intraitable dans ses intentions, artiste dans ses dressages, école Gregory Marchand à Londres où le chef de Lolo Bistro fit ses classes. Au godet, on peut compter sur Loïc pour nous faire boire autre chose que de l’eau-l’eau : par exemple un spätburgunder, le cousin teuton du pinot noir, qui la joue tout en fraîcheur (30 €) afin de contrecarrer la chaleur des lieux. Un resto d’ambiance à investir en petite bande déchaînée.