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5 livres de poche pour l'été

Notre sélection de 5 romans trop bien

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Vous n'osez pas l'avouer, mais vous avez peur de l'été. Pourquoi ? Parce que vous vous imaginez déjà, sur la plage, à chercher désespérément une prise pour recharger votre ordinateur portable. Parce que vous paniquez à l'idée de ne pas avoir le Wifi dans votre tente de camping et d'être dans l'incapacité de vous connecter pour regarder un nouvel épisode de 'Game of True Detective'. Parce que vous avez déjà des sueurs froides en pensant griller votre tablette à cause de ce put*** de sable. Bref, parce que dans le fond, vous êtes pathologiquement accro à la technologie. Alors pour vous, on a pensé à un truc impérissable, inusable, qui marchera en toutes circonstances : le livre. Et même mieux, encore moins cher : le livre de poche. Voici donc notre sélection de cinq romans trop bien, garantis sans prix Goncourt, nuances de gris et noms ronflants, à ne pas rater cet été. 

1. 'La Vie est un tango' de Lorenzo Lunar

Pour ceux qui rêvent d'un été cubain et musical (mais dont le budget ne pourra pas les emmener beaucoup plus loin que Maubeuge).

Sous prétexte d'écrire un polar, Lorenzo Lunar écrit une chanson. Une ritournelle un peu fainéante, un peu sensuelle, un peu triste aussi. Une de celles qui restent dans la tête, et qui, sans en avoir l'air, arrivent à nous toucher quand on ne s'y attend plus. 'La Vie est un tango', c'est l'histoire d'un flic de Santa Clara – un bled au centre de Cuba. Son pays est parti à vau-l'eau il y a un moment maintenant, et si officiellement, tout le monde est en train de vivre le bonheur de la révolution castriste, la réalité est beaucoup moins rose. Alors il tente, quand il peut, de poser une rustine ici ou là, pour que la vie continue, cahin-caha, son bonhomme de chemin. Un roman pointilliste, presque une série de photos, de portraits atypiques de tous ces Cubains qui ont su redoubler d'ingéniosité afin de trouver le moyen de grappiller quelques pièces pour survivre.

Traduit de l'espagnol (Cuba) par Morgane Le Roy, éd. Folio, 208 pages, 6,40 €.

2. 'Red Grass River' de James Carlos Blake

Pour ceux qui rêvent d'un été moite et excitant (et qui ne pourront pas regarder 'Boardwalk Empire' ou 'Bloodline' sur la plage).

Vous avez eu chaud pendant la canicule ? Bande de poltrons... Si vous voulez côtoyer la vraie chaleur, osez affronter la Floride, sa flotte stagnante, sa touffeur tropicale, ses alligators, ses serpents, ses moustiques et ses sables mouvants. Et si ça ne vous suffit pas, ce décor empoisonné est habité par des hors-la-loi capables de disparaître dans le marais pour réapparaître dans votre dos, le canon du revolver vissé sur votre nuque. A l'orée du XXe siècle, le coin n'est encore qu'un repaire de bouseux sur le point de devenir l'un des plus clinquants paradis du rêve américain. Braqueurs de banques, bootleggers, agents de la prohibition, desperados solitaires : dans ce roman majestueux et bourré de scènes inoubliables, tout le monde s'affronte au nom du progrès, qui déboule aussi vite que les automobiles sur les routes fraîchement pavées. Gaffe quand même, il reste encore quelques alligators affamés...

Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Emmanuel Pailler, éd. Rivages, 544 pages, 9 €.

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3. 'Rien dans les poches' de Dan Fante

Pour ceux qui rêvent d'un été où l'océan serait constitué non pas d'eau salée, mais uniquement de bière / whisky / vin rouge (au choix).

Bruno Dante a foiré. Sa femme s'est barrée, son talent d'écrivain s'est barré, ses amis se sont barrés. La cause ? Une méchante addiction à l'alcool qui finit une fois sur deux en tentative de suicide (et l'autre fois dans des situations peu glorieuses). Mais à force de toucher le fond, Dante finit par vouloir rebondir, et la mort de son père va lui servir de déclic. C'est le début d'une odyssée délirante, durant laquelle Dante enchaîne les plans foireux avec pour seuls compagnons le vieux clébard de son père, et une bouteille de vin évidemment - « Pour moi, chevaucher le Mogen David [son vin favori], c’est comme sauter un gorille femelle de trois cents kilos. Ce n’est pas vous qui tenez les commandes. C’est le gorille qui dit quand c’est fini. Pareil avec le vin. » Un roman en forme d'autofiction déjantée, signé par le fiston du (monumental) John Fante.

Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Léon Mercadet, éd. Points, 240 pages, 6,90 €.

4. 'Le Chant d'Achille' de Madeline Miller

Pour ceux qui rêvent d'une histoire d'amour mythique (qui finira mal avant la fin de l'été).

Faire un roman d'amour sur le plus grand des héros grecs, Achille, et son ami Patrocle, il fallait oser. Non seulement Madeline Miller l'a fait, mais elle l'a fait avec un talent remarquable, parvenant à tirer de ces figures légendaires des personnages de chair et d'os. Entre combats légendaires, dieux vengeurs, oracles macabres et ruses de l’ineffable Ulysse, elle s'insinue dans les interstices du mythe homérique pour raconter à la première personne, à travers les yeux de Patrocle, l'amitié entre les deux garçons qui se transforme bientôt en passion ravageuse et paroxystique. 'Le Chant d'Achille' parvient à revisiter 'L'Illiade' avec une érudition, un respect et un enthousiasme tels, que l'œuvre d'Homère n'est jamais défigurée. Au contraire, Madeline Miller arrive à en tirer un texte porté par un souffle étonnant – à l'image des cent dernières pages au cœur de la titanesque guerre de Troie, magnifiques. Un roman initiatique, d'amour, de guerre, d'amitié et d'orgueil.

Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Christine Auché, éd. Pocket, 472 pages, 7,90 €.

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5. 'La Langue d'Altmann' de Brian Evenson

Pour ceux qui rêvent d'un été chelou (mais alors vraiment chelou).

Si vous avez l'impression de toujours lire les mêmes choses, ouvrez un Brian Evenson. La suite, c'est à vos risques et périls : vous plongez dans un univers impénétrable, où la mort règne en maître et l'étrange régit le monde. Pour vous situer, ce type est quand même capable de lâcher des phrases du genre : « Le seul bruit était celui des mouches et du pourrissement de la viande. » Recueil de vingt-six textes de longueur variable, 'La Langue d'Altmann' est le premier ouvrage de l'auteur de 'La Confrérie des mutilés' ou 'Inversion', entre autres romans remarquables. On y trouve ses thèmes de prédilection (les rapports parents-enfants, le fanatisme, le double, la mutilation...), relevés par une pointe d'humour surprenante qui donne à ses nouvelles tantôt des allures de farce malsaine, tantôt des airs de fable paranoïaque. Si l'on pense parfois à Buzzatti ou à Kafka, Evenson peine à être comparé. Dérangeante, sa littérature vaut pour les sensations presque physiques qu’elle provoque, et pour cette graine de bizarre qu’elle laisse traîner dans notre esprit, et qui persiste longtemps après avoir refermé le livre.

Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Claro, éd. 10/18, 300 pages, 7,10 €.

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